GESTION DE LA CRISE SANITAIRE
M. le président. La parole est à M. Loïc Prud'homme.
M. Loïc Prud'homme. Monsieur le ministre de la santé, hier le docteur Maurice Raphaël, chef depuis plus de dix ans du service des urgences du CHU du Kremlin-Bicêtre, qui reçoit 60 000 patients par an, a démissionné, après avoir donné l'alerte durant des années en dénonçant le manque de moyens et de personnel à l'hôpital. En même temps, votre gouvernement publie un décret fourbe qui permet de supprimer des postes plus facilement, sans avoir besoin de reclasser les personnels hospitaliers. Mais chaque poste supprimé à l'hôpital, ce sont des vies de plus mises en danger.
Les services hospitaliers sont donc déjà complètement surchargés, mais les laboratoires le sont aussi : les files de malades s'allongent sur les trottoirs de toutes les grandes villes et les délais sont si longs qu'on n'obtient les résultats des tests qu'une fois qu'on est sorti d'isolement. Votre stratégie de tests est donc un affichage médiatique sans aucune efficacité sanitaire.
De même, vous allégez le protocole dans les écoles. Depuis aujourd'hui les enfants et les jeunes jusqu'au lycée ne sont plus considérés comme des cas contacts. Les enseignants non plus. Dans quel but ? Ne pas fermer les établissements scolaires pour que les parents continuent de travailler, quel que soit le coût pour notre santé à tous ! Le virus circule toujours plus vite, aidé par votre gestion inconséquente de la situation sanitaire !
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI.)Je ne reviens pas sur votre gestion de la situation économique désastreuse : mon collègue Adrien Quatennens vient de pointer, là aussi, l'inefficacité de votre politique.
Vos choix dogmatiques, aveugles et impuissants à gérer une situation sanitaire hors norme, sont donc doublement fautifs. Ils démontrent que, factuellement, vous faites le choix de l'immunité collective, sans l'assumer. Mes questions seront donc très claires, monsieur le ministre. Faites-vous le pari de l'immunité collective, oui ou non ? Que ferez-vous quand les services de réanimation seront de nouveau saturés, dans les prochains jours ? Combien de personnes avez-vous décidé de laisser mourir dans votre scénario de gestion de la crise sanitaire ?
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe FI. – Exclamations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)M. Sylvain Maillard. Ces propos sont scandaleux !
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, je ne sais pas si je vais consacrer mes deux minutes à répondre aux erreurs factuelles ou à l'outrance dont vous faites preuve dans votre question.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) J'ai l'embarras du choix.
Je commencerai par le décret de mon ministère, que vous avez évoqué, du 3 septembre 2020, qui tire les conséquences de la loi de transformation de la fonction publique de 2019 : il est désormais impossible de licencier un salarié de la fonction publique hospitalière lorsque son poste est supprimé. C'est exactement l'inverse de ce que vous avez prétendu.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)Lorsqu'un tel poste est supprimé, le fonctionnaire, qui bénéficie d'un dispositif d'accompagnement, ne peut faire l'objet d'un licenciement sec, comme c'était le cas jusqu'à présent. Félicitez-nous pour cette mesure de protection de la fonction publique hospitalière.
J'en viens aux outrances. Évidemment, vous cherchez à provoquer : c'est votre droit, mais vous ne pensez pas ce que vous dites lorsque vous suggérez que nous ferions le décompte morbide des personnes que nous serions sur le point de laisser mourir, faute de mesures de gestion. Monsieur le député, je ne pense pas une seconde que vous imaginiez cela crédible.
M. Maxime Minot. Répondez plutôt à la question !
M. Olivier Véran, ministre. Je vous le souhaite, non pas pour moi mais pour vous, parce qu'il est très grave d'imaginer de telles choses.
En réalité, nous avons déjà débattu, et nous allons recommencer dans quelques jours, des moyens conférés au Gouvernement pour, dans la période transitoire de sortie de l'état d'urgence sanitaire, prendre toutes les mesures de gestion utiles pour sauver des vies et protéger les populations. Je ne doute pas une seconde que, cette fois-ci, vous ferez partie des députés qui ne freineront pas notre capacité à nous armer pour lutter contre le virus et que vous rejoindrez les rangs nombreux de la majorité qui nous a permis, à plusieurs occasions, de disposer de mesures législatives exceptionnelles visant à protéger les Français. Je suis certain que vous avez, en la matière au moins, de la suite dans les idées.
Sachez en tout cas qu'il n'est pas du tout question de laisser mourir qui que ce soit, qu'il n'est pas du tout question de tendre vers une immunité collective : cela ne marche pas. Les pays qui s'y sont essayés ont échoué. Nous voulons protéger de ce virus chaque vie, chaque personne vulnérable, chaque Français.
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)