15ème législature

Question N° 96
de M. Stéphane Demilly (UDI, Agir et Indépendants - Somme )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et solidaire
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > énergie et carburants

Titre > Développement du biogaz en France

Question publiée au JO le : 16/01/2018
Réponse publiée au JO le : 24/01/2018 page : 292

Texte de la question

M. Stéphane Demilly interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les actions que le Gouvernement envisage afin de développer la production de biogaz en France. L'enjeu est à la fois écologique, énergétique et économique. Il s'agit en effet de poursuivre la diversification du bouquet d'énergies renouvelables tout en offrant des débouchés innovants à l'agriculture française. Plusieurs axes de travail lui semblent à développer. L'acceptabilité des projets de centrales de production de biogaz tout d'abord. Malgré les progrès technologiques et le renforcement des normes, trop de dossiers sont menacés ou ont été arrêtés en raison d'inquiétudes des habitants, souvent par manque d'informations. Sans alourdir les procédures administratives, il convient donc de mettre en place un volet de concertation en amont de tout nouveau projet afin d'associer les habitants. Expliquer, concerter et rassurer, tels doivent être les mots clés à l'origine de toute initiative. Ensuite, si les réflexions lancées par le Gouvernement pour la révision de la nomenclature ICPE (installation classée pour la protection de l'environnement) vont dans le bon sens, il convient d'aller plus loin. Trois régimes existent aujourd'hui : la déclaration contrôlée, l'enregistrement et l'autorisation. Une liste fixe de façon fermée les « déchets » pouvant servir à la méthanisation des installations soumises au régime déclaratif, régime le plus courant. En dehors de cette liste, l'installation s'inscrira automatiquement dans le régime d'autorisation, beaucoup plus contraignant. L'exemple ubuesque qui pourrait être cité est celui d'une tranche de pain. Pourtant parfaitement inoffensive, elle sera automatiquement soumise au régime d'autorisation ! Car ne figurant pas sur la liste des déchets du régime déclaratif. Par ailleurs, il conviendrait d'envisager une évolution du statut administratif du digestat issu des méthaniseurs fonctionnant uniquement à partir de matières végétales. Il est considéré administrativement comme « déchet », appellation connotée négativement pour ce qui est en réalité le produit de végétaux. Les conséquences sont lourdes de contraintes réglementaires, de temps mais aussi financières. Un statut intermédiaire entre les boues de stations d'épuration et le compost normalisé est à trouver. Enfin, le coût de raccordement des centrales de production de biogaz au réseau pèse lourdement sur le plan de financement des projets. Il en est la cause de certains échecs. Si une réfaction de 40 % est effective pour le réseau de distribution, rien ne semble envisagé pour le réseau de transport. Si l'on veut encourager un nombre croissant d'agriculteurs à devenir acteurs de la transition énergétique en France, il est impératif de réduire fortement ces coûts et d'envisager une réfaction au moins équivalente. Il souhaiterait donc connaître ses intentions sur cette question.

Texte de la réponse

DÉVELOPPEMENT DU BIOGAZ EN FRANCE


M. le président. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour exposer sa question, n°  96, relative au développement du biogaz en France.

M. Stéphane Demilly. Ma question s’adresse à M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. L'enjeu du développement de la production de biogaz est à la fois écologique, énergétique et économique. Il s'agit de poursuivre la diversification de notre bouquet d'énergies renouvelables, tout en offrant des débouchés innovants à l'agriculture française.

Plusieurs axes de travail me semblent devoir être développés. Il s’agit tout d’abord de l’acceptabilité des projets de centrales de production. En effet, malgré les progrès technologiques et le renforcement des normes, trop de dossiers sont menacés ou ont été arrêtés en raison d'inquiétudes des habitants, liées à un manque d'informations. Sans alourdir les procédures administratives, il convient donc de mettre en place un volet de concertation en amont de tout nouveau projet afin d'associer les habitants. Expliquer, concerter et rassurer : tels doivent être les mots clés à l'origine de toute initiative.

Ensuite, si les réflexions lancées par le Gouvernement pour la révision de la nomenclature des installations classées pour la protection de l’environnement – ICPE – vont dans le bon sens, il convient d'aller plus loin. Trois régimes existent aujourd'hui : la déclaration contrôlée, l'enregistrement et l'autorisation. Une liste détermine les déchets pouvant servir à la méthanisation des installations soumises au régime déclaratif, qui est le plus courant. En dehors de cette liste, l'installation s'inscrira automatiquement dans le régime d'autorisation, beaucoup plus contraignant – on pourrait en donner un exemple ubuesque : une tranche de pain, parfaitement inoffensive, sera automatiquement soumise au régime d'autorisation, car elle ne figure pas sur la liste des déchets relevant du régime déclaratif !

