Greve
Question de :
M. Rousset-Rouard Yves
- UDF
Question posée en séance, et publiée le 3 octobre 1996
M. le president. La parole est a M. Yves Rousset-Rouard.
M. Yves Rousset-Rouard. Ma question s'adresse a M. le Premier ministre, et plus particulierement a M. le ministre de la fonction publique, de la reforme de l'Etat et de la decentralisation. Elle concerne l'exercice du droit de greve dans les services publics. Vous comprendrez qu'il s'agit donc d'une question d'actualite mais aussi d'une question de fond.
La France a subi avant-hier une greve importante dans l'education nationale. Elle en subit une aujourd'hui dans la SNCF,...
Un depute du groupe du Rassemblement pour la Republique. C'est scandaleux !
M. Yves Rousset-Rouard. ... et les syndicats annoncent une greve plus large pour le 17 octobre, souhaitant, a l'evidence, une paralysie de l'economie francaise.
Au-dela des preoccupations ou des inquietudes des personnels, on peut s'interroger sur la banalisation du droit de greve dans les services publics dont l'exercice devrait etre exceptionnel, a plus forte raison si les journees de greve sont payees. En effet, la garantie de l'emploi par l'Etat suppose la continuite du service public et sa neutralite politique.
Je tiens a vous rappeler, monsieur le ministre, que j'ai depose avec 160 deputes UDF et RPR, le 9 fevrier 1996, une proposition de loi tendant a instaurer, a l'instar d'autres pays europeens, le vote a bulletin secret des agents ou fonctionnaires concernes pour qu'une greve ne soit pas la consequence d'un mot d'ordre general mais d'une reflexion responsable de chaque salarie avant tout depot de preavis de greve de poursuite ou d'interruption du travail. («Tres bien !» sur plusieurs banc du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
En l'absence d'un service minimum legalise, les greves a repetition affaiblissent l'autorite de l'Etat, et par consequent du Gouvernement, deconsiderent les services publics et portent un prejudice considerable aux usagers et a l'economie de notre pays.
Mme Martine David. C'est vous qui paralysez l'economie du pays !
M. Yves Rousset-Rouard. Les Francais peuvent-ils esperer que cette proposition de loi soit discutee par le Parlement sans attendre des troubles comparables a ceux de l'annee derniere ?
La confiance que vous appelez de vos voeux, ici et ailleurs, passe aussi et surtout par des mesures simples et de bon sens sans contrepartie fiscale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de la fonction publique, de la reforme de l'Etat et de la decentralisation.
M. Dominique Perben, ministre de la fonction publique, de la reforme de l'Etat et de la decentralisation. Je precise d'abord, pour que le debat soit bien clair, qu'il ne vient a personne l'idee de remettre en cause le droit de greve, en particulier dans la fonction publique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Maintenant, venons-en au texte de votre proposition de loi dont je ne crois pas inutile de dessiner tres rapidement les contours.
Son champ d'application est tres large puisqu'elle concerne non seulement la fonction publique de l'Etat, mais aussi les fonctions publiques territoriale, hospitaliere, et d'une maniere generale le personnel des entreprises qui gerent, par exemple a travers des concessions, des services publics. Cela merite d'etre rappele.
Il me parait indispensable, en prealable a une eventuelle discussion, de se poser un certain nombre de questions.
D'abord, juridiquement, la greve etant un droit individuel qui appartient a chaque salarie, un vote obtenu a la majorite dans une entreprise ou dans un service peut-il empecher un individu ou un petit groupe d'individus d'exercer ce droit de greve ? C'est une question importante qui, a mon avis, est de nature constitutionnelle.
Ensuite, je vous rappelle que pour assurer la continuite du service public - mais vous le savez puisque nous en avons discute - nous disposons de moyens, soit individuels, comme la requisition, soit plus generaux grace a la jurisprudence Dehaene pour faire respecter l'imperatif de continuite si la securite du citoyen est en jeu.
Mais votre proposition de loi souleve d'autres interrogations.
Qui aurait en charge l'organisation des scrutins ? Comment les organiser ? Et comment les votes pourraient-il etre verifies pour etre consideres par tous comme valables ? Qui prendrait l'initiative de cette organisation ? Serait-ce le chef d'entreprise...
M. Didier Boulaud. Quelle blague !
M. le ministre de la fonction publique, de la reforme de l'Etat et de la decentralisation. ... ou le chef de service ? Quel serait le role des organisations syndicales ? Il me parait indispensable, si l'on veut aller plus loin dans l'examen de cette proposition, de repondre a toutes ces questions.
Quant a un pretendu paiement des jours de greve, monsieur Rousset-Rouard, que les choses soient bien claires: les jours de greve de decembre dernier n'ont ete payes dans aucun service public ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. Jean-Pierre Balligand. Que l'on vote a bulletin secret dans la majorite !
Auteur : M. Rousset-Rouard Yves
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Secteur public
Ministère interrogé : fonction publique, réforme de l'état et décentralisation
Ministère répondant : fonction publique, réforme de l'état et décentralisation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 octobre 1996