FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 56171  de  M.   Charles Serge ( Rassemblement pour la République - Nord ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  06/04/1992  page :  1558
Réponse publiée au JO le :  25/05/1992  page :  2360
Rubrique :  Decorations
Tête d'analyse :  Medaille militaire
Analyse :  Traitement alloue. suppression. consequences
Texte de la QUESTION : M Serge Charles attire l'attention de M le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la suppression du traitement des medailles militaires, decidee par le decret no 91-396 du 24 avril 1991 publie au Journal officiel du 27 avril 1991. Certes, ce traitement representait une somme modeste mais il constituait, pour les personnes beneficiaires, la reconnaissance du temps passe sous les drapeaux, avec loyaute et discipline. Cette mesure brutale, prise sans concertation, affecte particulierement les medailles militaires qui voient, dans cette decision, la negation de tout ce qu'ils ont accompli au service de leur patrie. Il lui demande donc les raisons pour lesquelles une telle decision a ete prise et s'il envisage de la rapporter, compte tenu de l'emoi general suscite.
Texte de la REPONSE : Reponse. - Il convient, tout d'abord, de preciser que le decret no 91-396 du 24 avril 1991 ne supprime pas le traitement afferent a la Legion d'honneur et a la medaille militaire ; il ne fait qu'en reglementer les conditions d'attribution pour l'avenir et ne porte pas atteinte aux droits acquis. Il faut egalement rappeler, qu'a l'origine, le traitement attache a la Legion d'honneur et a la medaille militaire avait ete institue afin d'eviter que leurs titulaires ne tombent dans le denuement, situation qui n'aurait pas ete conforme a l'eclat que les pouvoirs publics souhaitaient donner a ces decorations. Depuis cette epoque, la legislation sociale a heureusement beaucoup evolue : de nombreux regimes de retraite, de pension et d'entraide ont ete institues, vidant pratiquement le traitement de son sens materiel de l'origine pour ne lui laisser qu'une signification symbolique, son montant etant tres faible. Le decret du 24 avril 1991 reserve le benefice du traitement aux concessions se fondant sur une (ou plusieurs) blessure(s) de guerre ou citation(s) ou sur un acte particulier de courage ou de devouement. Sur la base de ces dispositions nouvelles, obtiendront cet avantage les anciens combattants 1914-1918 et 1939-1945, les mutiles de guerre decores au titre des articles R 39 et R 42 du code de la Legion d'honneur, les militaires d'active et de reserve blesses de guerre ou titulaires d'une citation, enfin tous ceux decores, tant a titre civil que militaire, pour acte de courage ou de devouement. Bien entendu, les legionnaires et les medailles militaires qui beneficiaient d'un traitement avant cette reforme, continueront a recevoir cet avantage, les dispositions en cause n'etant par retroactives. Si la portee et la signification de ces mesures ont generalement ete bien comprises, certains medailles militaires et membres d'association d'anciens combattants, en revanche, n'ont pas percu le sens reel de cet amenagement des textes. Le fait que certains medailles militaires ne beneficient pas d'un traitement n'est pas nouveau dans l'histoire de cette haute distinction. La medaille militaire a pendant la plus grande partie de son histoire, compte parmi ses titulaires, deux categories, les beneficiaires du traitement et les non-beneficiaires, sans que le regime soit juge discriminatoire. A noter d'ailleurs que sur la base de certains textes pris au XIXe siecle, peu de medailles militaires d'aujourd'hui recevraient le traitement. A la verite, c'est seulement un decret du 6 fevrier 1964 - publie au Journal officiel du 11 fevrier - qui a generalise le traitement de la medaille militaire. L'une des raisons de cette mesure etait que la quasi-totalite des concessions faites a l'epoque concernaient des sous-officiers d'active ou de reserve blesses de guerre, ou cites en 14-18, en Indochine et en Algerie (le conflit algerien venait de prendre fin) et qu'il importait legitimement de les recompenser en raison de ces titres de guerre souvent nombreux. Dans les services invoques a l'epoque, la dominante etant la blessure de guerre, la citation ou la participation effective a un theatre de combat, les pouvoirs publics avaient donc estime qu'il convenait de donner a tous le traitement. La situation aujourd'hui est fondamentalement differente : la plupart des militaires ou anciens combattants pourvus de titres de guerre - blessures ou citations - ont vu ces titres recompenses. La fin des combats, le temps de paix que connait la France depuis un tiers de siecle a eu pour effet de rapprocher progressivement les carrieres de certains militaires de celles de beaucoup d'agents civils de l'Etat dont les fonctions comportent pour certains des risques sensiblement equivalents. L'objet du decret du 24 avril 1991 est donc, des lors que le traitement a perdu son sens alimentaire, de lui rendre son sens symbolique premier en ne le conferant qu'aux medailles militaires decores au combat, c'est-a-dire, sur le fondement de blessures de guerre, citations ou actes de courage ou de devouement. Ce « traitement symbole » sera donc attribue a ceux qui auront les titres requis selon l'esprit pose aux origines de la medaille militaire. Ajoutera-t-on que la reforme operee permet de retrouver un autre aspect de la philosophie originelle puisqu'une partie des economies budgetaires realisees sera attribuee, sous forme de subventions aux associations d'entraide - notamment la societe des medailles militaires - afin qu'elles puissent aider davantage leurs societaires necessiteux. Une autre partie de ces subventions sera distribuee par la grande chancellerie aux medailles militaires qui ne sont pas membres de leur association nationale. Ainsi donc la medaille militaire - qui a pour fondement essentiel des valeurs morales - retrouvera-t-elle le sens et la signification qui lui avaient ete assignes lors de sa creation.
RPR 9 REP_PUB Nord-Pas-de-Calais O