15ème législature

Question N° 179
de Mme Nicole Trisse (La République en Marche - Moselle )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > impôts et taxes

Titre > taxation des géants du numérique

Question publiée au JO le : 18/10/2017
Réponse publiée au JO le : 18/10/2017 page : 3111

Texte de la question

Texte de la réponse

TAXATION DES GÉANTS DU NUMÉRIQUE


M. le président. La parole est à Mme Nicole Trisse, pour le groupe La République en marche.

Mme Nicole Trisse. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, le Président de la République, Emmanuel Macron, a fait de la lutte contre l'optimisation fiscale des grands groupes de l'internet l'une des priorités de ce quinquennat et de l'action européenne. L'objectif est de pouvoir lutter collectivement contre les arrangements fiscaux entre certains États et ces multinationales.

Ces arrangements faussent la concurrence en Europe – que l'on pense par exemple à celui qui existe entre Apple et l'Irlande, qui a d'ailleurs été sanctionné. Dès la fin de l'été, vous avez souhaité vous rendre chez nos partenaires européens afin d'échanger avec eux sur ce sujet, et plusieurs d'entre eux se sont d'ores et déjà ralliés à cette initiative française, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

La volonté du G20 d'ouvrir le débat et le souhait de la Commission européenne d'établir dès 2018 de nouvelles règles pour mieux taxer les géants du numérique, nous poussent à croire que cette proposition française pourrait faire consensus. Après avoir présenté le projet de la France à vos homologues européens, vous l'avez défendu à Washington, à l'occasion des assemblées d'automne de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international.

Or, ce samedi, le secrétaire américain au Trésor, M. Steven Mnuchin, a déclaré y être opposé. Je sais votre détermination concernant cet enjeu majeur. Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous réaffirmer la volonté du Gouvernement de mener à bien cette initiative et nous indiquer votre feuille de route pour la poursuite des négociations avec nos partenaires européens, mais aussi avec les États-Unis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Madame la députée, nous vivons dans un monde formidable, où les entreprises qui ont la capitalisation la plus importante, le chiffre d'affaires le plus élevé et qui font les bénéfices les plus importants en Europe, à savoir les géants du numérique, paient le moins d'impôts et de taxes. Eh bien, ce monde formidable, nous ne l'acceptons pas, et nous ne l'accepterons jamais ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)

M. Erwan Balanant. Pourquoi nos collègues de la France insoumise n'applaudissent-ils pas ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Nous voulons une taxation juste et équitable des géants du numérique en Europe. Nous avons pris, avec le Président de la République, une initiative…

M. Pierre Cordier. Heureusement que vous êtes arrivé !

M. Bruno Le Maire, ministre. …qui a obtenu le soutien de l'Allemagne, de l'Italie, de l'Espagne, puis de dix-neuf États européens, pour taxer le chiffre d'affaires des géants du numérique qui opèrent en Europe. Nous avons bon espoir que cette proposition se traduira par une proposition formelle de la Commission en 2018 et que, d'ici deux ans, les géants du numérique qui opèrent en France et en Europe paieront un juste impôt au Trésor public de la France et des autres pays européens.

Nous avons évidemment reçu une réponse un peu moins ouverte de la part de notre partenaire américain – qui peut en être surpris ? Je ne doute pas, néanmoins, que, le moment venu, les États-Unis et les autres pays de l'OCDE comprendront aussi que leur intérêt fiscal, c'est que tous les géants du numérique paient leur juste impôt…

M. Pierre Cordier. Vous allez leur expliquer !

M. Bruno Le Maire, ministre . …c'est que la fiscalité ne porte pas uniquement sur les entreprises qui font des biens manufacturés, mais aussi sur celles qui produisent des données, puisque c'est aujourd'hui la première valeur produite dans l'économie marchande.

Le rôle de l'Europe, ce n'est pas d'être derrière, mais d'être devant ; ce n'est pas de subir, mais de proposer ; ce n'est pas de se soumettre aux États-Unis ou à qui que ce soit d'autre, mais au contraire de faire des propositions fortes et justes pour que notre économie soit plus équitable et plus efficace. Telle est notre ambition avec le projet de taxation des géants du numérique au niveau européen. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)