Question au Gouvernement n° 1689 :
Politique de la defense

10e Législature

Question de : M. Boyon Jacques
- RPR

Question posée en séance, et publiée le 5 juin 1996

M. le president. La parole est a M. Jacques Boyon.
M. Jacques Boyon. Monsieur le president, monsieur le Premier ministre, mes chers collegues, les relations entre la France et l'OTAN ont toujours ete un point essentiel de la politique exterieure et de la politique de defense de la France, et, depuis le retrait de la France du dispositif integre militaire a l'initiative du general de Gaulle, dont nous nous rappelons tres bien le raisonnement qui l'a conduit a cette decision, nous sommes tres attentifs a l'evolution de ces relations.
Nous avons donc suivi avec attention, monsieur le Premier ministre, les modifications qu'y ont apportees recemment le President de la Republique et votre gouvernement. Nous avons bien compris qu'elles avaient pour but de mieux contribuer a la construction du pilier europeen de defense et a une certaine autonomie de decision et d'action de l'Europe.
Cette attitude realiste, qui nous a semble ne pas remettre en cause les grands principes (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste), a-t-elle apporte, lors de la recente reunion du Conseil de l'Atlantique Nord, les resultats que la France attendait ?
Je souhaiterais, monsieur le Premier ministre, que vous indiquiez a la representation nationale quelles consequences aura ce sommet de Berlin pour notre pays et pour l'Europe, et comment les reformes qui y ont ete decidees seront mises en oeuvre dans les prochains mois. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le Premier ministre.
M. Alain Juppe, Premier ministre. Monsieur le president Boyon, la session ministerielle de l'Alliance atlantique qui s'est tenue a Berlin le 3 juin a abouti a un accord d'une grande portee.
Pour bien la mesurer, je crois qu'il est necessaire de rappeler ce qu'etaient les objectifs du President de la Republique et du Gouvernement. Nous voulions que puisse s'affirmer au sein de l'Alliance atlantique l'identite europeenne en matiere de defense, aussi bien sur le plan politique que sur le plan militaire. Nous avions indique, notamment au mois de decembre dernier, que ce serait a la mesure de l'affirmation de cette identite europeenne que la France pourrait se rapprocher des institutions de l'Alliance atlantique.
L'accord de Berlin est un succes, un succes pour la diplomatie francaise, un succes pour les Europeens...,
Plusieurs deputes du groupe socialiste. Et pour les Americains !
M. le Premier ministre. ... et un succes pour le partenariat entre les Europeens et les Americains. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Quel est, rapidement retrace, le contenu de cet accord ?
Il prevoit d'abord - et c'est une avancee considerable, sauf (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.), bien entendu, pour ceux qui ne veulent pas voir - ...
M. Didier Boulaud. On ne voit rien, helas !
M. le Premier ministre. ... que les Europeens pourront conduire eux-memes avec des «moyens OTAN» des operations sous direction politique et sous conduite strategique de l'Union de l'Europe occidentale: ...
M. Didier Boulaud. Et avec l'accord de Americains !
M. le Premier ministre. ... c'est ce que nous souhaitions, et c'est ce que nous avons obtenu. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise.) La notion d'autonomie europeenne que vous evoquiez est ainsi garantie.
M. Christian Bataille. Vous pliez le genou !
M. le Premier ministre. Deuxiemement, cet accord prevoit qu'au sein des moyens de l'OTAN seront identifies au prealable les moyens qui pourront etre mis a la disposition des Europeens pour ces operations qu'ils conduiraient sous la banniere de l'UEO. Cela peut etre des quartiers generaux, des elements de commandement, des capacites de soutien. C'est ce qu'on appelle les groupes de forces interarmees multinationales: les GFIM.
Troisiemement, l'accord prevoit des arrangements de commandement pour la conduite de ces operations placees sous l'autorite de l'UEO et, enfin, la planification et l'entrainement, des le temps de paix, de ces moyens, qui pourront donc etre ainsi utilises par ce que vous avez appele le «pilier europeen» de l'Alliance atlantique.
Quand on analyse la portee de ces innovations, on se rend compte que les proces d'intention faits par quelques psycho-rigides ou nostalgiques du passe (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste) sur la pretendue reintegration du dispositif integre de l'Alliance ne correspondent a aucune realite. (Exclamations sur les memes bancs.)
Je n'ai designe personne ! (Sourires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaises et du Centre.)
En realite, c'est une nouvelle organisation de l'alliance atlantique qui est en train de se mettre en place. C'est la raison pour laquelle la France, forte de ce succes, peut maintenant concretiser son engagement de rapprochement vis-a-vis de cette alliance nouvelle.
Beaucoup reste naturellement a faire.
M. Christian Bataille. Vous vous etes soumis !
M. le Premier ministre. Il reste notamment a mettre en place concretement les fameux GFIM, dont j'ai parle. Cela sera examine lors d'une prochaine reunion a Bruxelles des ministres de la defense, a laquelle participera Charles Millon, le 13 juin prochain. Il nous reste egalement a adapter les commandements de l'OTAN.
Je pense que tout cela sera mis en place pour le Conseil atlantique de la fin de cette annee 1996. Ainsi, la diplomatie francaise et le President de la Republique auront atteint un des grands objectifs de leur politique etrangere. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)

Données clés

Auteur : M. Boyon Jacques

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Defense nationale

Ministère interrogé : Service du Premier Ministre

Ministère répondant : Service du Premier Ministre

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 5 juin 1996

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