15ème législature

Question N° 619
de Mme Marie-Noëlle Battistel (Nouvelle Gauche - Isère )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > énergie et carburants

Titre > mode d'exploitation des barrages hydroélectriques

Question publiée au JO le : 21/02/2018
Réponse publiée au JO le : 21/02/2018 page : 1323

Texte de la question

Texte de la réponse

MODE D'EXPLOITATION DES BARRAGES HYDROÉLECTRIQUES


M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour le groupe Nouvelle Gauche.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

Vecteur historique de l'industrialisation des vallées de montagne, mais surtout outil essentiel de la transition énergétique, l'hydroélectricité représente une énergie propre, renouvelable et stockable pour laquelle notre pays doit rester à la pointe.

Monsieur le ministre d'État, vous avez évoqué la semaine dernière, devant la commission des affaires économiques, vos propositions d'ouverture à la concurrence des barrages français. Vous avez affirmé la nécessité de sortir du statu quo et de poursuivre les discussions avec la Commission européenne afin de mettre la France en conformité avec le droit européen, tout en veillant, disiez-vous, à ce que la mise en concurrence n'entraîne ni dégradation sociale ni dégradation territoriale.

Vous prenez donc la responsabilité unilatérale de baisser la garde, de cesser le combat engagé ces dernières années pour la préservation de cet outil stratégique et de fragiliser une filière qui a fait la preuve de son efficacité énergétique, économique et environnementale, à rebours du consensus qui s'est pourtant dégagé au Parlement dès 2013.

Parce qu'ils sont une des garanties de l'indépendance énergétique de notre pays, parce qu'ils sont des outils de l'aménagement de notre territoire, de la gestion de la ressource en eau et de ses usages, et parce qu'ils sont au cœur de très importants enjeux de sécurité, nous croyons que les barrages ne sont pas des biens comme les autres, qu'ils relèvent du service public et ne doivent pas être soumis aux règles de la concurrence. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et GDR, ainsi que sur quelques bancs des groupes REM et LR.)

M. Julien Aubert. Bravo !

Mme Marie-Noëlle Battistel. Contrairement à ce que vous annoncez, des solutions juridiques existent dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte, qui permettent d’éviter cette mise en concurrence tout aussi dogmatique que risquée. Certes, cela n'est ni simple ni évident, mais exige une vision politique et le courage de la défendre. D'autres pays l'ont fait : pourquoi pas la France ?

Comme pour le logement social ou le ferroviaire, vous semblez porter pour l'énergie un changement de modèle : en réduisant partout l'intervention publique, vous développez un modèle libéral qui aura des conséquences pour le service public, pour les agents, pour le pouvoir d'achat des consommateurs et pour nos territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes GDR et LR.)

Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à porter cette parole forte et à défendre ce patrimoine national ? (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et GDR, ainsi que sur quelques bancs des groupes REM et LR.)

Mme Jeanine Dubié. Bravo !

M. le président. La parole est à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.

M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Madame la députée, vous savez que nous sommes aussi sous le joug d’un droit européen que nous ne pouvons pas ignorer.

M. Christian Hutin. « Joug » est le terme juste !

M. Nicolas Hulot, ministre d'État . L’hydroélectricité est, comme vous l’avez vous-même rappelé à juste titre, un pilier de notre mix électrique, notamment grâce à sa flexibilité et à sa compétitivité. Mais, comme vous l’avez également dit, on ne peut ignorer – je le répète – que le droit européen et notre droit nous obligent à ce que les concessions hydroélectriques, dont certaines sont vieilles de plus de cinquante ans, soient renouvelées par la mise en concurrence. En effet, le paysage énergétique européen évolue, les ouvrages nécessitent des investissements et la gestion des différents usages de l’eau doit être revue dans certaines vallées si nous voulons pouvoir continuer à fournir une énergie propre et bon marché à nos concitoyens, conformément à nos objectifs économiques et climatiques.

Sur cette question, nous devons malheureusement – ou heureusement – avancer si nous voulons éviter une situation de blocage qui conduit à des risques de sous-investissement.

La loi de transition énergétique encadre cette évolution importante, d’abord par le regroupement des concessions pour mieux faciliter leur exploitation et gérer la ressource en eau, ainsi que par la possibilité de créer une société d’économie mixte hydroélectrique. Elle prévoit également la possibilité de prolongation contre travaux, dans le respect de la directive de concession.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Appliquez la loi !

M. Nicolas Hulot, ministre d'État . En tout état de cause, deux éléments sont intangibles : la remise en concurrence n’est pas une privatisation et, bien entendu, le statut des personnels sera préservé dans tous les cas, cela fait partie des engagements que le Gouvernement a pris.

Où en sommes-nous ? De nombreux échanges, auxquels j’ai participé – hier encore à Bruxelles –, ont eu lieu avec la Commission européenne afin de parvenir à une mise en œuvre équilibrée de ce dispositif, mais un accord n’a pas encore pu être trouvé. Nous y travaillons dans le cadre de la mise en demeure qui, je vous le rappelle, pèse sur notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)