15ème législature

Question N° 283
de Mme Bérengère Poletti (Les Républicains - Ardennes )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > établissements de santé

Titre > Offre de soins dans les centres hospitaliers de Manchester et Bélair

Question publiée au JO le : 10/04/2018
Réponse publiée au JO le : 18/04/2018 page : 2991

Texte de la question

Mme Bérengère Poletti attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la difficulté d'offrir aux ardennais et aux territoires ruraux ou à faible densité urbaine, la même qualité de soins que partout en France. Le pays était fier, à juste titre, de la haute qualité de soins prodigués à ses citoyens ; l'espérance de vie était et est encore aujourd'hui à la hauteur de cette qualité. À l'hôpital Manchester de Charleville-Mézières, la communauté médicale et paramédicale s'est déjà pliée à plusieurs reprises aux contraintes d'un plan de retour à l'équilibre. Les efforts ont été faits. Or aujourd'hui les effets pervers de la taxation à l'activité se font sentir, et les plus petites structures hospitalières sont les plus touchées. En effet, cet établissement hospitalier est confronté à de multiples contraintes structurelles et la perspective d'un nouveau plan de suppression de lits, de compression de son personnel fait redouter une aggravation de sa conjoncture. Une démographie médicale à la peine, avec l'obligation de recourir à des médecins mercenaires qui impactent le budget des établissements hospitaliers ; une densité de population qui ne permet pas de contrebalancer le manque à gagner lié à la baisse des tarifs des actes médicaux ; enfin une situation sociale du département qui depuis des années présente des chiffres du chômage supérieurs aux moyennes nationales : le moindre nouvel effort demandé risque d'augmenter gravement le défaut d'attractivité de l'établissement. Il en va de même pour l'hôpital psychiatrique Bélair, où l'impact social n'a pas été pris en compte par l'ARS. L'égalité d'accès à des soins de qualité est aujourd'hui remise en cause et c'est pourquoi elle lui demande quelles mesures seront prises afin de redresser la situation financière des structures hospitalières de taille moyenne.

Texte de la réponse

CENTRES HOSPITALIERS DANS LES ARDENNES


M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour exposer sa question, n°  283, relative aux centres hospitaliers dans les Ardennes.

Mme Bérengère Poletti. Monsieur le président, j'aurais aimé que Mme la ministre de la santé réponde à cette question qui relève en effet pleinement de ses compétences. Même si j'ai beaucoup de respect pour vous, madame la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées, qui est chargée des anciens combattants, je ne trouve pas cela très adapté.

Madame la secrétaire d'État, il va devenir difficile – voire impossible – d'offrir aux Ardennais, comme aux habitants de tous les territoires ruraux ou à faible densité urbaine, la même qualité de soins que partout ailleurs en France. Notre pays était fier, à juste titre, de cette qualité de soins. L'espérance de vie était et est encore aujourd'hui à la hauteur. Mais cela durera-t-il ?

À l'hôpital Manchester de Charleville-Mézières, la communauté médicale et paramédicale s'est déjà pliée à plusieurs reprises aux contraintes d'un plan de retour à l'équilibre. Beaucoup d'efforts ont été faits, et la souffrance et l'incompréhension des soignants sont à leur paroxysme. De surcroît, les effets pervers de la tarification à l'activité se font sentir partout, notamment lorsque cette tarification intervient seule, et les plus petites structures hospitalières en France sont les plus touchées.

Cet établissement hospitalier est déjà confronté à de multiples contraintes structurelles, et la perspective d'un nouveau plan de suppressions de lits et de compression du personnel fait redouter une aggravation de sa situation. Il souffre d'une démographie médicale à la peine, avec l'obligation de recourir à des médecins mercenaires, ce qui affecte lourdement le budget des établissements hospitaliers. Par ailleurs la densité de population ne permet pas de contrebalancer le manque à gagner lié à la baisse des tarifs des actes médicaux. Enfin, la situation sociale du département est difficile : depuis des années, le taux de chômeurs et de bénéficiaires des minima sociaux y est supérieur aux moyennes nationales. Dans ce contexte, le moindre effort supplémentaire dégrade l'attractivité de l'établissement, et aggrave par là sa situation budgétaire.

