15ème législature

Question N° 42857
de M. Fabien Di Filippo (Les Républicains - Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > professions et activités sociales

Titre > Situation des assistants familiaux.

Question publiée au JO le : 30/11/2021 page : 8553
Date de changement d'attribution: 21/05/2022
Question retirée le: 21/06/2022 (fin de mandat)

Texte de la question

M. Fabien Di Filippo appelle l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la situation des assistants familiaux. Le code de l'action sociale et des familles définit l'assistant familial comme « la personne qui accueille habituellement et de façon permanente des mineurs et des majeurs de moins de vingt-et-un ans à son domicile moyennant une rémunération. Il exerce sa profession comme salarié de personnes morales de droit public [conseil départemental] ou de personnes morales de droit privé [associations notamment] après avoir été agréé à cet effet. L'assistant familial constitue, avec l'ensemble des personnes résidant à son domicile, une famille d'accueil ». Le rôle des assistants familiaux dans la protection de l'enfance est absolument essentiel. Leur nombre ne cesse pourtant de baisser : on compte actuellement environ 40 000 assistants familiaux pour accueillir quelque 76 000 enfants placés, soit la moitié des jeunes confiés à l'ASE pour un placement, et 40 % des assistants familiaux en poste atteindront l'âge de la retraite d'ici cinq ans. Entre ces départs à la retraite, les licenciements et les démissions, tous les départements sont déficitaires en candidats alors que les besoins sont croissants. Ce maillon essentiel de la protection de l'enfance est donc fortement menacé. Les enfants en difficulté sont les premières victimes de cette pénurie : les accueils en foyer temporaires se pérennisent au mépris de l'orientation la plus appropriée pour chaque enfant tandis que des fratries sont amenées à être séparées. Il arrive aussi que les juges des enfants demandent des placements en urgence en famille d'accueil et ne les obtiennent pas. Les enfants placés vont de rupture en rupture en changeant sans cesse de mode d'accueil, voire sont parfois laissés dans des familles maltraitantes. Ils arrivent ensuite chez les assistants familiaux avec des traumatismes encore plus lourds, des troubles du comportement, des troubles de la personnalité, mais aussi des handicaps divers et variés, ce qui peut mettre en péril l'équilibre familial et conjugal des accueillants. Il y a donc urgence à recruter, afin d'assurer au mieux la protection des enfants, mais aussi de faciliter autant que possible l'accueil de ces enfants par les assistants familiaux. Il est également important de souligner que l'accueil familial est la solution la moins onéreuse pour les collectivités. Or le secteur des assistants familiaux fait en effet face à un nombre important de départs et à une véritable crise des vocations. Lorsqu'ils exercent dans le secteur public, ces professionnels pointent du doigt leur précarité, puisque leur salaire est conditionné à l'accueil des enfants mais que ceux-ci peuvent leur être retirés du jour au lendemain. En cas d'accusations de maltraitance infondées à leur égard, par exemple, le retrait de l'enfant est immédiat et leur agrément peut être suspendu durant plusieurs mois avant que l'affaire ne soit jugée, sans qu'ils bénéficient de la présomption d'innocence. Ils dénoncent aussi un profond manque de reconnaissance de leur travail et souhaitent une revalorisation de leur métier, avec notamment l'instauration d'une rémunération minimale fixée par le code du travail et la revalorisation des indemnités d'entretien légales et des frais qui leur sont versés. Actuellement, les rémunérations, déjà peu élevées, sont très hétéroclites, avec d'importantes disparités de traitement des assistants familiaux d'un département à l'autre. Certains départements accordent ainsi une prime annuelle d'ancienneté ou une prime de fin d'année, alors que d'autres ne le font pas. Les assistants familiaux demandent donc la création d'un véritable statut, adapté à la réalité de leur mission et de leur engagement permanent auprès de cette jeunesse en difficulté, qui permette de sécuriser leur parcours professionnel, de les stabiliser financièrement et d'assurer une uniformisation du traitement de tous les assistants familiaux relevant du droit public sur le territoire. À ce titre, de nombreuses recommandations contenues dans le rapport du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale édité en 2006 sur les assistants maternels et les assistants familiaux sont toujours d'actualité. La nécessité de placer ces agents dans