FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 39382  de  M.   de Gaulle Jean ( Rassemblement pour la République - Deux-Sèvres ) QE
Ministère interrogé :  agriculture et forêt
Ministère attributaire :  agriculture et forêt
Question publiée au JO le :  18/02/1991  page :  550
Réponse publiée au JO le :  03/08/1992  page :  3501
Rubrique :  Elevage
Tête d'analyse :  Politique et reglementation
Analyse :  Hormones naturelles. autorisation. CEE
Texte de la QUESTION : M Jean de Gaulle attire l'attention de M le ministre de l'agriculture et de la foret sur l'inutilite et le danger que represente pour l'elevage francais la directive du 31 decembre 1985 interdisant l'utilisation des hormones de croissance chez les animaux destines a la consommation humaine. Cette reglementation, qui interdit meme les hormones naturelles, est nefaste a bien des egards. Tout d'abord, elle ne repose sur aucun fondement scientifique ; en effet, les plus grands specialistes de l'Organisation mondiale de la sante, de la Food and Agriculture Organization et de la CEE (comite Lamming 1983) ont confirme l'innocuite absolue des residus d'hormones naturelles contenus dans les viandes des animaux engraisses par cette technique. Ces hormones existent deja dans le corps humain, qui les produit, et les residuels hormonaux contenus dans les viandes sont tellement faibles par rapport aux quantites d'hormones secretees par l'homme (taux inferieur a 1 p 1 000) qu'il faudrait absorber 220 kilogrammes de viande par jour pour initier tout effet indesirable. La rehabilitation des hormones naturelles ne presenterait donc aucun danger pour la sante publique. Enfin, la directive communautaire met en peril notre filiere bovine soumise a la concurrence de nos partenaires de la CEE qui n'appliquent pas tous la reglementation europeenne, et surtout a celle des grands pays exportateurs de viande chez qui l'usage des anabolisants est autorise (Etats-Unis, Amerique latine, Australie). En effet, l'emploi des substances anabolisantes confere de multiples avantages : elle permet a l'eleveur d'ameliorer les performances zootechniques de ses animaux, dont le metabolisme est accru. Avec moins de nourriture, ils grandissent plus vite et mieux que les autres et ont davantage de masse musculaire. Pour l'eleveur, cela represente un apport de 300 a 800 francs par veau et de 1 200 a 2 500 francs par vache. Des lors, cette viande moins grasse se vend plus facilement et offre au commercant un apport a la decoupe de 1 a 4 francs le kilogramme. Quant au consommateur, il prefere acheter une viande moins grasse et moins chere, performance que seul l'usage d'hormones permet de realiser. De plus en plus, notre elevage va donc se trouver confronte a une concurrence accrue, car l'autorisation accordee aux pays de la CEE de refuser l'entree sur leur territoire de produits contenant des anabolisants implique des moyens de controle que nous ne possedons pas a une grande echelle et qui de toute facon ne pourraient pas mettre fin a toutes les fraudes. D'autre part, la reglementation francaise actuelle laisse des zones d'ombre qui profitent aux fraudeurs : l'importation des anabolisants n'est reglementee que si les substances sont conditionnees au detail, car alors elles ont statut de produit pharmaceutique soumis a l'autorisation du ministere de la sante ou de l'agriculture ; en revanche, les substances importees en vrac sont, quant a elles, considerees comme des produits chimiques et echappent de ce fait au controle. Aujourd'hui, les eleveurs francais sont places devant l'alternative suivante : pericliter ou recourir aux ababolisants. L'innocuite des hormones naturelles etant prouvee de facon incontestable, il lui demande s'il ne serait pas souhaitable d'en autoriser l'emploi en Europe en modifiant la legislation communautaire afin que l'elevage francais ne soit pas mis en peril par une nouvelle concurrence deloyale.
Texte de la REPONSE : Reponse. - Le 1er janvier 1988, la France a modifie sa reglementation relative aux anabolisants afin de se conformer aux exigences fixees en la matiere par la Communaute economique europeenne. Depuis cette date, l'emploi des hormones steroides meme naturelles est interdit en elevage sauf a des fins therapeutiques. Le rapport de la commission d'enquete du parlement europeen sur la qualite de la viande affirmait que l'utilisation de l'oestradiol, de la progesterone, de la testosterone et de la trenbolone etait acceptable pour autant que ces hormones steroides soient utilisees dans des conditions determinees (voie d'administration, dose, delai d'attente, etc). Pour le legislateur, le terme « pour autant » est capital : si ces conditions ne peuvent etre imposees, l'utilisation des hormones devient inacceptable. Meme si les arguments emanant d'une communaute scientifique quasi unanime demontraient l'innocuite de ces agents lorsqu'ils sont utilises de facon rationnelle, la notion d'un risque possible eventuel est preponderante. Par ailleurs, il faut rappeler que les reglementations ne sont pas exclusivement fondees sur des informations scientifiques. Elles doivent aussi prendre en compte des parametres socio-economiques tels que les attentes du consommateur ou les difficultes liees a la surproduction de viande. Par ailleurs, malgre la reglementation qui impose ces mesures d'interdiction dans les douze pays europeens de la Communaute economique europeenne, les controles plus ou moins rigoureux mis en oeuvre dans les differents Etats membres pour lutter contre l'emploi frauduleux de facteurs de croissance en elevage ont genere des conditions de concurrence deloyales au sein de la filiere viande, qui sont denoncees par les autorites francaises. Ainsi les representants francais ont demande avec insistance a la Commission des communautes europeennes de se saisir de ces questions et de prendre toutes mesures necessaires pour garantir voire controler les conditions de production au sein de la communaute. Les positions tres fermes prises par les representants francais ont permis d'obtenir peu a peu des resultats tangibles : la commission des communautes europeennes a compris la necessite de diligenter une mission d'inspection sur l'usage illegal des substances anabolisantes, laquelle a procede a des enquetes tres completes dans les differents Etats membres concernes. Ces enquetes se sont achevees au premier trimestre de cette annee. Elles debouchent actuellement sur des echanges concernant les informations recoltees dans les pays de la Communaute europeenne. Des actions ont egalement ete conduites sur le terrain : des le mois d'octobre 1991, un renforcement consequent des controles a ete mis en place dans l'ensemble du territoire francais, notamment au niveau des frontieres. C'est ainsi qu'une liste d'exportateurs etrangers ayant viole la reglementation communautaire a ete etablie afin de leur interdire de poursuivre leurs exportations en France. Parallelement, des enquetes judiciaires sont en cours dans leur pays d'origine. Cette liste d'exportateurs est regulierement remise a jour. Par ailleurs, des controles sur toutes les marchandises importees, quels que soient l'espece animale et le pays exportateur, sont realisees a destination des etablissements utilisateurs. Ces controles permettent ainsi de recueillir des elements d'information tres interessants. Compte tenu de la sensibilite actuelle de la plupart des Etats membres, du parlement europeen et de la commission peu disposes a reconsiderer la legislation existante, il parait donc difficile aux autorites francaises de proposer un retour en arriere en ce qui concerne les hormones naturelles. Par contre, une voie interessante consisterait peut-etre a disposer dans le futur d'additifs autorises en alimentation animale a des fins zootechniques.
RPR 9 REP_PUB Poitou-Charentes O