15ème législature

Question N° 28920
de M. José Evrard (Non inscrit - Pas-de-Calais )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie, finances et relance

Rubrique > industrie

Titre > Luxfer et la renationalisation de l'industrie française

Question publiée au JO le : 28/04/2020 page : 3059
Réponse publiée au JO le : 08/09/2020 page : 6010
Date de changement d'attribution: 07/07/2020

Texte de la question

M. José Evrard alerte M. le ministre de l'économie et des finances sur la situation de l'entreprise Luxfer fermée depuis le printemps 2019 et dont les salariés mobilisés demandent le secours de l'État. L'épidémie du covid-19 a illustré l'extrême dépendance de la France. Le manque de produits essentiels à la protection de la population s'est manifesté dès que fut constatée la présence de la pandémie. Il a fallu chercher à l'extérieur ce que le pays ne produit plus. Des voix se sont élevées contre cet état de fait. Le Président de la République a fait part lors de ses interventions de son souhait de faire en sorte d'y remédier. La volonté semble là, encore faut-il être en mesure de se demander pourquoi ces productions ont quitté le territoire national pour s'établir en Chine. Alors qu'il y a à peine une quarantaine d'années la France produisait tout, elle se trouve, aujourd'hui, dépendante de l'extérieur dans quantité de produits, à commencer par le secteur des biens d'équipements lui-même. Il faut se demander pourquoi. Il y aura bien un moment où le système du libre-échange et des coûts comparés devra être remisé au musée de nos erreurs économiques. Les conséquences seront redoutables pour l'Union européenne, qui y perdra son substrat idéologique. Il y aura bien un moment où l'euro, qui surévalue la monnaie, devra céder la place à une monnaie compatible avec le commerce extérieur français et la valeur de la monnaie. Là encore, les conséquences seront redoutables pour l'Union européenne, qui perdra le symbole de son intégration forcée. Il y aura bien un moment où la nuée de normes émanant des directives européennes concoctées, souvent dans la corruption, avec des lobbyistes établis devra laisser la place à une réglementation telle que les producteurs pourront offrir, dans une plus grande liberté, leurs talents à leurs clients. Là encore, les conséquences seront redoutables pour l'Union européenne, dont les dispositions favorisent les multinationales qui saccagent les nations. Si le poids de l'industrie française se situe aux alentours de 10 % du produit national brut, elle le doit à l'Union européenne. Cependant, si l'Union européenne se détruisait, le renouveau de l'industrie française ne pourrait se faire comme par enchantement. Il faudra une volonté. Le Gouvernement se devra de fixer un cadre qui permette à toutes les entreprises de gagner des parts de marchés sur le territoire, en protégeant les entreprises, et à l'export, en multipliant les accords commerciaux avec des États-partenaires fiables. Les politiques publiques devront en être inspirées, le système bancaire orienté dans ce but, les grandes entreprises et les donneurs d'ordre soucieux de privilégier le tissu industriel national. Il faudra alléger le fardeau d'impôts et taxes qui repose sur la production de richesses matérielles. Dans un premier temps, et dès maintenant, il ne peut être admis de liquidation d'entreprises industrielles rachetées ponctuellement par des opérateurs étrangers dans le seul but de détruire un concurrent. Il ne peut être admis non plus la fermeture d'un centre de production pour son emménagement dans un autre pays. Il lui demande s'il n'est pas souhaitable, à travers une décision gouvernementale forte de soutien aux salariés de Luxfer visant au redémarrage de l'entreprise, de montrer la détermination des pouvoirs publics de ne plus abandonner l'industrie française.

Texte de la réponse

Le groupe britannique Luxfer a annoncé fin 2018 sa décision de fermer le site français et de délocaliser la production à Nottingham (Royaume-Uni) pour des raisons de compétitivité dans un marché surcapacitaire. Cela s'est traduit par l'arrêt de l'activité en juin 2019. A la suite de la fermeture du site de Gerzat, les principaux donneurs d'ordre du secteur, en particulier AirLiquide et Linde, se sont organisés pour maintenir un approvisionnement normal en bouteilles pour oxygène à usage médical auprès d'autres fournisseurs via un double sourcing. La crise sanitaire Covid-19 que traverse le pays ne devrait donc pas entraîner de pénurie de telles bouteilles à oxygène qui, pour rappel, servent à la mobilité des patients et constituent des solutions d'appoint dans les hôpitaux. Compte tenu des délais incompressibles de remise en route de l'activité (minimum 8 à 9 semaines) et de la nécessité d'homologation des nouveaux produits, aucun projet de reprise ne permettra de produire des bouteilles d'oxygène pour la crise actuelle. Néanmoins, les grands donneurs d'ordre dont AirLiquide manifestent leur intérêt pour disposer à l'avenir d'une production européenne de telles bouteilles dès lors que cette solution est compétitive. Le Gouvernement étudie avec intérêt l'opportunité d'une production nationale de bouteilles d'oxygène et se propose de faciliter tout projet de reprise du site s'il apparaît viable et compétitif. C'est en ce sens que les services du ministère de l'économie et des finances étudient le dossier d'une potentielle reprise du site de Gerzat avec une attention toute particulière.