Par ailleurs, il conviendrait d'envisager une évolution du statut administratif du digestat issu des méthaniseurs fonctionnant uniquement à partir de matières végétales. Il est en effet considéré administrativement comme déchet, appellation connotée négativement alors qu'elle s'applique en réalité à un produit de végétaux. Les conséquences en sont lourdes de contraintes réglementaires, de temps, mais aussi financières. Un statut intermédiaire entre les boues de stations d'épuration et le compost normalisé doit donc être trouvé.

Enfin, le coût de raccordement des centrales de production de biogaz au réseau pèse lourdement sur le plan de financement des projets et explique certains échecs.

Si une réduction du coût de 40 % est effective pour le réseau de distribution, rien ne semble envisagé pour le réseau de transport. Pour encourager un nombre croissant d'agriculteurs à devenir acteurs de la transition énergétique, il est donc impératif de réduire ces coûts et d'envisager une réfaction au moins équivalente.

Je souhaite donc connaître les actions que le Gouvernement envisage en vue de répondre à ces questions et de soutenir activement la filière du biogaz.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d'État chargé du numérique. Monsieur le député, vous avez voulu interroger M. Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Ne pouvant être présent, il vous présente ses excuses et m'a invité à le représenter au nom du Gouvernement. Je vous prie de m’excuser de m’attacher à la lettre de sa réponse afin d’apporter les réponses les plus précises possibles à votre question.

Vous appelez l’attention du Gouvernement sur les actions qu’il envisage pour développer la production du biogaz, notamment par la méthanisation. Nous partageons pleinement votre préoccupation. La méthanisation est en effet une filière prometteuse, aux bénéfices multiples tant en termes environnementaux qu’en termes de création d'emplois.

La production de biogaz doit prendre une part importante dans la réalisation des objectifs fixés par la loi de transition énergétique pour la croissance verte, en s'appuyant, entre autres, sur le déploiement et la généralisation du tri à la source et de la valorisation organique des biodéchets.

En conséquence, la filière dispose déjà à la fois d'un soutien fort des politiques publiques et d'un cadre réglementaire adapté et proportionné à ces enjeux. Lors de la révision en cours de la programmation pluriannuelle de l'énergie – PPE –, nous examinerons à la fois la possibilité d'augmenter les objectifs de production de biogaz à court terme, c’est-à-dire d’ici à 2023, et à plus long terme, d’ici à 2028-2030, et les moyens de faciliter le développement de cette filière, en particulier l'injection de biométhane dans les réseaux.

Pour ce qui concerne l'acceptabilité des projets et la concertation sur ces projets, outre un permis de construire qui fait l'objet d'un affichage obligatoire, les installations de méthanisation sont soumises à la réglementation des installations classées pour la protection de l'environnement – ICPE. Cette concertation permet à chaque citoyen et aux collectivités locales concernées d'être informés et de faire valoir leur avis.

Par ailleurs, l'évolution de la nomenclature ICPE, que vous citez, est en cours et doit permettre de créer un régime intermédiaire d'enregistrement pour toutes les formes de méthanisation et pour relever le seuil de l'autorisation, en vue d'alléger les procédures et de simplifier le lancement de nouveaux projets.

En outre, la facilitation de la valorisation organique des digestats, que vous avez évoquée, est une piste importante pour permettre le développement de la méthanisation en France. Le statut administratif des digestats, cependant, n'a aujourd'hui pas d'impact sur les possibilités réglementaires de valorisation agronomique. Les usages au sol sont réglementés par les dispositions du code rural, mais indépendamment du statut de la matière épandue, que celle-ci soit ou non qualifiée de déchet. Malgré tout, nous continuons de réfléchir, en lien avec les services du ministère de l'agriculture, aux pistes envisageables pour élargir les possibilités de sortie des digestats du statut de déchets.

Pour ce qui est d’un potentiel statut intermédiaire entre les boues de station d'épuration et le compost normalisé, la directive-cadre sur les déchets nous oblige à attribuer, ou non, le statut de déchet, et ne prévoit pas de statut intermédiaire. Les composts normés, y compris à partir de boues, pourront bientôt sortir du statut de déchet, sous les conditions fixées par le code de l'environnement, et un règlement européen permettra également une sortie du statut de déchet pour la plupart d'entre eux.

Enfin, je vous confirme qu'il est bien prévu de réduire le coût de raccordement des installations de production de biométhane au réseau de transport de gaz naturel. Cette mesure favorisera un déploiement plus équilibré de la production du biométhane sur le territoire, y compris dans les zones rurales les plus éloignées des réseaux de gaz naturel existants.