Texte de la REPONSE :
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Reponse. - I - L'investissement industriel peut d'abord s'analyser par taille d'entreprises et par secteur : les resultats de l'EAE (enquete annuelle d'entreprises) de l'annee 1990 indiquaient que les entreprises industrielles ont realise des investissements record. Contrairement aux previsions, la crise du Golfe n'avait pas substantiellement modifie le volume d'equipements attendu pour 1990. Mais ceux-ci ont change de nature, les investissements de modernisation se substituant progressivement aux investissements de capacite, surtout a partir du second semestre 1990. La baisse de 8,4 p 100 en 1991 correspond a une pause forcee des entreprises, confrontees a alourdissement de leurs charges financieres liees aux investissements realises les annees precedentes, et a de fortes incertitudes sur l'evolution a court terme de leurs marches : cette baisse s'est produite alors meme que la reprise etait attendue de facon plus precose et plus vive qu'elle n'a ete. L'investissement a beaucoup progresse dans les PMI (+ 11,9 p 100 en volume en 1990), mais contrairement aux annees precedentes, ce sont les grandes entreprises qui ont realise les meilleurs performances (+ 15,8 p 100 en volume). En 1991, l'investissement a baisse plus dans les grandes entreprises (- 8,9 p 100 en volume) que dans les PMI (- 6,9 p 100). Qualitativement, sur la decennie, les investissements servent en grande partie a moderniser et ameliorer la productivite. Ce n'est qu'en 1989, en reponse a la croissance durablement retrouvee de la production, qu'une forte augmentation des investissements de capacite est enregistree. De 1986 a 1989, la croissance en francs constants des investissements a ete d'environ 6 p 100 en moyenne annuelle dans l'ensemble de l'industrie ; elle est plus forte pour les PMI (+ 7,7 p 100) que pour les grandes entreprises (+ 4,3 p 100). Cette performance avait deja ete constatee sur les annees 1981-1986 (+ 3,5 p 100 contre 1,3 p 100). Durant ces annees, la dynamique de l'investissement des PMI avait ete plus reguliere, au contraire de celle des grandes entreprises. L'evolution recente des investissements est plus favorable dans les PMI pour tous les grands secteurs industriels, a l'exception du secteur automobile. Pour les grandes entreprises, elle est beaucoup plus contrastee selon les secteurs. La part de l'investissement dans la valeur ajoutee croit de plus de trois points entre 1986 et 1989 dans les PMI (0,8 point dans les grandes entreprises). Cette performance est valable pour toutes les tranches de taille de PMI. Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992). Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992). L'ecart qui se reduisait jusqu'en 1985 entre PMI et grandes entreprises en terme de taux d'investissement se renforce en 1990 precisement sous l'effet de la tres forte progression de l'investissement des grandes firmes. Le profil du taux d'investissement montre cependant que les PMI sont restees regulierement en retard de plus de quatre points par rapport aux grandes entreprises, ce qui est normal, car les PMI sont dans des activites ou l'intensite capitalistique est moindre. En 1990, les plus forts taux de croissance sont enregistres dans les biens intermediaires, particulierement dans le secteur du papier-carton dont la dynamique est impulsee par des prises de participations de papetiers etrangers (scandinaves), dans la chimie de base et dans la siderurgie. De meme la forte croissance des investissements dans l'automobile resulte d'une poursuite de la modernisation alliee a une reorganisation du travail. Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992). A signaler egalement que les entreprises francaises ont atteint un niveau record d'investissement a l'etranger, portant la France au second rang mondial avec des montants qui depassent en 1989, et en 1990, 100 milliards de francs par an, soit le triple du rythme moyen de 1980 a 1988. Mais, simultanement, une forte part des investissements signale ici est le fait d'entreprises etrangeres en France. Les obstacles a l'investissement sont de nature differente selon les tailles des entreprises. Dans le cas des biens d'equipement, les grosses entreprises (Bull. ST, Matra, etc) manquent de fonds du fait de l'etat du marche ; les petites entreprises, sous-capitalisees, ont un retard dans les investissements immateriels (composants passifs), alors meme qu'elles sont en concurrence avec de grands groupes ; d'autres (mecanique) doivent faire face a