15ème législature

Question N° 31663
de M. Sébastien Nadot (Écologie Démocratie Solidarité - Haute-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Europe et affaires étrangères
Ministère attributaire > Europe et affaires étrangères

Rubrique > organisations internationales

Titre > Demande d'enquête internationale de la France sur le massacre de Ngarbuh

Question publiée au JO le : 04/08/2020 page : 5229
Réponse publiée au JO le : 29/09/2020 page : 6702

Texte de la question

M. Sébastien Nadot alerte M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'absence d'enquête internationale au sujet du massacre de Ngarbuh au Cameroun. Le 14 février 2020, un massacre a été commis à Ngarbuh, dans la région du Nord-Ouest, au Cameroun. Le bilan annoncé est de 23 civils morts calcinés, dont des femmes enceintes et des enfants. Divers témoignages et sources accusent l'armée camerounaise. Lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies du 12 juin 2020 sur la situation en Afrique centrale et les activités du bureau régional des Nations unies pour l'Afrique centrale, François Louncény Fall, présentant le 18ème rapport du secrétaire général de l'ONU, a évoqué le massacre et formulé le souhait de la communauté internationale qu'une enquête indépendante soit menée. Ce massacre s'inscrit dans une montée de violence très préoccupante dans cette région du Cameroun qui n'est pas sans rappeler les prémices d'un génocide. Lors de cette réunion du Conseil de sécurité, présidée par la France, de nombreux membres du conseil ont formulé la demande d'une enquête des Nations unies, seule à même d'être indépendante. La France a été une fois de plus étrangement silencieuse sur le sujet lors de cette réunion, comme si elle ne voulait pas gêner le gouvernement camerounais sous l'autorité de son président Paul Biya. Une enquête judiciaire diligentée par les autorités camerounaises sur le massacre de N'Garbuh a été menée, dont les conclusions ont été rendues publiques le 21 avril 2020 à travers un communiqué de la présidence de la République du Cameroun, accablant 3 militaires de l'armée régulière du Cameroun. Les éventuelles responsabilités politiques de ce massacre ont cependant été totalement esquivées et la prévention d'un éventuel génocide complètement laissée de côté. Lors de l'audition du ministre des affaires étrangères à l'Assemblée nationale (séance du 1er juillet 2020), celui-ci s'est dit satisfait, assimilant au passage enquête judiciaire camerounaise et commission d'enquête internationale et déclarant : « une commission d'enquête a été installée par les autorités camerounaises, suite à des violences particulièrement odieuses perpétrées en février à l'encontre de la population du village de Ngarbuh dans la province du Nord-Ouest. Les conclusions de cette commission ont permis de dégager des responsabilités et d'ouvrir des procédures judiciaires ». La France est candidate pour être membre du conseil des droits de l'homme pour la période 2021 à 2023. À ce titre, si la France avait réclamé une enquête des Nations unies sur les massacres des civils à Ngarbuh, n'aurait-elle pas permis de mettre un temps d'arrêt au phénomène des violences montantes dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun ? Il lui demande pourquoi la France, qui se dit amie du Cameroun, n'a pas demandé cette enquête auprès des Nations unies, en particulier lorsqu'elle avait la présidence du conseil de sécurité en juin 2020.

Texte de la réponse

La France est préoccupée par la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun, qui continue à se dégrader. Elle condamne fermement les violences et les atteintes aux droits de l'Homme commises dans ces régions. À la suite des exactions perpétrées, selon des témoignages, par des membres des forces armées camerounaises appuyés par des miliciens, à l'encontre de la population civile de Ngarbuh, le 14 février 2020, la France a appelé les autorités camerounaises à mettre en place une commission d'enquête présentant des garanties d'indépendance et d'impartialité, afin que toute la lumière soit faite sur les circonstances dans lesquelles ces violences ont été commises et d'en poursuivre les responsables. L'enquête menée par les autorités a rendu des conclusions qui ont conduit à l'ouverture de procédures judiciaires qui se poursuivent, et auxquelles nous restons attentifs. La résolution de la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun ne se fera que si la lutte contre l'impunité est menée. La France reste convaincue que l'issue de la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun ne peut être que politique et qu'elle suppose notamment un dialogue inclusif, y compris avec l'opposition, et l'approfondissement de la décentralisation. Attachée à la stabilité et à l'unité du Cameroun, la France se tient prête, avec d'autres partenaires internationaux, à soutenir tout processus de dialogue mis en place à cet effet.