15ème législature

Question N° 1463
de Mme Marielle de Sarnez (Mouvement Démocrate et apparentés - Paris )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > énergie et carburants

Titre > annonces du Premier ministre

Question publiée au JO le : 05/12/2018
Réponse publiée au JO le : 05/12/2018 page : 13128

Texte de la question

Texte de la réponse

ANNONCES DU PREMIER MINISTRE


M. le président. La parole est à Mme Marielle de Sarnez.

Mme Marielle de Sarnez. Monsieur le Premier ministre, la France est bouleversée, en colère pour certains, profondément inquiète pour tous. Les Français veulent des réponses.

M. Jean-Luc Reitzer. Nous aussi !

Mme Marielle de Sarnez. Ils veulent d'abord le retour de l'ordre républicain, ne plus jamais revoir les violences ni les scènes de guerre civile, en plein cœur de notre capitale, dans les lieux les plus symboliques de notre histoire. (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM, LaREM et UDI-Agir ainsi que sur quelques bancs des groupes LR et SOC.)

Ils mesurent aussi toute la portée de ce mouvement. C'est un mouvement de toutes les fractures. La fracture est sociale : elle touche aux conditions de vie, au revenu du travail, aux salaires, à la fiscalité. C'est aussi une fracture démocratique : une partie importante du pays ne se sent ni prise en considération, ni représentée. Le mouvement de protestation s'étend. L'économie française se fragilise. Les commerçants, les artisans et les salariés sont touchés. Surtout, l'unité et la cohésion sociale du pays sont mises à mal. Il est donc absolument urgent d'agir.

Vous avez annoncé la suspension des hausses de taxe. Il fallait à l'évidence ce geste d'apaisement et d'ouverture. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes MODEM et LaREM.)

M. Thibault Bazin. Mais insuffisant !

M. Éric Straumann. Il fallait le faire il y a quinze jours !

M. Michel Herbillon. C'est trop peu et en retard !

Mme Marielle de Sarnez. Mais, au-delà, il faut concevoir des réponses aux manques, aux frustrations, aux raisons profondes de ce mouvement de protestation, qui vient de loin, de très loin, date de plusieurs décennies. (M. Erwan Balanant applaudit.)

M. Éric Straumann. De Charles Martel ?

Mme Marielle de Sarnez. Il faut y répondre sur le fond et dans la durée. (« Il faut agir ! » sur les bancs du groupe LR.)

En vérité, il faut réécrire le contrat social et civique, définir ensemble les buts que notre nation se fixe en matière d'équité fiscale,…

M. Sébastien Leclerc. Qui est président ?

Mme Marielle de Sarnez. …en matière de justice pour les territoires, en matière d'organisation des pouvoirs et d'organisation de l'État, en matière de transition écologique.

Mme Émilie Bonnivard. Cela fait un an et demi que nous vous le disons !

Mme Marielle de Sarnez. Monsieur le Premier ministre, la représentation nationale veut vous entendre sur les orientations que le Gouvernement entend mettre en œuvre…

M. le président. Merci, madame de Sarnez…

Mme Marielle de Sarnez. …pour retrouver la paix civile. (Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM. – « Debout ! » sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Vous avez raison, madame la députée : la colère vient de loin.

M. Michel Herbillon. Vous ne vous levez pas ? C'est une telle réussite que vous devriez vous lever !

M. le président. S'il vous plaît…

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Elle vient de loin,…

Un député du groupe LR . De Juppé !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …et, pendant longtemps, elle a grondé et s'est accumulée. Il y a une façon au fond assez simple de la décrire, qui passe par des chiffres, mais les chiffres en la matière sont éloquents :…

M. Michel Herbillon. Vous êtes au pouvoir depuis dix-huit mois !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …en dix ans, le pouvoir d'achat a baissé continuellement, les impôts ont augmenté continuellement et la dette publique a pris 35 points de PIB. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. Éric Straumann. Qui était au pouvoir ces dix dernières années ?

M. Pierre Cordier. La hausse de la CSG, ce n'est pas nous ! Ni celle des taxes sur le carburant !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je ne m'en satisfais pas, madame la députée.

M. Nicolas Forissier. Il faut attaquer Juppé !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Et je veux croire que, malgré les vociférations, personne ne s'en satisfait. Trente-cinq points de PIB supplémentaires de dette, qui peut s'en réjouir ?

M. Michel Herbillon. Vous êtes au pouvoir depuis dix-huit mois !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Une augmentation continue des impôts, qui peut s'en réjouir ?