l'acquisition de materiels couteux pour renouveler des equipements obsoletes, dont le prix ancien n'avait rien a voir avec celui des equipements actuels. L'industrie textile est defavorisee par un niveau d'investissement par tete plus faible que ses concurrents europeens : le Plan-textile de 1982-1983 a permis de stabiliser l'investissement a un palier qui s'est maintenu depuis, mais reste a un niveau relatif inferieur a celui de nos concurrents. Ceci, combine a une strategie un peu dispersee, explique les difficultes actuelles et la faiblesse de l'emploi dans cette branche. D'une facon generale, la plus grande sensibilite a la conjoncture, marquee par les grandes entreprises francaises par rapport a leurs concurrents etrangers, est une cause de faiblesse : en effet, ces entreprises sont les championnes de la competitivite et des exportations ; si elles accusent toute difficulte conjoncturelle par une baisse des investissements, leur avenir est, a terme, incertain. II. - La reduction des marges des entreprises et de l'investissement constitue une donnee nouvelle : depuis 1988, les marges des entreprises non financieres se sont reduites. Pour les seules entreprises industrielles, le phenomene doit encore etre plus sensible, et il est a lier a la compression forte des marges a l'exportation, et a la moderation des hausses de prix. Pour 1992, les marges des entreprises industrielles devraient se maintenir, ou decroitre legerement. Si elles sont penalisees par la faiblesse des augmentations de prix et les hausses tres fortes du cout salarial unitaire (+ 3,7 p 100 en 1991), les entreprises industrielles beneficieront, en contrepartie, d'un partage plus favorable de la valeur ajoutee en 1992. La reduction du cout salarial unitaire previsible (- 0,7 p 100) est due a une forte decroissance de l'emploi et a une forte hausse de la productivite (+ 5,6 p 100 en moyenne annuelle en 1992). La hausse de 4,4 p 100 du salaire moyen par tete, certes importante, laisse cependant une marge. Pour 1991, l'investissement productif dans l'industrie des entreprises baisse de 8,4 p 100 en volume apres avoir augmente de 10,8 p 100 en 1990, annee qui etait la troisieme de forte augmentation de l'investissement : la baisse observee en 1991 laisse malgre tout un flux eleve. Pour 1992, les investissements baisseraient au meme rythme (- 8 p 100), mais le haut niveau atteint en 1990 permettrait a la France de garder un niveau encore relativement favorable dans l'ensemble de la CEE. Suivant la baisse de l'investissement, le taux d'investissement diminue. Dans ce contexte de baisse de l'investissement, et avec des marges maintenues, le taux d'autofinancement augmente (90 p 100) en 1991 et pourrait, en termes de comptabilite nationale, depasser 100 p 100 en 1992. Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992). III. - L'investissement industriel connait une situation tendue : en 1991, un premier recul de l'investissement industriel est constate depuis 1983 et il perdure en 1992 : l'evolution de l'investissement industriel francais peut etre retracee grace a l'indicateur de part de l'investissement dans la valeur ajoutee, soit le taux d'investissement. Ce taux revele, pour l'industrie manufacturiere une periodisation marquee, qui s'apprecie par rapport a la situation qui prevalait avant le premier choc petrolier ou le taux d'investissement industriel s'inscrivait a un niveau eleve entre 17 et 18 p 100. Le premier choc petrolier le fait chuter de quatre points, puis il va ensuite baisser jusqu'a un minimum de 12,1 p 100 en 1983. Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992). La remontee du taux d'investissement a commence en 1984 et se prolonge continuellement depuis. En 1990, il atteint, a nouveau, le taux de plus de 17 p 100,qui prevalait au debut des annees 1970, et efface donc completement la baisse enregistree depuis cette epoque. La croissance de l'investissement s'est poursuivie en 1990 et n'a enregistre, qu'avec retard, la baisse de la conjoncture de la mi-1990. Pour 1991, la faiblesse relative de la demande et le niveau eleve des taux d'interet, niveau qui risque de persister, se traduiraient par une baisse en volume de - 8,4 p 100 de l'investissement dans l'industrie : la baisse est encore plus sensible si on se limite aux seuls investissements en equipements. Ce resultat est acquis malgre une forte hausse des investissements des constructeurs automobiles. Le secteur le plus en retrait est celui des biens intermediaires. Cependant, les industriels francais investissent fortement a l'etranger, et