15ème législature

Question N° 112
de M. Alexandre Holroyd (La République en Marche - Français établis hors de France )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > état civil

Titre > Transposition des mariages de couples de meme sexe entre le RU et la France

Question publiée au JO le : 23/01/2018
Réponse publiée au JO le : 31/01/2018 page : 571

Texte de la question

M. Alexandre Holroyd attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la situation des couples de même sexe ayant conclu un civil partnership au Royaume-Uni, converti par la suite en mariage localement. Beaucoup éprouvent en effet des difficultés à faire retranscrire leur mariage en France. Or l'administration française conteste la retranscription de leur mariage dans l'état civil français bien que la conversion en un mariage tout à fait légal au regard du droit britannique ait été réalisée. Pour pallier ce type de situation, la loi française précise bien qu'elle prend également en compte les unions réalisées « selon les formes usitées » dans le pays en question, ce qui correspond à cette situation. Plusieurs couples franco-britanniques se heurtent à cet obstacle et ne voient que la perspective d'un contentieux avec le parquet de Nantes pour remédier à leur situation ou d'un divorce suivi d'un remariage en France. Dans une réponse du 19 octobre 2017, elle indiquait qu'aux termes des articles 171-1, 171-8 et 171-2 du code civil, plusieurs éléments faisaient obstacle à cette transcription, notamment l'exigence de comparution personnelle et de publicité. Or, dans de très nombreux cas, ces conditions sont remplies dans le cadre de la conclusion du civil partnership, converti par la suite en mariage en respect des lois britanniques. Aussi, il souhaiterait savoir ce que le Gouvernement envisage pour résoudre une situation douloureuse pour les personnes concernées en ce qu'elle remet en cause la sincérité de leur union, qu'une modification réglementaire ou législative simple pourrait résoudre.

Texte de la réponse

RETRANSCRIPTION EN FRANCE DES UNIONS ENTRE PERSONNES DE MÊME SEXE CONCLUES AU ROYAUME-UNI


Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Holroyd, pour exposer sa question, n°  112, relative à la retranscription en France des unions entre personnes de même sexe conclues au Royaume-Uni.

M. Alexandre Holroyd. Ma question, qui s'adresse à Mme la garde des sceaux, porte en effet sur la situation des couples de même sexe ayant conclu au Royaume-Uni un civil partnership converti par la suite en mariage de droit britannique.

Beaucoup de ces couples éprouvent des difficultés à faire retranscrire leur mariage en France : l'administration française conteste sa retranscription dans notre état civil bien que la conversion en mariage soit tout à fait légale du point de vue du droit britannique, dans lequel elle a été effectuée. Dans ce type de cas, la loi française précise pourtant bien qu'elle prend également en considération les unions conclues « selon les formes usitées » dans le pays en question, ce qui correspond à la situation dont nous parlons. Plusieurs couples franco-britanniques se heurtent à cet obstacle et ne voient d'autre solution à leur problème que la perspective d'un contentieux avec le parquet de Nantes ou d'un divorce suivi d'un remariage en France.

Dans une réponse du 19 octobre 2017 à une lettre que je lui avais envoyée, Mme la garde des sceaux indiquait qu'aux termes des articles 171-1, 171-8 et 171-2 du code civil, plusieurs éléments faisaient obstacle à cette transcription, notamment s'agissant des exigences de comparution personnelle et de publicité. Or, dans de très nombreux cas, ces conditions sont satisfaites lors de la conclusion d'un civil partnership, converti par la suite en mariage au Royaume-Uni.

Que peut faire le Gouvernement pour remédier à cette situation, très douloureuse pour les personnes concernées dans la mesure où elle remet en cause la sincérité de leur union ? Une modification réglementaire ou législative pourrait-elle apporter une solution appropriée ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le député, je vais vous répondre à la place de Mme la garde des sceaux, qui vous prie de l'excuser de son absence ce matin.

Les civil partnerships de droit anglais peuvent en principe produire pleinement leurs effets en France, où ils sont assimilés à un pacte civil de solidarité – PACS –, dans la mesure où l'article 515-7-1 du code civil dispose : « Les conditions de formation et les effets d'un partenariat enregistré ainsi que les causes et les effets de sa dissolution sont soumis aux dispositions matérielles de l'État de l'autorité qui a procédé à son enregistrement. »

Les difficultés rencontrées par certains de nos concitoyens tiennent au fait que le droit anglais permet désormais la transformation du civil partnership en mariage, et ce de manière rétroactive.

Le mariage contracté en pays étranger, que ce soit entre Français ou entre un Français et un étranger, est effectivement valable chez nous s'il a été célébré selon les formes usitées dans le pays de célébration. Notre droit exige cependant de surcroît que certaines formalités préalables au mariage soient accomplies lorsque l'un des époux est français, à savoir la délivrance d'un certificat de capacité à mariage et la publication des bans. Le mariage d'un Français requiert en outre sa présence, aux termes de l'article 146-1 du code civil, et il doit être contracté publiquement, en application de l'article 191 du même code. Lorsque ces conditions ne sont pas réunies, l'autorité diplomatique ou consulaire sursoit à la transcription du mariage et informe le procureur de la République.

La comparution personnelle de l'époux français et la publicité permettent de s'assurer de la réalité du consentement de l'époux français. L'intention du législateur, qui a introduit en 1993 cette condition de fond tenant à la présence des époux, était bien de lutter contre les mariages de complaisance.

Il est important à cet égard de rappeler qu'en l'état actuel de la législation, ces conditions s'apprécient logiquement au jour de la célébration du mariage, date à laquelle le mariage produit ses effets entre les époux. En droit français, un mariage ne saurait emporter d'effets rétroactifs à une date antérieure à sa célébration, à la différence de la législation au Royaume-Uni – le Marriage (Same Sex Couples) Act 2013 dispose que le mariage issu de la conversion d'un partenariat civil doit être considéré comme ayant existé depuis la date de la constitution dudit partenariat.

Nous n'oublions toutefois pas nos nombreux compatriotes qui vivent à l'étranger. Il n'est évidemment pas question de remettre en cause la sincérité de leur engagement. Les services de la garde des sceaux vont donc engager une réflexion en vue de déterminer si les obstacles actuels sont susceptibles d'être levés pour tenir compte de la situation matrimoniale de ces couples franco-britanniques, dans le respect de notre ordre public international et de notre politique de lutte contre les mariages de complaisance.

Mme la présidente. La parole est à M. Alexandre Holroyd.

M. Alexandre Holroyd. Merci beaucoup, monsieur le ministre, de cet engagement à lancer une étude sur la question.

Le nombre de Français vivant à l'étranger a évolué depuis les années 1990, et ceux qui habitent le Royaume-Uni représentent aujourd'hui l'équivalent de la ville de Bordeaux. Dans ces conditions, il me paraît impératif de se rappeler l'esprit de la loi, au-delà des aspects techniques et des problèmes de transcription de régime entre pays – particulièrement s'agissant d'un partenaire aussi proche que l'est pour nous le Royaume-Uni.