FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 62452  de  M.   Balkany Patrick ( Rassemblement pour la République - Hauts-de-Seine ) QE
Ministère interrogé :  recherche et espace
Ministère attributaire :  recherche et espace
Question publiée au JO le :  05/10/1992  page :  4583
Réponse publiée au JO le :  04/01/1993  page :  84
Rubrique :  Animaux
Tête d'analyse :  Protection
Analyse :  Experimentation animale
Texte de la QUESTION : M Patrick Balkany appelle l'attention de M le ministre de la recherche et de l'espace sur l'utilisation du test dit « de la dose letale 50 » dans l'experimentation animale. Il s'agit d'un test de toxicite aigue pratique depuis 50 ans sur les animaux. Il consiste a estimer de maniere empirique la dose d'une substance chimique provoquant la mort de 50 p 100 des animaux utilises. Les resultats de ce test sont destines a evaluer la toxicite d'un produit en vue de son utilisation ulterieure par l'homme, en agro-alimentaire, cosmetologie, droguerie et pharmacie, sur des produits tels qu'engrais, pesticides, herbicides, colorants, additifs alimentaires, produits de beaute et d'entretien, etc. Il est procede a des injections en quantite variable par les voies buccale, anale, nasale, dermique, oculaire, parenterale. On fait varier les doses jusqu'a parvenir a des resultats interpretables. Les animaux survivants aux troubles respiratoires, a l'hypertension, aux tremblements, convulsions, ulceres, hemorragies, sont enfin abattus pour analyse des visceres. Ce massacre est abominable et d'autant plus scandaleux que des tests de substitution, in vitro, ont ete mis au point et sont utilises avec une remarquable fiabilite reconnue unanimement par la communaute scientifique les utilisant. Il lui demande donc d'imposer le recours systematique a cette nouvelle methode, bien moins onereuse que l'utilisation d'animaux a la provenance douteuse et la remuneration des trafiquants et exploitants les fournissant. De cette maniere sera apportee enfin la preuve indiscutable d'une volonte de mettre fin a des methodes souvent illegales mais tolerees par les pouvoirs publics, ainsi que l'a montre un proces recent a la cour d'Agen.
Texte de la REPONSE : Reponse. - Il convient d'abord de souligner que le test dit « de la dose letale 50 » (DL 50) n'est realise que sur des rongeurs, jamais sur des chiens, des chats ou des primates. La voie d'administration des produits a tester est essentiellement la voie orale et pulmonaire, la voie parenterale etant limitee aux seuls medicaments. Les autorites administratives concernees se sont penchees sur les modifications qu'il serait possible d'apporter a la methodologie traditionnelle mise en oeuvre pour ce test avec, comme preoccupation majeure, la diminution du nombre d'animaux utilises. Cette reflexion a conduit a des amenagements importants des protocoles experimentaux d'evaluation de la toxicite aigue : la recherche systematique d'une dose letale a ete abandonnee pour les produits ne presentant pas de letalite a la dose de deux mg/kg ; le test se reduit alors a un seul lot d'animaux, generalement des deux sexes pour tenir compte de leur eventuelle difference de sensibilite. Cette evaluation dite « essai a dose limite » est actuellement la plus couramment utilisee pour les produits peu toxiques, et particulierement pour l'ensemble des produits dont on veut seulement connaitre le risque pour l'homme en cas d'ingestion orale ; pour les produits plus toxiques, on a renonce a rechercher une excessive precision au niveau de la valeur de la DL 50. Si la directive du Conseil des Communautes europeennes de 1975 (75/318/CEE) exigeait encore la determination de la DL 50 avec ses limites de confiance a 95 p 100, celle de 1987 (87/176/CEE) indiquait qu'un degre eleve de precision n'etait plus requis. Cette evolution vers une « recherche de dose letale 50 approchee » a permis de reduire environ de moitie la consommation des rongeurs utilises a cet effet. S'agissant des methodes alternatives qui pourraient se substituer a l'emploi de l'animal dans ce domaine, de tres nombreuses recherches ont ete entreprises, aussi bien au niveau national qu'international. Dans le cadre de sa politique en faveur du developpement des methodes in vitro, le ministere de la recherche et de l'espace soutient regulierement et de maniere active de telles etudes. C'est ainsi que, pour la periode 1988-1989, le ministere a lance une action incitative de recherche sur le developpement de methodes in vitro, alternatives aux tests de toxicite aigue effectues sur l'animal, pour un budget global de 2 500 000 F Deux reseaux de laboratoires ont ete crees, regroupant 10 unites de recherche du secteur public et des laboratoires du secteur industriel. Chaque reseau a aborde ces etudes multicentriques selon des axes differents, le premier sur le theme « amelioration des modeles cellulaires et mise au point de nouvelles methodes d'evaluation du signal toxique », et le deuxieme sur « l'etude de l'hepatotoxicite aigue in vitro ». En 1991, le ministere a initie un nouveau programme de recherche intitule « evaluation in vitro de la nephrotoxicite medicamenteuse par l'utilisation de cultures primaires tubulaires proximales de lapin exposees a differents xenobiotiques » pour un budget de 1 000 000 F Participent a ce programme en cours de developpement des laboratoires du secteur public et du secteur prive. Pour 1992, une nouvelle action incitative portant sur « les approches in vitro de l'etude de la toxicologie de l'appareil respiratoire » a ete lancee pour un montant de 1 000 000 F Un bilan des nombreuses methodes alternatives proposees au plan international pour se substituer aux tests conventionnels de toxicite aigue montre qu'actuellement, celles-ci ne peuvent remplacer totalement les essais pratiques sur animaux, pour les raisons suivantes : elles ne sont pas accessibles a tous les types de produits a tester ; elles fournissent des informations tres parcellaires sur l'ensemble du potentiel toxique d'un produit et devraient etre, de ce fait, multipliees pour couvrir les differents mecanismes en cause, tel que permet de l'evaluer l'animal entier ; l'aptitude predictive de n'importe quel systeme alternatif demanderait a etre pleinement validee en regard des donnees obtenues sur l'animal, pour acquerir, non seulement l'approbation scientifique, mais aussi l'approbation administrative. Dans ce contexte, imposer autoritairement le recours systematique a des methodes alternatives, en remplacement total de l'experimentation animale, consituterait une decision lourde de consequence, qui conduirait a accepter le risque d'un accident majeur de sante publique. Les enquetes conduites par le ministere de la recherche et de l'espace montrent a l'evidence que le nombre d'animaux utilises diminue de facon importante. Ceci est lie au fait que les experimentateurs font un usage de plus en plus restreint d'animaux, au fur et a mesure que les methodes alternatives et que les connaissances scientifiques progressent.
RPR 9 REP_PUB Ile-de-France O