un cadre d'emplois de la fonction publique territoriale avait été approuvée par la majorité des membres du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Malheureusement, cela n'a jamais été appliqué. Ce cadre, posé par le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, existe pour permettre l'évolution du statut de ces travailleurs sociaux de la protection de l'enfance que sont les assistants familiaux. Cette avancée pourrait également permettre une évolution de carrière, qui est aujourd'hui inenvisageable. De nombreux assistants familiaux évoquent aussi la grande solitude de leur métier, les dysfonctionnements institutionnels auxquels ils sont parfois confrontés ou encore les difficultés rencontrées au quotidien dans la prise en charge d'enfants particulièrement difficiles. Certaines situations requièrent en effet un accompagnement renforcé, dont ils ne bénéficient pas toujours : enfants atteints de handicap, de troubles psychiatriques. Le manque de places dans des structures spécialisées ou de suivis pédopsychiatriques en raison de la pénurie de médecins dans ce domaine conduit les assistants familiaux à s'occuper seuls d'enfants dont la prise en charge devrait en partie être assurée par des spécialistes. Ces assistants familiaux se retrouvent extrêmement démunis, faute de formation adéquate et de soutien, porteurs d'une charge mentale extrêmement lourde, et atteignent parfois d'importants niveaux d'épuisement et de découragement. Lorsqu'ils font part de leur incapacité à prendre en charge correctement certains jeunes qui leur sont confiés, voire de leur souhait de rompre le contrat d'accueil, certains déclarent ne pas obtenir de réponse, ou seulement des réponses inadaptées. Cela est extrêmement préjudiciable, à la fois pour la famille d'accueil et pour l'enfant placé, qui se retrouvent nécessairement en souffrance et dans des situations très complexes. L'assistant familial ne devrait pourtant jamais exercer seul sa mission envers les enfants confiés. Le code de l'action sociale et des familles dispose que chaque département se doit d'assurer « par une équipe de professionnels qualifiés dans les domaines social, éducatif, psychologique et médical l'accompagnement professionnel des assistants familiaux qu'il emploie et l'évaluation des situations d'accueil ». Or un certain nombre d'assistants familiaux déclarent être régulièrement contraints de rappeler aux départements leurs obligations légales à leur égard et vivre de véritables situations de détresse. Ils attendent donc que l'État légifère en leur faveur et contraigne leurs employeurs à exercer leurs missions avec plus de rigueur. De nombreux assistants familiaux déplorent également un manque récurrent d'informations sur le parcours et la personnalité des enfants qui leur sont confiés, ou encore des contrats d'accueil et des projets pour l'enfant qui ne sont parfois pas mis en place de façon efficiente, ce qui rend là aussi la prise en charge plus difficile. Il est essentiel de veiller à ce que soient apportés aux familles d'accueil les éléments nécessaires pour être en mesure de comprendre et d'accompagner au mieux l'enfant. Les assistants familiaux demandent donc à la fois une meilleure formation, un meilleur accompagnement dans les situations parfois difficiles qu'ils traversent et une intégration à part entière au sein des équipes de suivi socio-éducatives. L'épuisement des assistants familiaux s'explique aussi par le fait qu'élever des enfants représente un travail à temps plein, sept jours sur sept, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. En raison de la pénurie d'assistants familiaux, certains professionnels se retrouvent avec plus de trois enfants - effectif réglementaire maximum, sauf dérogations - ou ont du mal à poser leurs vacances, faute de « familles relais » disponibles. Ils demandent aujourd'hui des dispositions plus favorables telles que la rémunération majorée pour les jours fériés travaillés ou une compensation avec des jours de congés supplémentaires. La situation des assistants familiaux appelle donc des mesures fortes et urgentes, qui ne sont pas à ce stade contenues dans le projet de loi sur la protection de l'enfance. Face à la crise qui se prépare, il lui demande quelles mesures il compte prendre pour aider les assistants familiaux en place à continuer d'exercer leur métier dans des conditions acceptables, mais aussi pour renforcer l'attractivité de ce métier et susciter des vocations, afin que les missions accomplies par ces professionnels, essentielles pour tant de jeunes et pour l'ensemble de la société, puissent continuer à être menées à bien.

Texte de la réponse