15ème législature

Question N° 951
de M. Thierry Benoit (UDI, Agir et Indépendants - Ille-et-Vilaine )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales
Ministère attributaire > Cohésion des territoires et relations avec les collectivités territoriales

Rubrique > jeunes

Titre > Avenir du programme chantiers et stages à caractère éducatif

Question publiée au JO le : 28/01/2020
Réponse publiée au JO le : 05/02/2020 page : 655

Texte de la question

M. Thierry Benoit interroge Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la nécessaire pérennisation du dispositif « Argent de poche ». Ce programme s'adresse à des jeunes âgés de 16 à 21 ans qui se voient confier une mission au bénéfice d'une commune dans un cadre citoyen et responsabilisant, pendant la période des vacances scolaires. En échange d'une indemnisation pouvant atteindre une somme maximale de 15 euros par jeune et par jour, ces derniers peuvent participer à des petits chantiers de proximité, notamment l'entretien des espaces verts et des bâtiments communaux. Ce dispositif présente un double avantage. Pour les adolescents et jeunes adultes, il permet une première expérience du monde du travail et contribue ainsi à préparer une meilleure intégration professionnelle. Pour les communes, il s'agit d'optimiser la politique d'intégration des jeunes. Le Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) a récemment reformulé la circulaire d'application qui encadrait le dispositif « Argent de poche », appelé désormais « chantiers et stages à caractère éducatif dans le cadre du programme Ville, Vie, Vacances ». Il est notamment prévu que le périmètre d'application sera désormais strictement restreint aux territoires prioritaires de la politique de la ville. Les autres communes, notamment les communes rurales, ne pourront par conséquent plus être exonérées du paiement des cotisations sociales sur les gratifications versées. Une telle décision signifierait de fait la fin de ce dispositif qui a largement fait ses preuves, notamment auprès de nombreuses communes de Bretagne. Consciente de l'importance de ce programme, la préfète de la région a décidé de maintenir à titre dérogatoire pour 2019 le dispositif précédent sans restriction territoriale. Pour autant, il est primordial que ce dispositif, quelle que soit sa dénomination, puisse être reconduit et pérennisé dans les prochaines années, au risque de porter un coup sévère pour les communes rurales. Ainsi, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur ce dossier important.

Texte de la réponse

DISPOSITIF « ARGENT DE POCHE »


Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit, pour exposer sa question, n°  951, relative au dispositif « argent de poche ».

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre chargé de la ville et du logement, je souhaite interpeller le Gouvernement sur un dispositif que nous appelons communément en Bretagne, en particulier en Ille-et-Vilaine, « argent de poche » – son nom officiel est désormais « chantiers et stages à caractère éducatif ».

Historiquement, ce dispositif a été engagé dans le cadre de la politique de la ville. Dans certaines régions, comme dans le département d'Ille-et-Vilaine, en région Bretagne, les maires s'en sont saisi afin de proposer des missions d'intérêt général à des jeunes de 16 à 18 ans. Il s'agit souvent de missions d'entretien des écoles, du mobilier urbain ou des espaces verts qui durent deux ou trois heures et sont rémunérées sous forme d'argent de poche, de « pratiques », comme l'on dit, à hauteur de 15 euros la mission.

Ce dispositif ne coûte aujourd'hui rien à l'État et très peu à la collectivité publique – les communes versent les 15 euros en question. En revanche, ce dispositif est très important pour impliquer les jeunes dans la vie de la cité ; il crée aussi du lien social, car ces derniers sont souvent encadrés par les services administratifs ou techniques des communes. Il permet de sensibiliser les jeunes à la chose publique, de modifier leur regard, de renforcer leur sens civique et de lutter contre les incivilités. Les jeunes appelés à participer à l'entretien de l'espace commun ne le regardent plus jamais de la même manière.

Or le CGET – Commissariat général à l'égalité des territoires – souhaite modifier la circulaire d'application ; ces gratifications de 15 euros devraient désormais être déclarées aux URSSAF – unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale – et peut-être même à l'impôt sur le revenu. Cela alourdirait la charge financière des communes.