Pour l'année 2018, un résultat déficitaire de 5,4 millions d'euros est prévu. Il en va de même pour l'hôpital psychiatrique Bélair, où l'impact social n'a pas été pris en compte par l'agence régionale de santé. C'est pourquoi je vous demande d'apporter toute votre attention à ces deux établissements de santé de Charleville-Mézières, au-delà des contingences politiciennes. J'associe à ma question mon collègue Pierre Cordier.

Madame la secrétaire d'État, l'État doit assurer l'égalité d'accès à des soins de qualité. Pour cela, il faut trouver un équilibre, accorder des compensations. Qu'entendez-vous faire, en termes budgétaires, pour ces deux établissements ardennais ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des armées.

Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des armées. Madame la députée, je vous prie d'excuser Mme la ministre chargée de la santé, Agnès Buzyn. Si cela peut vous rassurer, néanmoins, sachez que je connais un peu les questions relatives à la santé, puisque je suis moi-même médecin.

Le plan de performance dont vous parlez poursuit un objectif clair et simple : garantir une offre de santé pérenne, sûre et de qualité, répondant aux besoins de la population du nord des Ardennes. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de mieux répartir les activités des établissements de ce territoire, en développant des filières de soins territorialisées, dans le cadre d'un plan d'actions intégrant tous les champs de la santé.

En fonction des besoins, l'ARS de la région Grand Est s'engage à soutenir financièrement les plans d'investissements des établissements avec une enveloppe comprise entre 10 et 20 millions d'euros. Elle a déjà acté le financement de la reconstruction du service central de stérilisation du centre hospitalier de Manchester, à hauteur de presque 5 millions d'euros. Enfin, en janvier 2018, elle a soutenu la trésorerie du centre hospitalier de Sedan à hauteur de 3 millions d'euros.

Nous partageons le constat des établissements dont vous avez parlé : il est difficile de recruter des médecins hospitaliers sur ce territoire des Ardennes. Mais il faut reconnaître que c'est un peu le cas dans toute la France ! La faculté de médecine de Reims, les centres hospitaliers de Charleville et de Sedan et l'ARS Grand Est mettent en œuvre des actions concrètes pour faire face à cette pénurie, dans le cadre de la convention hospitalo-universitaire du groupement hospitalier de territoire. Il s'agit notamment de créer et de financer des postes d'assistants partagés entre le centre hospitalier universitaire de Reims et les équipes de pôle du territoire Nord Ardennes.

Des besoins non couverts ont d'ores et déjà été identifiés par l'ARS Grand Est : la politique vaccinale, l'accompagnement des troubles psychiques, le sanitaire – avec l'hospitalisation à domicile, les soins de suite et de rééducation, la plate-forme d'appui territoriale – et le médico-social.

Parmi les départements de la région Grand Est, le département des Ardennes présente le taux de suicide par habitant le plus élevé. Nous y sommes, bien sûr, très attentifs. À partir de ce constat, il est prévu de formaliser en 2018 un plan départemental de santé mentale, en s'appuyant sur l'expertise du centre hospitalier psychiatrique de Bélair et de l'important réseau associatif qui existe dans ce domaine, et en suivant une méthodologie de l'agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux, l'ANAP.

Comme vous pouvez le constater, la ministre des solidarités et de la santé ainsi que l'ARS sont particulièrement engagées pour votre territoire. Les difficultés liées à la tarification à l'activité, dont vous avez parlé, sont une réalité : il en sera tenu compte dans les semaines et les mois à venir.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti.

Mme Bérengère Poletti. Madame la secrétaire d'État, je n'ai absolument aucun doute sur vos compétences personnelles et je vous remercie de votre réponse, mais je souhaitais vraiment appeler l'attention de Mme la ministre de la santé sur la problématique des personnels de cet hôpital qui ont déjà fourni des efforts très importants et sont en très grande souffrance. Il est absolument essentiel que l’État apporte des enveloppes complémentaires de façon que ces personnels ne s'épuisent pas. Sinon on entre dans un cercle vicieux qui deviendrait épouvantable en termes d'offre de soins.