FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 62459  de  M.   Gantier Gilbert ( Union pour la démocratie française - Paris ) QE
Ministère interrogé :  jeunesse et sports
Ministère attributaire :  jeunesse et sports
Question publiée au JO le :  05/10/1992  page :  4580
Réponse publiée au JO le :  25/01/1993  page :  315
Rubrique :  Sports
Tête d'analyse :  Rencontres internationales
Analyse :  Rugby. equipe sud-africaine. composition. declaration du ministre
Texte de la QUESTION : M Gilbert Gantier a pris connaissance des declarations, appuyees et renouvelees sur tous les medias, de Mme le ministre de la jeunesse et des sports selon lesquelles elle avait refuse d'honorer de sa presence un match de rugby devant opposer a Bordeaux une equipe francaise a une equipe sud-africaine, au motif que cette derniere ne comprenait aucun joueur de race noire. Au-dela de la crainte que l'on peut legitimement eprouver, apres une telle prise de position, que ce match ne se joue devant des gradins vides de spectateurs, il lui fait observer : 1o qu'au moment ou la Republique d'Afrique du Sud fait des efforts apprecies par l'ensemble de la communaute des nations pour aligner ses pratiques institutionnelles sur celles de l'ensemble des democraties, il est etrange de voir un membre du Gouvernement francais interferer sur un point particulier dans les affaires interieures de ce pays alors qu'au pire moment de l'apartheid le gouvernement socialiste francais n'a jamais juge bon de rompre les relations diplomatiques avec l'Afrique du Sud ; 2o que son comportement, s'il etait imite par les titulaires d'autres departements ministeriels, risquerait de donner au Gouvernement francais un droit de regard sur la composition de delegations sud-africaines appelees a se rendre dans notre pays, qu'il n'y aurait meme aucune raison pour que des appreciations de meme nature ne s'etendent pas aux relations de notre pays avec d'autres nations en fonction de la conception qu'un membre du Gouvernement pourrait avoir de ce que doit etre selon lui - ou elle - la « bonne » representativite de telle ou telle delegation venue de tel ou tel point du globe, qu'a l'inverse certains pays etrangers pourraient a leur tour recuser telle ou telle delegation francaise au motif qu'elle ne repond pas a l'idee que l'on s'y fait de la France ; 3o qu'au surplus la meme equipe de rugby sud-africaine avait, a l'epoque meme de l'apartheid, compris des joueurs de race noire mais que, comme l'a replique l'animateur de cette equipe, il a pour principe de choisir ses joueurs en fonction des resultats qu'il en attend et non pas en fonction de la couleur de leur peau ; 4o que notre conseil constitutionnel, par une decision no 82-146 du 18 novembre 1982, annulant une loi votee a l'initiative du Gouvernement socialiste de l'epoque, a condamne toute politique de quota fondee sur le sexe, la religion, la race, etc. Il lui demande, en consequence, si les declarations qu'elle a faites, avec un effet d'annonce evident et recherche, ressortissent bien d'une conception reflechie et responsable des responsabilites ministerielles.
Texte de la REPONSE : Reponse. - On peut rappeler que le ministre de la jeunesse et des sports a ete personnellement a l'origine de cette tournee. C'est elle en effet qui, des septembre 1991, a confirme son accord pour cette manifestation au president de la federation francaise de rugby, M Albert Ferrasse. Car tout laissait penser a l'epoque que l'Afrique du Sud allait se debarrasser rapidement de l'apartheid. En mars 1992, les federations blanche et noire de rugby s'unissaient et creaient une federation multiraciale, la South African Rugby Football Union (SARFU). Il faut savoir que 83 p 100 de la population sud-africaine est de couleur et qu'il y a plus de 160 000 joueurs de rugby noirs ou metis. La SARFU etait donc autorisee a organiser la tournee de l'equipe sud-africaine a la condition de mettre en place un programme de developpement du sport dans les zones defavorisees. Le ministre francais avait particulierement insiste alors sur la necessaire concretisation de la disparition de l'apartheid avec la mise en place d'equipes multiraciales. Quelques jours seulement avant l'arrivee en France de l'equipe sud-africaine de rugby, il s'averait que la delegation sud-africaine ne se composait que de Blancs, a l'exception de Jacky Abraham, aide-manager de la tournee, que le copresident indien de la SARFU, M Ibrahim Patel, n'avait pas ete invite, alors que le ministre tenait particulierement a sa presence. C'est alors que, devant le manque d'implication suffisante de la SARFU a jouer son nouveau role federateur, le ministre francais charge des sports a decide de ne pas assister aux matches de la tournee. Cette decision est a considerer comme un soutien sans ambiguite au combat des differentes composantes ethniques de l'Afrique du Sud pour la reconnaissance de droits identiques pour tous. L'apartheid a pris des formes tres diverses depuis l'adoption des premieres lois instituant la segregation raciale. Mais c'est surtout parce qu'au nom de ce principe on a pu arreter et mettre a mort des milliers de personnes, que la lutte contre l'intolerance n'a pu et ne pourra jamais se limiter a une simple condamnation de principe par des responsables politiques. Il est de notre devoir d'aider a l'avenement d'une Afrique du Sud nouvelle, unie et democratique, et de contribuer a la disparition de la segregation raciale sous quelque forme qu'elle se presente, fut-elle subtile.
UDF 9 REP_PUB Ile-de-France O