FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 58430  de  M.   Foucher Jean-Pierre ( Union du Centre - Hauts-de-Seine ) QE
Ministère interrogé :  intérieur et sécurité publique
Ministère attributaire :  intérieur et sécurité publique
Question publiée au JO le :  01/06/1992  page :  2405
Réponse publiée au JO le :  10/08/1992  page :  3730
Rubrique :  Elections et referendums
Tête d'analyse :  Vote par procuration
Analyse :  Retraites. femmes enceintes
Texte de la QUESTION : M Jean-Pierre Foucher attire l'attention de M le ministre de l'interieur et de la securite publique sur les conditions dans lesquelles sont accordees les procurations lors des consultations electorales. Aux fins de lutter contre la fraude electorale, des dispositions strictes ont ete prises, n'autorisant les procurations que dans deux cas : d'une part, pour raison de travail avec attestation de l'employeur ; d'autre part, pour raison de maladie avec certificat medical a l'appui. N'appartenant ni a l'une ni a l'autre de ces categories, de nombreuses personnes n'ont pu se rendre aux urnes lors des dernieres elections : des retraites qui n'occupaient pas leur domicile habituel et les femmes enceintes qui peuvent, au tout dernier moment, se trouver dans l'impossibilite de se deplacer pour accomplir leur devoir electoral. Alors que chacun se plaint de l'absenteisme grandissant, il souhaiterait savoir si des mesures d'exception sont envisagees pour repondre aux preoccupations de ces deux categories d'electeurs.
Texte de la REPONSE : Reponse. - L'article L 71 du code electoral enumere, non pas deux, mais trente-deux categories de citoyens qui peuvent, sur leur demande, etre admis a voter par procuration. Les vingt-trois premieres categories mentionnees, reunies dans le paragraphe I dudit article, concernent des electeurs qui se trouvent retenus hors de leur commune d'inscription ; les neuf dernieres, reunies dans le paragraphe II, interessent des citoyens qui peuvent voter par procuration, qu'ils se trouvent ou non dans leur commune d'inscription le jour du scrutin. En particulier, au titre du 8o dudit paragraphe II, les femmes enceintes dans l'impossibilite de se deplacer sont admises a participer au vote en donnant procuration. Pour ce faire, il leur suffit d'adresser a l'autorite habilitee a dresser les procurations un certificat medical attestant de leur impossibilite de se rendre au bureau de vote pour obtenir le deplacement a leur domicile d'un delegue qui etablira les volets du formulaire de procuration, lesquels seront ensuite signes par l'autorite competente et adresses a la fois au maire de la commune d'inscription et au mandataire choisi. En revanche, il est exact que la loi n'a jamais autorise les retraites a avoir recours a ce mode de votation du simple fait qu'ils ont quitte leur domicile habituel pour cause de villegiature. Il en est ainsi pour des raisons de fond qui s'articulent comme suit : 1o en democratie, le vote est un acte personnel et secret. De toute evidence, le vote par procuration deroge a ce principe ; 2o une telle derogation ne peut donc valablement s'appuyer que sur des elements objectifs resultant, non de la volonte de l'electeur, mais de contraintes qu'il subit du fait de sa sante, de sa profession, voire d'obligations inopinees auxquelles il ne peut se soustraire. A cet egard, la lecture de l'article L 71 precite du code electoral traduit bien cette doctrine ; 3o on ne saurait dire que, pour les retraites, la date de leurs « vacances » - c'est-a-dire la date a laquelle ils choisissent de s'eloigner de leur domicile habituel - constitue une contrainte puisqu'elle ne depend finalement que d'eux-memes ; 4o il resulte de ce qui precede qu'autoriser les « retraites vacanciers » a voter par procuration reviendrait a accorder le droit de vote par procuration pour convenances personnelles ; 5o des lors, on ne voit pas pourquoi seuls les retraites pourraient beneficier de ce droit et non, par exemple, les inactifs ou les chomeurs, qui se trouvent, objectivement, dans une situation exactement identique. Et si ce droit devait etre accorde a ceux qui n'ont pas - ou qui n'ont plus - d'activite professionnelle, on ne voit pas non plus pourquoi il serait denie a ceux qui en ont une. Un tel « privilege » accorde aux retraites constituerait une rupture du principe constitutionnel d'egalite entre les citoyens ; 6o respecter ce principe constitutionnel, en la circonstance, aboutirait donc automatiquement a faire du vote par procuration une procedure ordinaire d'expression du suffrage, en contradiction avec un autre principe fondamental de la democratie, celui rappele au 1o ci-dessus ; 7o il s'ensuivrait, en outre, de multiples possibilites de fraudes. En effet, actuellement, parce qu'elle resulte de circonstances imperatives, la procuration n'est delivree que sur presentation de pieces justificatives precises que le juge de l'election peut ulterieurement controler. Dans l'hypothese du vote par procuration pour convenances personnelles, il ne peut plus y avoir de controle, ni a priori, ni a posteriori. Au surplus, les officiers de police judiciaire, auxquels l'etablissement des formulaires de procuration donne deja bien du travail, seraient excessivement sollicites et ne pourraient donc materiellement proceder a aucune verification serieuse. Telles sont les raisons pour lesquelles les retraites en villegiature ne peuvent etre admis a voter par procuration. Au demeurant, lors de la discussion de la loi no 88-1262 du 30 decembre 1988, la question de la modification de l'article L 71 du code electoral pour permettre aux retraites de voter par procuration a ete abordee. Il ressort sans ambiguite des debats que le legislateur n'a pas voulu donner suite a la suggestion qui lui etait faite. L'amendement depose en ce sens a ete rejete par la commission des lois et a ete ensuite retire en seance publique par son auteur (JO, Assemblee nationale, Debats parlementaires, 2e seance du jeudi 24 novembre 1988, pages 2754 et suivante).
UDC 9 REP_PUB Ile-de-France O