donc reportent une part de leur investissement hors du territoire, ce qui ne suffit pas a inverser le mouvement de baisse. L'investissement diminuera en 1992 au meme rythme qu'en 1991, soit une baisse nouvelle de 8 p 100 en volume. Ceci veut dire que la fragilite relative de la France, dans le domaine de l'investissement industriel, n'a pas fondamentalement change durant les dix dernieres annees et que seule une periode de haute conjoncture a permis d'atteindre de bons resultats en 1988-1990. IV. - La difficulte d'investir explique les particularites des PMI francaises : les progres enregistres dans la lutte contre l'inflation, dans un contexte de haut niveau d'endettement de l'industrie francaise (insuffisance des fonds propres), ont mis en lumiere la question du cout du financement des entreprises et des taux d'interet, en depit de l'amelioration recente de leurs resultats. Dans les annees 70, vu l'inflation, les taux d'interet reels etaient proches de zero, voire negatifs. Ils se situent, a la fin des annees 80, au niveau tres eleve de 6 a 7 p 100, occasionnant une tres forte croissance des charges d'interets. Celles-ci sont passees de 6,6 p 100 de la valeur ajoutee en 1970 a plus de 10 p 100 sur toute la decennie 80. Dans ce contexte, les PMI francaises connaitraient des conditions d'acces au credit globalement moins favorables que celles de leurs homologues etrangeres. En France, le niveau d'endettement des entreprises est plus fort que celui de ses concurrents (endettement rapporte au total du bilan normalise), mais une large part de l'ecart s'explique par l'existence de donnees consolidees au Royaume-Uni, par la part importante des fonds de provision pour retraite en RFA et par l'abondance des creances commerciales en France et en Belgique (Banque de France). Si l'on tient compte des correctifs, la France a un niveau d'endettement legerement superieur, mais voisin de celui de RFA, de la Belgique ou des Pays-Bas, inferieur a celui du Japon et superieur a celui du Royaume-Uni. Mais la situation est en evolution rapide. D'une comparaison sur les conditions de financement des PMI dans les principaux pays europeens (KPMG/ministere de l'industrie), ressortent les observations suivantes concernant le cout reel des credits : les PMI francaises sont en situation defavorable par rapport a leurs concurrentes allemandes ; elles supportent en moyenne un cout reel supplementaire de trois points sur les credits a court terme et plus de deux points sur le moyen et long terme. Par rapport au Royaume-Uni, la situation est plus equilibree : la France est plus chere sur le court terme (1,3 point), mais moins chere sur le moyen terme (0,8 point). Les entreprises francaises semblent etre en situation favorable par rapport aux italiennes (deux a trois points d'ecart sur les taux officiels). En fait, cet avantage est reel sur le court terme, mais il disparait sur le moyen long terme, en raison des bonifications accordees par l'Etat. Le financement des entreprises par le credit-bail est un exemple significatif : en 1989, il convient d'incorporer aux investissements, les contrats passes dans l'annee, soit 12,4 milliards de francs. Ces investissements finances par l'intermediaire du credit-bail representent environ 8,4 p 100 du total des investissements (investissements materiels + credit-bail) realises par les entreprises industrielles (15,8 p 100 des investissements dans les PMI). Le nombre d'entreprises ayant recours a ce mode de financement ne cesse d'augmenter, mais sur des montants de contrats plus faibles : - 6 p 100 par rapport a 1988, malgre la forte croissance des investissements. Seules, les entreprises de 50 a 200 salaries souscrivent un montant de contrats plus important qu'en 1988. Ce sont des entreprises qui ont poursuivi leur effort d'investissement, sans reussir a augmenter dans la meme proportion leur capacite d'autofinancement. Elles se distinguent par la des plus grosses entreprises, mais aussi des PMI de plus petite taille. Le credit-bail est en outre un outil adapte aux petites et moyennes entreprises, procurant une source de financement plus souple que les moyens traditionnels en leur permettant d'epargner leurs fonds propres. L'utilisation du credit-bail augmente clairement lorsque la taille de l'entreprise diminue : en 1989, 23 p 100 des investissements des entreprises de 20 a 49 salaries ont ete finances par credit-bail, contre 3,3 p 100 dans le cas des grandes entreprises. Voir tableau dans le JO no 23 (annee 1992).
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