15ème législature

Question N° 162
de M. François Ruffin (La France insoumise - Somme )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Premier ministre
Ministère attributaire > Premier ministre

Rubrique > pharmacie et médicaments

Titre > Sanofi

Question publiée au JO le : 12/10/2017
Réponse publiée au JO le : 12/10/2017 page : 2997

Texte de la question

Texte de la réponse

SANOFI


M. le président. La parole est à M. François Ruffin, pour le groupe La France insoumise.

M. Christian Jacob. Qu'il aille d'abord chercher sa veste !

M. François Ruffin. Monsieur le Premier ministre, le jeudi 20 juillet, vous vous rendiez en catimini sur le site Sanofi de Vitry…

M. Sylvain Maillard. Il l'avait annoncé la veille !

M. François Ruffin. …où vous étiez accueilli par son PDG, Serge Weinberg. Vous n'aviez prévenu ni les médias ni les syndicats, ni les salariés, ni les Français. Cette visite, discrète sinon secrète, ne figurait pas à votre agenda. (Dénégations sur les bancs du groupe REM.)

Avant cela, le 14 mai dernier, Emmanuel Macron entrait à l'Elysée. Lors de cette cérémonie, le nouveau président fendait la foule et venait saluer un vieil ami, le même Serge Weinberg, président-directeur général de Sanofi – un vieil ami car c'est ce patron, membre de la commission Attali, qui avait conseillé au jeune Macron : " Enrichissez-vous !" et qui l'avait aidé à entrer chez Rothschild.

Il y a dix jours, pour compléter la collection, c'est Christophe Castaner qui inaugurait une fresque sur le site Sanofi de Sisteron. Le porte-parole du Gouvernement se faisait alors le porte-parole du groupe pharmaceutique (Protestations sur les bancs du groupe REM) et déclarait : "On ne doit pas critiquer des entreprises qui réussissent, comme Sanofi."

M. Alexis Corbière. Intéressant !

M. François Ruffin. Mais comment ne pas critiquer Sanofi quand on sait, et vous le savez, que ces dernières années, cette entreprise a supprimé 2 000 postes de chercheurs en France et 4 000 dans le monde, quand dans le même temps elle percevait des centaines de millions d'euros en crédit d'impôt recherche ?

Mme Caroline Fiat. Eh oui !

M. François Ruffin. Vous savez, surtout, surtout, qu'on recense environ 14 000 familles victimes de la Dépakine et des milliers d'enfants autistes. Le coût de leur indemnisation s'élèvera au moins à 6 milliards d'euros mais Sanofi refuse de participer au fonds d'indemnisation, la firme en abandonnant l'entière charge à l'État : c'est le contribuable qui paiera !

Bref, je veux m'assurer que, lors de ces rencontres avec Serge Weinberg, vous, le chef de l'État, votre porte-parole, vous avez défendu bec et ongles la recherche, la santé, l'emploi, la justice, contre les intérêts des financiers et que, concrètement, vous avez tapé du poing sur la table pour que Sanofi indemnise les victimes de la Dépakine, afin que l'on ne vous soupçonne pas d'être les complices des labos et de leur lobby.

Le 20 juillet dernier, vous n'avez pas envoyé votre ministre de la santé à votre place sur le site de Sanofi. J'espère qu'aujourd'hui vous n'enverrez pas votre ministre de la santé au micro à votre place (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Edouard Philippe, Premier ministre. J'ai peur, monsieur le député, que vous ne soyez une fois de plus en train de vous faire un film (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ainsi que sur quelques bancs du groupe LC. – Protestations sur les bancs du groupe FI.)

M. Alexis Corbière. Et vous, monsieur le Premier ministre, ne faites pas un roman !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Si je vous comprends bien, monsieur le député, avec vos insinuations élégantes, vous êtes en train de considérer qu'il serait normal, pour la représentation nationale, et normal, pour le chef du Gouvernement de notre pays, de dénigrer dans toute la mesure du possible une entreprise française…

M. Jean-Pierre Door. Bravo !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. ...une entreprise qui fonctionne bien, une entreprise qui crée des richesses en France et qui apporte des solutions à des questions sanitaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM, MODEM et LC ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR.) Oui, monsieur Ruffin, je vous le confirme : je ne suis pas d'accord avec vous. (Applaudissements sur les mêmes bancs. – Protestations sur les bancs du groupe FI.) Monsieur Ruffin, permettez-moi de terminer ma réponse : ce n'est pas parce que l'on crie que l'on a raison, il va falloir vous y faire ! (Mêmes mouvements.)

M. Patrick Hetzel. Ce n'est pas faux !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Je souhaite simplement et très calmement vous dire trois choses très simples.

La première, c'est que lorsque je veux rencontrer des chefs d'entreprise et visiter des sites industriels, je le fais, sans vous demander votre autorisation (Applaudissements sur les bancs du groupe REM) ni demander l'autorisation de personne, sinon de ceux chez qui je m'invite. Telle est la première chose que je voulais vous dire. (Vives exclamations sur les bancs du groupe FI.)

Mme Caroline Fiat. Et les enfants autistes, eux, ils font comment ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Mais calmez-vous, monsieur Ruffin, vous êtes énervé. Il faut vous calmer, et vous aussi, madame. Calmez-vous, tout va bien se passer. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe REM.) La deuxième chose que je veux donc vous dire, monsieur Ruffin, c'est qu'il me semble légitime et même sain qu'un député ou qu'un membre du Gouvernement aille dans sa circonscription visiter un site industriel. J'observe d'ailleurs qu'il vous arrive à vous aussi de le faire dans votre circonscription.

La troisième chose, c'est que nous ne gagnerons rien du tout, ni vous, ni nous, ni personne en France, à instiller systématiquement le soupçon, comme vous venez de le faire, lorsque l'on débat de la santé ou de la production.

Mme Caroline Fiat. Et la Dépakine ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Nous ne gagnerons jamais rien à des insinuations, comme celles que vous venez de formuler. Je le dis calmement, monsieur le député, et je le pense profondément.

M. Éric Coquerel. Des questions précises sont posées ! Ce ne sont pas des insinuations !

M. Alexis Corbière. On vous parle d'un scandale de santé publique !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Les discussions sont légitimes, les désaccords sont normaux et même sains dans une démocratie – je les accepte – mais ces insinuations visant tel ou tel ministre ou le chef du Gouvernement desservent la totalité des pouvoirs exécutif et législatif français – je vous le dis comme je le pense. (Mmes et MM. les députés des groupes REM et MODEM se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LC. – Exclamations persistantes sur les bancs du groupe FI. )