Question au Gouvernement n° 1647 :
Corse

10e Législature

Question de : M. Josselin Charles
- SOC

Question posée en séance, et publiée le 23 mai 1996

M. le president. La parole est a M. Charles Josselin.
M. Charles Josselin. Ma question s'adresse au Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, hier, par ma voix, le groupe socialiste a interpelle votre gouvernement sur la situation en Corse. Sur un sujet aussi grave, j'ai pris soin de decrire une realite qui inquiete legitimement tous ceux qui sont attaches a l'Etat de droit et qui veulent savoir quels sont les moyens reellement mis en oeuvre pour retablir l'ordre public republicain, un ordre public qui a ete de nouveau trouble cette nuit meme par le mitraillage d'une gendarmerie.
M. Toubon n'a pas repondu. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. Jacques Limouzy. Mais si !
M. le president. Mes chers collegues, ne commencons pas !
M. Charles Josselin. Il a choisi l'invective...
M. Richard Cazenave. Vous en redemandez ?
M. Charles Josselin. ... et l'accusation sans preuve. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Mes chers collegues, j'ai ete elu depute pour la premiere fois en 1973. («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. le president. Mes chers collegues, je vous en prie.
M. Charles Josselin. C'est dire que j'ai vu passer un certain nombre de ministres et de gardes des sceaux. Mais je n'imaginais pas, monsieur le Premier ministre, que le numero 2 de votre gouvernement, votre garde des sceaux, puisse tenir dans cette enceinte de tels propos avec autant de hargne. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Les accusations portees contre les gouvernements, les anciens ministres et les parlementaires socialistes sont sans preuve ! Ces accusations, et vous le savez bien, ne sauraient faire oublier le fond: votre incapacite a retablir en Corse l'ordre republicain et a restaurer la-bas le respect de l'Etat. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Plusieurs deputes du groupe du Rassemblement pour la Republique. Et vous, qu'avez-vous fait ?
M. le president. Un peu de calme !
M. Charles Josselin. Mais il est plus facile de s'en prendre a ses predecesseurs, et ce avec d'autant plus de violence que l'accusation que l'on porte contre eux est sans fondement.
M. Jacques Toubon, ministre de la justice, garde des sceaux. La preuve !
M. Charles Josselin. Monsieur le Premier ministre, allez-vous demander a votre garde des sceaux de presenter ses regrets (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique) et les excuses que les socialistes sont en droit d'attendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. le president. La parole est a M. le Premier ministre.
M. Alain Juppe, Premier ministre. Monsieur le president, mesdames, messieurs les deputes, avant d'aborder cette question difficile, je voudrais faire appel au sens de la responsabilite qui, je le sais, se manifeste toujours sur les bancs de cette assemblee lorsque l'essentiel est en jeu.
Nous le devons d'abord a nos compatriotes corses, qui sont inquiets, voire angoisses, et je les comprends. Nous le devons aussi a tous les Francais, qui s'interrogent.
Quels sont les principes qui guident l'action du Gouvernement ? Je voudrais les rappeler brievement.
Tout d'abord, assurer avec determination et perseverance - j'y reviendrai - le respect des lois de la Republique et de l'Etat de droit en Corse. J'ai donne des instructions aux ministres competents, notamment au garde des sceaux et au ministre de l'interieur, qui les appliquent avec loyaute et efficacite. Nous poursuivrons dans cette voie.
Nous avons deja procede, au cours des mois passes, a de nombreuses interpellations et engage de nombreuses procedures. Ce cap sera maintenu ! Mais je preciserai, et chacun le reconnaitra volontiers sur les bancs de cette assemblee, que cette politique prend du temps et que personne n'a la recette miracle qui permettrait, du jour au lendemain, de faire en sorte que le calme absolu revienne sur l'ile.
M. Christian Bataille. Voila ce que M. Toubon aurait du dire hier !
M. le Premier ministre. Nous allons dans cette direction avec determination et avec perseverance.
Deuxieme principe: engager ou maintenir le dialogue avec tous ceux qui respectent les regles de la democratie. Nous dialoguons avec ceux qui ont recu l'onction du suffrage, et qui siegent, quelle que soit leur sensibilite par ailleurs, sur les bancs de l'assemblee de Corse. Nous poursuivrons ce dialogue. («Tres bien !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. Christian Bataille. Avec les cagoules !
M. le Premier ministre. Troisieme principe: nous manifesterons vis-a-vis de la Corse la solidarite de la nation sur le plan economique.
J'ai annonce, il y a quelques semaines, que, parmi d'autres mesures, nous mettrions en place une zone franche. Nous sommes en train d'y travailler. Des reunions techniques ont eu lieu pour la definir et, conformement au calendrier que j'avais indique...
M. Jean-Pierre Balligand et M. Jean-Marc Salinier. Repondez a la question !
M. le president. Je vous en prie, mes chers collegues !
M. le Premier ministre. ... nous fixerons avant la fin du mois de juin les regles applicables et nous vous soumettrons les dispositions legislatives correspondantes.
Telle est notre politique. Ou que je porte le regard, ou que je tende l'oreille, je ne vois ni n'entends aucune reelle proposition reellement alternative.
M. Christian Bataille. Regardez-nous quand vous parlez ! Et repondez a la question !
M. le Premier ministre. Bien entendu, j'admets la necessite d'un echange de vues sur le sujet et je suis a l'ecoute de tous ceux qui voudraient enrichir le debat de propositions ou d'approches nouvelles. C'est dans cet esprit qu'en accord avec les groupes de la majorite de cette assemblee, avec lesquels je m'en suis entretenu ce matin meme, je souhaite qu'ait lieu, dans cet hemicycle comme au Senat, un debat sur la situation en Corse dans les prochains jours et, si possible, des la semaine prochaine.
En terminant, je voudrais exprimer a l'immense majorite de nos compatriotes corses, qui sont inquiets...
M. Christian Bataille. Repondez a la question !
M. le Premier ministre. ... et qui sont attaches a la Republique, la solidarite, je dirai meme la fraternite du Gouvernement. Nous ferons respecter les lois de la Republique, et j'irai le leur dire personnellement en me rendant dans l'ile avant l'ete. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Louis Mexandeau. Le Premier ministre n'a pas repondu a la question !

Données clés

Auteur : M. Josselin Charles

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Collectivites territoriales

Ministère interrogé : Service du Premier Ministre

Ministère répondant : Service du Premier Ministre

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 23 mai 1996

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