Texte de la QUESTION :
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La terrible progression de la criminalite en Corse et l'accroissement vertigineux du nombre des assassinats ont amene un certain nombre de journalistes et enqueteurs a evoquer une derive « politico-mafieuse » dans l'ile de Beaute. Mme Marie-France Stirbois souhaiterait que M le ministre de l'interieur et de la securite publique veuille bien l'eclairer sur la nature exacte de cette nouvelle et terrifiante criminalite. En particulier, elle aimerait savoir si l'implantation de la mafia italienne y est constatee par les services de police, et dans l'affirmative, quels moyens il envisage de mettre en oeuvre pour barrer la route a ses entreprises criminelles. En outre, elle s'interroge sur l'opportunite d'envisager la suppression a court ou moyen terme des frontieres, mesure qui ne conduira qu'a faciliter la tache des truands, et elle lui demande si le projet d'une Europe sans controles aux frontieres des Etats, en offrant un large champ d'action a la petite et grande criminalite, ne semble pas etre une dangereuse utopie contraire aux interets des honnetes citoyens.
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Texte de la REPONSE :
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Reponse. - Le theme d'une eventuelle derive mafieuse en Corse est regulierement aborde dans l'ile depuis quelques annees. Meme si des soupcons peuvent peser sur la nature de certaines operations immobilieres, les investigations menees n'ont pas permis, a l'heure actuelle, d'etablir qu'il s'agissait d'investissements mafieux. Les meurtres, attentats, actions violentes contre des ensembles immobliers, etc, commis en Corse, ont des origines multiples : differends commerciaux ou de voisinage, reglements de comptes entre truands, actions nationalistes. Les moyens mis en oeuvre pour juguler cette criminalite dans l'ile ont ete renforces depuis plusieurs semaines avec notamment : un apport de trente inspecteurs supplementaires au service regional de police judiciaire d'Ajaccio ; la mise sur pied d'une cellule interservices (police, gendarmerie, services fiscaux, douane) chargee de detecter les operations pouvant etre financees par des circuits d'argent d'origine douteuse et susceptibles de motiver, entre autres, des reglements de compte. Ces forces completent l'action des autres services engages depuis longtemps dans la repression de la grande criminalite et des resultats notables ont, d'ores et deja, ete obtenus. Les services de police nationale qui sont tres vigilants, portent un interet particulier aux investissements d'argent sale susceptibles d'etre operes et procedent, au travers de reunions bilaterales, a des echanges d'informations avec les services italiens. Les preoccupations de la lutte contre la mafia ont ete elargies a l'ensemble des pays europeens, par l'etablissement de relations entre services de police specialises de la CEE. Dans ce cadre, les ministres de l'interieur et de la justice europeens se sont reunis a Bruxelles le 18 septembre 1992, en vue d'etudier ensemble les mesures permettant de lutter plus efficacement contre cette organisation criminelle. C'est ainsi que la lutte contre la criminalite organisee est une mission nouvelle confiee a Europol, office europeen de cooperation policiere entre les douze Etats membres, qui commencera a fonctionner des janvier 1993, sous la forme d'une Unite Drogues chargee d'echanger des renseignements sur le trafic des stupefiants. Les ministres ont egalement decide la creation d'un groupe de travail europeen associant des policiers et des magistrats. Ce groupe devra dans les six mois faire des propositions pour lutter contre la criminalite organisee de type mafieux. Enfin, les informations emanant des differents services, feront l'objet d'une centralisation au sein du ministere de l'interieur et de la securite publique dans la perspective de degager une vue d'ensemble du phenomene sur la France et de l'analyser, ce qui permettra d'engager des actions particulieres. Pour ce faire, le ministre de l'interieur et de la securite publique a annonce, lors de la conference de presse qu'il a tenue le 24 septembre 1992, la creation au sein de son ministere, d'une cellule de coordination du renseignement et d'action antimafia aupres du directeur general de la police nationale, l'UCRAM. La convention d'application de l'accord de Schengen impliquant la creation d'un espace commun de libre circulation, prevoit de compenser la levee des controles aux frontieres internes par un certain nombre de dispositions : cooperation entre policiers : developpement des echanges d'informations, droits d'observation et de poursuite que pourront mettre en oeuvre les policiers des Etats membres, pour certaines infractions, et qui leur permettront de franchir sans condition les frontieres internes, pour la poursuite de leurs enquetes - creation du Systeme Informatise Schengen (SIS) qui participera egalement a cette cooperation generalisee - detachements d'officiers de liaison en vue de consolider le dispositif policier. Les Etats parties se sont engages a harmoniser les frequences radio et les materiels de communication. Enfin, sur le plan judiciaire, ils ont aussi degage des solutions, notamment en matiere d'arrestation provisoire aux fins d'extradition, de commissions rogatoires, de perquisitions et de saisine, ainsi que d'extradition pour delits fiscaux. Ces dispositions, dans leur ensemble, vont dans le sens des preoccupations de l'auteur de la question.
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