15ème législature

Question N° 337
de M. Christian Hutin (Nouvelle Gauche - Nord )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Travail
Ministère attributaire > Travail

Rubrique > travail

Titre > réforme du code du travail

Question publiée au JO le : 29/11/2017
Réponse publiée au JO le : 29/11/2017 page : 5631

Texte de la question

Texte de la réponse

RÉFORME DU CODE DU TRAVAIL


M. le président. La parole est à M. Christian Hutin, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Christian Hutin. Dans quelques minutes, la majorité de cette assemblée votera la loi ratifiant les ordonnances réformant le code du travail, qui s'appliquent bien évidemment depuis quelques semaines. Nous bénéficions d'ores et déjà d'un certain nombre de retours. Je souhaite donc vous exposer deux ou trois cas concrets que m'ont exposés des gens que j'ai rencontrés ou qui m'ont écrit.

Léa, six ans d'ancienneté dans une entreprise qui compte huit salariés, est allée voir son avocat, lequel lui a dit très clairement que son licenciement était abusif mais que, compte tenu des indemnités qu'elle pouvait espérer toucher, elle ne pourrait pas ester en justice car cela lui coûterait beaucoup trop cher.

M. Erwan Balanant. Cela n'a rien à voir avec les ordonnances !

M. Christian Hutin. C'est tout de même un sacré problème ! Il n'y a plus de justiciables, et vous créez une impunité !

Maxime travaille quant à lui chez Tupperware, entreprise qui gagne de l'argent, mais grâce à vos ordonnances, la dernière usine française de ce groupe pourra fermer,…

M. Pierre Cordier et M. Régis Juanico . Eh oui !

M. Christian Hutin. …Maxime perdra son emploi et la France perdra une usine.

Il y a des choses qui ne sont pas légitimes.

M. Erwan Balanant. Cela n'a rien à voir !

M. Christian Hutin. Dernier exemple, celui d'une dame que j'ai reçue la semaine dernière. Elle travaille en CDD et s'est rendue à sa banque. Depuis quelques années, elle cherche à acheter un petit pavillon parce qu'elle a trois enfants, un chien, un mari, que tout se passe bien et que c'est son rêve. (Exclamations sur les bancs du groupe REM.) C'est comme ça, la vie ! Or, la banque lui répond très clairement que tant qu'elle n'aura pas un CDI, il ne sera pas possible de faire un prêt, ce qui est tout de même assez ennuyeux : cinq ans de CDD, ce sont cinq ans pendant lesquels elle ne pourra pas acquérir un bien pour sa famille.

Le film Le Président, que Gérald Darmanin a évoqué dernièrement, sera le film du quinquennat parce que le Président de la République aime beaucoup Audiard – moi aussi d'ailleurs. Dans un hémicycle comme celui-ci, Audiard fait dire à Gabin : « Je savais qu'il y avait des majorités pour soutenir un Gouvernement. Je ne savais pas qu'il y avait des majorités pour soutenir un gigantesque conseil d'administration. » (Applaudissements sur les bancs des groupes NG, GDR et sur plusieurs bancs du groupe FI.)

M. Dimitri Houbron. Arrête ton cinéma !

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. Monsieur le député, je ne m'attendais pas à une telle caricature, mais je vais tout de même répondre sur le fond. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.)

Bien sûr que nous voulons lutter contre la précarité ! Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais je pourrais vous répondre point par point, à commencer sur ce que vous dites concernant le CDD.

Après la séance de questions au Gouvernement, mesdames, messieurs les députés, vous serez appelés à voter le projet de loi ratifiant les ordonnances pour le renforcement du dialogue social.

M. André Chassaigne. Hélas !

Mme Muriel Pénicaud, ministre . Je souhaite profiter de cette occasion pour vous dire ce que je constate sur le terrain. J'ai visité plus de 3 000 entreprises, rencontré de nombreux représentants des partenaires sociaux, plus de 5 000 directeurs des ressources humaines ces dernières semaines : tous constatent les quatre points suivants.

Le premier, c'est que pour la première fois, une réforme du code du travail est centrée sur ce qui est possible et souhaitable : comment libérer les énergies des petites et moyennes entreprises, qui représentent 55 % des emplois en France (Applaudissements sur les bancs du groupe REM) et les plus grandes perspectives de développement de l'emploi ?

Le deuxième, c'est un pari total en faveur du dialogue social – aucune nouvelle mesure unilatérale en faveur des employeurs : tout reposera sur le dialogue social dans l'entreprise et dans la branche parce que nous croyons à l'intelligence collective sur le terrain, au plus près des enjeux économiques et sociaux. C'est là que l'on peut trouver la meilleure articulation entre compétitivité et progrès social.

Le troisième point, c'est la sécurisation juridique pour l'ensemble des acteurs. Avoir de la visibilité, cela aide non seulement les entreprises, mais aussi les salariés. Des droits nouveaux sont créés en matière de sécurisation – je pense notamment à cette très grande avancée qu'est le télétravail.

M. Pierre Cordier. On verra le résultat ! On fera le bilan dans six mois !

Mme Muriel Pénicaud, ministre . Le quatrième point, c'est le renforcement des carrières et des parcours des représentants des partenaires sociaux, qui permettra ce dialogue social de qualité.

Alors, si vous croyez au dialogue social, si vous croyez à l'énergie des entreprises pour créer de l'emploi, je vous invite à voter cette loi de ratification ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)