Il nous appartient, à nous et à tous ceux qui œuvrent au service du pays, de faire en sorte d'inverser toutes ces évolutions dangereuses, de faire en sorte d'augmenter le pouvoir d'achat,…

M. André Chassaigne. Vous faites l'inverse !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …de faire en sorte de baisser les prélèvements obligatoires, de faire en sorte de réduire la dette publique.

M. Pierre Cordier et M. Michel Herbillon . Vous avez fait tout le contraire !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Tel est l'objectif qui a été fixé par le Président de la République. Il n'est pas facile à atteindre, je vous le confirme, mais il est nécessaire pour le pays.

M. Michel Herbillon. C'est votre travail ! C'est votre responsabilité !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Pour y arriver, la méthode a été, face à cette colère, l'apaisement :…

Mme Valérie Lacroute. Trois semaines !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …j'ai indiqué que les hausses de taxe votées et applicables au 1er janvier prochain seraient suspendues pendant six mois (Exclamations sur divers bancs)

M. Pierre-Henri Dumont. Vous attendez les européennes !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …et qu'aucune augmentation ne pourrait intervenir pendant ces six mois, de façon à ce que nous puissions mener un travail en profondeur avec l'ensemble des parties, l'ensemble des Français, l'ensemble des organisations syndicales et patronales, des associations, des ONG, des élus locaux, l'ensemble de ceux qui contribuent à la définition des solutions que nous allons mettre en œuvre, avec les parlementaires, bien entendu. Il faut que nous puissions trouver les solutions pour accompagner la transition écologique,…

M. Pierre Cordier. En supprimant des trains ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …car elle est là. Nous ne pouvons pas faire comme si elle n'était pas là ; nous savons que nous devons la prendre en considération et l'accompagner, au plus près des besoins précis exprimés par les Français. En matière de mobilités, nous devons trouver des solutions pour ceux qui n'ont pas d'autre option, à ce stade, que l'usage du véhicule individuel. Il faut aussi faire en sorte de mettre sur la table des questions relatives à l'impôt et à sa complexité, à la justice fiscale, à l'efficacité de l'impôt. Nous voulons poser toutes ces questions… (Exclamations sur les bancs du groupe LR)

M. Pierre Cordier. Nous les avons déjà posées !

Plusieurs députés du groupe LR . Dix-huit mois !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. …dans le calme. Il y a beaucoup d'endroits où l'on peut discuter dans le calme, et je suis sûr que cet hémicycle peut en être un. Je l'espère, d'ailleurs, car sinon, c'est très inquiétant pour notre démocratie. (Applaudissement sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Vous avez évoqué, madame la députée, les questions relatives à l'ordre public – nous aurons l'occasion d'y revenir au cours des présentes questions au Gouvernement. Comme vous, madame la députée, j'ai été choqué par les images et, surtout, par la réalité que nous avons vécue à Paris, bien sûr, mais aussi au Puy-en-Velay ou à Toulouse, où des affrontements violents ont eu lieu,…

M. Jean-Luc Reitzer. La faute à qui ?

M. Édouard Philippe, Premier ministre . …où des dégradations de biens publics, de symboles de l'État, du bien commun, du bien de la nation – je pense à l'Arc de triomphe – ont été perpétrées.

M. Thibault Bazin. Vous êtes incapables de les protéger !

M. Édouard Philippe, Premier ministre . Bien entendu, je les condamne.

M. Éric Straumann. Nous aussi !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je veux dire notre admiration pour le sang-froid et le professionnalisme des forces de l'ordre (Applaudissements sur tous les bancs), qui ont fait face, pendant toute la journée, à des attaques d'une violence rarement atteinte. (Mmes et MM. les députés des groupes LaREM, MODEM, LR, UDI-Agir, LT, SOC et GDR se lèvent et applaudissent longuement.)

M. Éric Straumann. Ce sont les victimes de votre politique !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la députée, le débat démocratique est vif, parfois même sonore. Il est nécessaire, parfaitement nécessaire.

M. Michel Herbillon. Vous auriez mieux fait d'écouter les gens qui crient !

Mme Émilie Bonnivard. Nous n'en serions pas là !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous l'assumons tous et, d'une certaine façon, nous aimons tous ce vif débat démocratique. Mais la mise en cause des symboles de la République, la menace qui pèse sur certains élus ou, d'ailleurs, sur certains représentants, même s'ils ne sont pas élus, les attaques délibérées contre les forces de l'ordre ne relèvent pas du débat démocratique : c'est la mise en cause de nos institutions, et c'est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur quelques bancs du groupe UDI-Agir. – « Debout ! » sur les bancs du groupe LR.)