15ème législature

Question N° 43529
de M. Michel Larive (La France insoumise - Ariège )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition écologique
Ministère attributaire > Transition écologique

Rubrique > biodiversité

Titre > Réintroduction des castors en Ariège

Question publiée au JO le : 18/01/2022 page : 302
Réponse publiée au JO le : 10/05/2022 page : 3159

Texte de la question

M. Michel Larive attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur la réintroduction des castors en Ariège. Diverses associations de défense de la biodiversité militent pour la réintroduction de l'animal dans le département. Des conférences de sensibilisation ont déjà cours au sein d'évènements tels que « Ariège en bio ». Les castors y sont présentés comme un maillon fort de la biodiversité de par leurs actions sur l'environnement, notamment les cours d'eau pollués, en favorisant les zones humides et limitant l'effet des crues. Le Comité écologique ariégeois et les associations ont déjà identifié quatre cours d'eau susceptibles d'accueillir des familles de castors. Cependant, ce projet de réintroduction inquiète les propriétaires forestiers privés. Ils anticipent des conséquences néfastes comme des pertes financières dues à la consommation et aux constructions des castors, ainsi que des problèmes de sécurité dû à la présence de l'animal et notamment la chute des arbres fragilisés. Ces propriétaires estiment donc qu'ils ne sauraient être tenus responsable des dommages causés par la réintroduction et que leur présence peut engager des compensations financières. Il lui demande si le ministère étudie ce projet de réintroduction des castors et si, le cas échéant, des dispositions ont été établies pour compenser les éventuels dommages que cela pourrait entraîner.

Texte de la réponse

Le Castor d'Europe (Castor fiber) est une espèce animale protégée au titre du droit européen et national. A l'échelle européenne, le Castor figure à l'annexe III de la Convention de Berne, et aux annexes II et IV de la Directive « Habitats, Faune et Flore ». À l'échelle nationale, le Castor est une espèce protégée au titre de l'article L. 411-1 du code de l'environnement et de l'arrêté ministériel du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. À ce titre, sont interdites la destruction, l'altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Historiquement présent sur l'ensemble du territoire métropolitain, le castor d'Europe avait quasiment disparu de France au début du 20e siècle. Une petite population résiduelle subsistait au sud du bassin du Rhône. Protégés, ces quelques dizaines d'individus se sont multipliés et ont recolonisé progressivement le Rhône et ses affluents. Des opérations de réintroductions ont ensuite été réalisées sur d'autres bassins versants, à partir de cette population rhodanienne. Ces réintroductions ainsi que la protection de l'espèce ont permis une reconquête d'une grande partie du territoire national et de nouveaux bassins versants ont ainsi été recolonisés par le castor. Aujourd'hui, le castor est présent sur plus de 15 000 km de cours d'eau en France et son aire de répartition continue de s'accroître. Il s'agit donc d'un succès en termes de sauvegarde d'une espèce autrefois au seuil de l'extinction en France. Son état de conservation est jugé comme favorable et d'une manière générale, l'accompagnement de la recolonisation naturelle du castor est maintenant privilégiée. À ce stade, aucun projet de réintroduction de castor en Ariège n'a été déposé auprès des services du ministère de la Transition écologique. Si une telle éventualité se concrétisait, alors, le projet devra comprendre une étude de faisabilité qui sera étudiée lors de l'instruction du dossier. Il sera ainsi nécessaire de disposer d'un état des lieux détaillé du bassin versant envisagé pour cette opération et la distance aux populations existantes de castor les plus proches. La capacité d'accueil à héberger une population viable de castor devra être évaluée comme la continuité écologique, la qualité des forêts riveraines et le régime hydrologique des cours d'eau concernés. Les enjeux socio-économiques du territoire et l'acceptation locale de ce projet de réintroduction devront également être analysés précisément. C'est sur la base d'une telle étude de faisabilité que l'opportunité du projet pourra être analysée par les services du ministère, avec l'appui de l'Office français de la biodiversité (OFB) qui forme et coordonne depuis 1987 un réseau de spécialistes de l'espèce, le réseau Castor. Ce réseau intervient également pour prévenir ou limiter les dégâts occasionnés par les castors. À l'occasion d'un constat de dégâts, des conseils de protection sont apportés par le correspondant local du réseau Castor. Ainsi, en règle générale, la pose de protection individuelle entourant chaque arbre est privilégiée ; dans le cas des vergers où les densités de tiges sont importantes et les hauteurs de tige parfois basses, une protection globale de la parcelle peut être envisagée ; enfin, la création de zones tampons végétalisées entre les points d'eau et la parcelle, sans vocation économique, pour permettre une concentration de l'alimentation du castor dans cette zone non conflictuelle, peut limiter de manière significative les dégâts agricoles. Enfin, qu'il soit réintroduit ou non, il convient de signaler qu'il n'est pas envisagé la mise en place d'un régime d'indemnisation des dommages dus au castor. En effet, le volume et la nature de ces dégâts ne peuvent déclencher la mise en place d'un régime extraordinaire d'indemnisation. Le Conseil d'État a précisé, dans une décision du 30 juillet 2003, que « le préjudice résultant de la prolifération des animaux sauvages appartenant à des espèces [protégées par la loi] doit faire l'objet d'une indemnisation par l'État lorsque, excédant les aléas inhérents à l'activité en cause, il revêt un caractère grave et spécial et ne saurait, dès lors, être regardé comme une charge incombant normalement aux intéressés ». Il faudrait en effet démontrer que malgré la mise en place de protection des arbres, des dommages importants subsistent.