15ème législature

Question N° 1434
de Mme Mireille Robert (La République en Marche - Aude )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Gilets jaunes

Question publiée au JO le : 28/11/2018
Réponse publiée au JO le : 28/11/2018 page : 12811

Texte de la question

Texte de la réponse

GILETS JAUNES


M. le président. La parole est à Mme Mireille Robert. (Les députés des groupes LaREM et MODEM et plusieurs députés du groupe SOC se lèvent et applaudissent. - Applaudissements sur plusieurs autres bancs.)

M. Fabien Di Filippo. Si tu ne viens pas aux gilets jaunes, les gilets jaunes viendront à toi.

Mme Mireille Robert. Je ne prends pas aujourd'hui la parole pour vous raconter l'intrusion violente d'un groupe d'individus masqués et vêtus d'un gilet jaune, que ma famille et moi-même avons subie dans notre domicile privé. Pas de revendications, seulement une intimidation pour le moins inquiétante. Dans notre République, vous en conviendrez, c'est intolérable et inadmissible. Heureusement, j'ai reçu un soutien massif de nombre de mes collègues députés, d'élus, de citoyens choqués mais aussi de gilets jaunes eux-mêmes qui n'ont pas approuvé cette action et ne s'y sont pas reconnus. Je les en remercie tous ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM.)

Pourtant, je comprends l'appel de détresse des gilets jaunes, moi qui suis issue d'un département très pauvre, que rien n'a épargné : ni la désindustrialisation, ni la grêle, ni les attentats, ni les inondations !

M. Hubert Wulfranc. Ni la suppression de l'ISF !

Mme Mireille Robert. Ce gilet jaune qui fleurit sur les ronds-points n'est pas choisi au hasard. Il est l'appel au secours de ceux qui se sentent oubliés, abandonnés, laissés sur le bord du chemin. Si je comprends et respecte la volonté de citoyens découragés, de manifester, si c'est un droit que leur garantit la Constitution, je m'interroge cependant sur les dérives violentes auxquelles nous assistons depuis une dizaine de jours.

Mme Marine Le Pen. Il s'agit de citoyens en colère.

Mme Mireille Robert. Des appels nominatifs à la haine et aux exactions sont proférés impunément sur les réseaux sociaux, parfois relayés par la presse et la télévision. (Bruit.) Je fais comme de nombreux élus, quotidiennement, l'objet de torrents d'injures et de menaces. Il ne suffit plus d'écouter cette colère qui gronde, nous devons y répondre. Nous avons commencé à voter des mesures qui contribuent à améliorer le pouvoir d'achat. Il nous faut aller plus loin. C'est le sens des annonces du Président de la République ce matin. Et nous, députés, nous prendrons toute notre part au tour de France qu'il appelle de ses vœux.

Au-delà du droit légitime à manifester, comment rappeler à la loi ceux qui appellent à la violence…

M. Fabien Di Filippo. Pas par votre mépris, en tout cas !

Mme Mireille Robert. …par le biais des réseaux sociaux ou en se répandant dans les médias ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Ce matin, le Président de la République a réuni, au palais de l'Élysée, les membres du conseil national de la transition écologique, des responsables d'associations, des élus, des responsables des collectivités territoriales, d'ONG, bref l'ensemble des acteurs qui, par leur engagement, participent au débat public et à la réalisation des objectifs fixés par la France en matière de transition écologique. À l'occasion de cette réunion, il a rappelé combien il était indispensable de tenir le cap fixé si nous voulions que la France soit à la hauteur des enjeux, si nous voulions qu'elle se prépare à cette transition qui n'est pas un fantasme mais bien une réalité qui a déjà commencé et qui nous impose de nous adapter sous peine de disparaître.

Le Président a réitéré avec force qu'il tiendrait ce cap et il a également indiqué que, si nous voulions être efficaces, nous devions engager une réflexion avec l'ensemble des Français et évidemment avec les corps intermédiaires qu'il ne s'agit pas de court-circuiter. Avec l'ensemble des Français – car on ne peut pas se limiter à un débat avec les corps intermédiaires – pour travailler à la meilleure façon de les accompagner dans cette transition, pour travailler à la définition des bons instruments, ceux qui permettront en effet, pas seulement dans les discours, pas seulement à travers les masses financières mobilisées, mais dans les faits, aux Français de rénover leur habitat, transformer leur façon de consommer, de façon qu'ils soient libérés de la dépendance au pétrole et acteurs de la transition écologique.

Le Président de la République l'a fait parce que nous ne pouvons pas dévier de cette voie et parce que cette entreprise ne pourra être couronnée de succès que si les Français s'en saisissent et que s'ils sont effectivement accompagnés.

À l'occasion de son intervention, le chef de l'État a tracé le chemin qu'empruntera la France concernant la programmation pluriannuelle de l'énergie. Il a rappelé les dispositions présentées hier par la ministre des transports concernant le projet de loi d'orientation sur les mobilités. Surtout, il a invité l'ensemble des acteurs du débat public français et les citoyens à imaginer de nouvelles méthodes pas seulement pour se concerter, pas seulement pour débattre, mais pour imaginer les instruments que nous utiliserons demain. Il l'a fait parce qu'il a entendu ce mouvement de colère que vous évoquez, d'émotion, de contestation, de déclassement,...

M. Jean-Paul Lecoq. De rébellion !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …cette angoisse pour l'avenir, et qui n'est pas feinte, et qui n'est pas illégitime. Il a entendu la nécessité de réparer tant de choses qui, depuis peut-être trop longtemps, ne fonctionnent pas comme elles le devraient.

Je note, madame la députée, que le Président de la République affirme à juste titre que nous devons associer les Français à cette réflexion. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.)

M. Jean-Paul Lecoq. Il serait temps !

M. Pierre Cordier. Il fallait y penser avant !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Mais il dit clairement que la violence, l'intimidation, n'ont pas leur place dans le débat public et condamner la violence et l'intimidation, ce n'est pas critiquer et condamner ceux qui expriment leur colère. La République française, la démocratie, permet à nos concitoyens, et c'est son honneur, d'exprimer leur désaccord,…

M. Jean-Paul Lecoq. Oui mais vous ne les entendez pas !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …de manifester – et nous les entendons et nous prenons en considération ce désaccord. Reste, je le répète, que la République ne permet pas d'aller menacer chez eux des parlementaires ; elle ne permet pas de faire entrer la violence dans le débat public ; elle ne permet pas d'excuser ce dont vous, madame la députée, avez été victime. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Et je tiens à dire votre réaction à la représentation nationale alors que l'acte dont vous avez été victime relève à l'évidence d'une infraction pénale : le lendemain, au téléphone, vous m'assuriez non seulement de votre souci de continuer à écouter et à entendre y compris ceux qui ne sont pas d'accord avec vous, mais aussi que rien ne vous ferait vous éloigner du chemin pris par la majorité pour atteindre les objectifs fixés par le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)