15ème législature

Question N° 36666
de Mme Marie-Noëlle Battistel (Socialistes et apparentés - Isère )
Question écrite
Ministère interrogé > Armées
Ministère attributaire > Armées

Rubrique > politique extérieure

Titre > Transparence sur les ventes d'armes par la France

Question publiée au JO le : 23/02/2021 page : 1572
Réponse publiée au JO le : 07/09/2021 page : 6652

Texte de la question

Mme Marie-Noëlle Battistel attire l'attention de Mme la ministre des armées sur la nécessaire transparence en matière de commerce des armes de la France. Il s'agit d'un sujet majeur et d'un objectif essentiel du traité sur le commerce des armes (TCA) ratifié par la France en 2014. Il apparaît indispensable que le respect des termes dudit traité soit correctement contrôlé. C'était d'ailleurs l'un des objectifs du Président de la République en 2017 alors candidat à l'élection présidentielle. Le ministère des armées a publié un rapport annuel au Parlement sur les exportations d'armement. Il est bienvenu mais les informations qu'il contient demeurent insuffisantes quant au processus d'autorisation des ventes d'armes. Cela est d'autant plus essentiel que le groupe d'experts éminents du Conseil des droits de l'homme sur le Yémen a fustigé, en septembre 2020, la poursuite des livraisons d'armes de la France, vers l'Arabie Saoudite et les Émirats Arabes Unis, en dépit de leur engagement dans le conflit au Yémen. Aussi, elle lui demande comment le Gouvernement entend améliorer l'information contenue dans le rapport annuel remis au Parlement sur les exportations d'armement afin de créer les conditions d'un débat public.

Texte de la réponse

La politique menée par la France en matière d'exportations d'armement repose sur le principe de prohibition, énoncé à l'article L. 2335-2 du code de la défense, en vertu duquel toute demande d'exportation de matériel de guerre et matériel assimilé est soumise à autorisation ou licence signée par le Premier ministre après avis de la commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre (CIEEMG). En effet, la délivrance de ces autorisations repose sur un ensemble de considérations liées, au premier chef, au respect de nos engagements internationaux, ainsi qu'aux enjeux de stabilité et de sécurité régionales ou internationales, à la lutte contre la prolifération, à la protection de nos forces et de celles de nos alliés. Elle prend par ailleurs en compte les enjeux économiques, industriels et de renforcement de notre base industrielle et technologique de défense, qui sont l'une des conditions de notre autonomie stratégique et de notre souveraineté. Le respect de la position commune de l'Union européenne 2008/944/PESC du Conseil du 8 décembre 2008 modifiée, définissant des règles communes régissant le contrôle des exportations de technologies et d'équipements militaires, et du traité sur le commerce des armes (TCA) est systématiquement observé dans la mise en œuvre de la réglementation relative aux exportations d'armement. À ce titre, le TCA rappelle dans son préambule, le principe du « respect de l'intérêt légitime reconnu à tout État d'acquérir des armes classiques pour exercer son droit de légitime défense et contribuer à des opérations de maintien de la paix, et de produire, exporter, importer et transférer des armes classiques ». À l'issue d'une évaluation in concreto qui permet d'apprécier s'il existe un risque manifeste ou prépondérant que les matériels de guerre soient utilisés pour commettre, notamment, des violations graves des droits de l'Homme ou du droit international humanitaire, seules sont accordées les demandes relatives à la satisfaction des besoins légitimes des pays concernés et ne contrevenant pas aux engagements internationaux de la France ni aux embargos décidés par les organisations internationales. Cette appréciation, qui est propre à chaque État, peut différer en fonction de sa connaissance de la situation comme des liens qu'il entretient avec l'État client (exemple : accord de défense entre l'État exportateur et l'État client constituant un engagement international). En ce qui concerne la guerre au Yémen, les autorités de contrôle tiennent ainsi compte, dans leur évaluation, de l'ensemble des informations relatives à la situation régionale, notamment les informations issues des contacts sur le terrain des services de renseignement, les rapports du Groupe d'experts sur le Yémen établi par le Conseil de sécurité des Nations unies et du Groupe d'experts éminents sur le Yémen mis en place par le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies, ainsi que toute information utile issue des échanges avec nos partenaires européens. S'agissant des exigences de transparence liées à ses exportations de technologies et d'équipements militaires, la France transmet chaque année un rapport au Parlement qui complète les comptes rendus établis pour les Nations unies ou dans le cadre européen. Ce rapport annuel sur les exportations d'armement, qui est transmis aux membres du Parlement depuis le début des années 2000, présente, dans les faits, la politique de contrôle des exportations mise en œuvre par le Gouvernement et ce pour chaque pays destinataire et pour chaque catégorie de matériel considéré. Ce rapport détaille en particulier les autorisations délivrées, les prises de commande mais aussi les principaux contrats, ainsi que les livraisons effectuées. La France cherche constamment à en améliorer la mise en œuvre. Ainsi, pour la première fois en 2020, la France a intégré en annexe de son rapport annuel les données transmises chaque année aux Nations unies dans le cadre du TCA. Cette nouveauté facilite l'exploitation de données auparavant disponibles dans différents supports et démontre la volonté de transparence de la France vis-à-vis de la représentation nationale et de la société civile. Les informations transmises annuellement par la France au secrétariat du TCA sont les mêmes que celles communiquées dans le cadre du Registre des Nations unies sur les armes classiques, comme le permet le traité lui-même (article 13.3). De plus, sur certains points, le modèle du Registre des Nations unies est plus complet que le modèle TCA (possibilité de fournir des informations sur l'État d'origine des armes transférées, le lieu intermédiaire, la description de la pièce, …). Cet exercice de transparence de l'action gouvernementale vis-à-vis de la représentation nationale permet donc au contrôle parlementaire de s'exercer a posteriori, notamment dans le cadre du débat en commission de la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale lors de la présentation de ce rapport par la ministre des armées, ou encore des auditions des représentants de l'autorité administrative et des questions écrites au Gouvernement sur sa politique de contrôle des exportations de matériels de guerre.