Monsieur le ministre, indépendamment du fait que vous portez une politique dite Action cœur de ville, et que vous souhaitez que les chantiers et stages à caractère éducatif soit concentrés dans les villes concernées, toute commune désireuse de faire bénéficier des jeunes du dispositif « argent de poche » pourra-t-elle continuer à le faire grâce au cadre juridique et réglementaire en vigueur aujourd'hui ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre chargé de la ville et du logement.

M. Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement. Monsieur le député, je vous remercie pour cette excellente question. Vous nous dites l'importance du dispositif « argent de poche », autrement dénommé « ville vie vacances », qui n'est pas suffisamment mis en avant. Je fais miens vos propos sur ce dispositif, sur son intérêt pour les jeunes et sur le nouveau symbole qu'il constitue de ce que la République peut apporter à notre jeunesse.

Vous vous demandez d'une part si ce dispositif permet aux jeunes de recevoir des gratifications au sens fiscal du terme, ce qui aurait un effet sur d'éventuelles cotisations salariales. Vous voulez savoir d'autre part si l'esprit de ce dispositif fait qu'il n'est dédié qu'aux enfants des quartiers prioritaires de la ville, ou s'il peut être étendu à d'autres territoires.

Le cadre réglementaire des chantiers éducatifs est défini à la fois par le ministère du travail, s'agissant du statut du jeune, et par la direction de la sécurité sociale, pour les mesures d'exonération de charges qui y sont associées.

Les rémunérations versées au personnel encadrant, aux porteurs de projet et aux animateurs sont assujetties aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale, dans les conditions fixées par la réglementation en vigueur au taux de droit commun du régime général ou, le cas échéant, selon des dispositions particulières.

Celles perçues par des jeunes âgés de moins de 25 ans suivant une formation professionnelle non rémunérée ou uniquement par l'État ou par la région sont soumises au régime social applicable à ces personnes, soit une exonération de CSG-CRDS et, depuis le 1er janvier 2013, un assujettissement aux cotisations de sécurité sociale sur la base d'une assiette forfaitaire.

Par lettre circulaire du 6 juillet 2015, l'ACOSS, l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, a précisé que le régime social spécifique aux rétributions versées aux bénéficiaires du programme « ville vie vacances » était pérennisé. Cela signifie les sommes versées aux jeunes âgés de 14 à moins de 26 ans au titre de leur activité dans le cadre de ce programme seraient assimilables à des gratifications versées aux stagiaires en entreprise, et qu'elles seraient par conséquent exclues de l’assiette des cotisations et contributions sociales dans les mêmes limites.

S'agissant de votre seconde question, relative à la zone géographique concernée, il y a maldonne : contrairement à ce que laisse entendre le texte écrit de votre question, publié au Journal officiel du 28 janvier dernier, le CGET n'a pas fait paraître de circulaire limitant le champ géographie d'application du dispositif.

Initialement, il était dédié aux seuls jeunes des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; c'était sa finalité première. Cependant, il est possible qu’une préfecture, après accord dérogatoire de l'URSSAF compétente, souhaite étendre ce dispositif à d’autres territoires. Tel a été le cas de la préfecture d’Ille-et-Vilaine en 2019, ce que je soutiens.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Après la réponse du ministre, je dirais que les choses vont moins mal – ce qui ne m'étonne pas de sa part, puisqu'il met tout en œuvre pour faciliter la vie de nos concitoyens, y compris celle des élus !

Je comprends, d'une part, que, pour les jeunes de 14 à 26 ans, nous avons affaire à une gratification, donc à de l'argent de poche qui n'est pas soumis à cotisations. D'autre part, un département qui souhaite étendre le dispositif doit se rapprocher des URSSAF.

M. Julien Denormandie, ministre. C'est exactement cela !

M. Thierry Benoit. La préfète de la région Bretagne, Mme Michèle Kirry, saura très bien le faire. On peut donc rassurer à la fois les maires et les jeunes qui bénéficient de ces dispositifs en période de vacances. C'est génial ! Merci, monsieur le ministre !