Politique fiscale
Question de :
M. Fanget Michel
- UDF
Question posée en séance, et publiée le 17 octobre 1996
M. le president. La parole est a M. Michel Fanget.
M. Michel Fanget. Ma question s'adresse a M. le ministre de l'economie et des finances.
La France a un besoin vital de reformes, chacun en a conscience. Cependant, cette demarche se heurte a une somme d'interets particuliers d'ou il apparait difficile de degager l'interet general, dont les elus sont comptables. Dans ce cadre, la grande reforme de notre systeme fiscal annoncee par le Gouvernement engendre des reactions extremement vives, en particulier chez les journalistes, qui refusent la suppression de l'abattement forfaitaire supplementaire de 30 % dont ils beneficient. Cette question sera effectivement debattue au Parlement dans les jours qui viennent. La profession s'est manifestee de facon extremement pressante aupres des parlementaires, exigeant le rejet pur et simple de cet amenagement.
L'operation «homme invisible», qui consiste a exclure de leurs colonnes, dans les textes et les photos qui les illustrent, tous les parlementaires qui n'auraient pas indique par ecrit leur intention de s'y opposer, a deja commence dans plusieurs quotidiens regionaux francais.
M. Arthur Dehaine. C'est scandaleux !
M. Michel Fanget. Meme si cette methode est tres discutable sur le plan deontologique, - elle a d'ailleurs ete condamnee par le syndicat de la presse quotidienne regionale -,...
M. Arthur Dehaine. C'est vrai !
M. Michel Fanget. ... elle exprime toutefois, dans cette periode de crise, une inquietude tres comprehensible.
Ne serait-il pas possible, monsieur le ministre, d'envisager, dans le cadre d'une concertation tout a fait necessaire avec la profession, un amenagement plus souple, peut-etre differe, permettant en particulier de proteger les revenus les plus faibles ?
M. Arthur Dehaine. Tres bien !
M. Michel Fanget. Pouvez-vous indiquer a la representation nationale les intentions du Gouvernement sur ce probleme delicat, a propos duquel les parlementaires sont sollicites regulierement et penalises ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'economie et des finances.
M. Jean Arthuis, ministre de l'economie et des finances. Monsieur le depute, il est vrai qu'il n'est pas commode de conduire des reformes. Mais est-il pire risque pour une societe que l'immobilisme ? Le parti qu'a pris le Gouvernement, c'est celui de la reforme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Didier Boulaud. C'est Juppe qu'il faut reformer !
M. le ministre de l'economie et des finances. Nous avons decide de mettre en oeuvre une reforme fondamentale, celle de l'impot sur le revenu des personnes physiques. Elle est au coeur de la discussion du projet de loi de finances pour 1997, qui s'est engagee hier apres-midi devant l'Assemblee nationale.
Nous allons pouvoir ainsi alleger le poids de l'impot pour ceux qui travaillent, pour ceux qui investissent, pour ceux qui assument des responsabilites, ...
Plusieurs deputes du groupe socialiste. Pour les riches !
M. le ministre de l'economie et des finances. ... pour ceux qui creent de la richesse et des emplois. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le president. Un peu de calme, mes chers collegues !
M. le ministre de l'economie et des finances. Nous parvenons, dans ces conditions, a simplifier l'impot et a faire disparaitre un certain nombre de niches et d'avantages historiquement dates.
Les menaces dont vous faites etat - si elles devaient etre fondees - sont proprement scandaleuses. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Plusieurs deputes du groupe socialiste. Il a du prendre du valium ! (Sourires.)
M. le ministre de l'economie et des finances. Il est inconcevable que la representation nationale soit mise ainsi sous pression ! Nous ne pouvons pas nous accommoder de telles pratiques dans une democratie et nous devons denoncer de telles menaces ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Le Parlement ne peut deliberer sous la pression des marchands d'influence quels qu'ils soient. (Applaudissements sur les memes bancs).
Mme Frederique Bredin. Et les lobbies de l'argent ?
M. Christian Bataille. M. Arthuis est un matamore !
M. le ministre de l'economie et des finances. S'agissant des journalistes, j'ai cite hier le cas du salarie celibataire qui gagne 9 000 francs par mois. Je considererai aujourd'hui, pour introduire une variante, celui du salarie celibataire qui percoit 7 000 francs par mois. Ce dernier, s'il est journaliste, est exonere de l'impot sur le revenu des personnes physiques. S'il n'est pas journaliste, il acquitte un impot de 5 800 francs.
Au terme de la reforme, c'est-a-dire au bout de cinq annees de suppression progressive de l'avantage que constitue l'abattement supplementaire, cette personne, qu'elle soit ou non journaliste, acquittera un impot de 2 700 francs. Ainsi, a salaire egal, le journaliste paiera 2 700 francs de plus et celui qui ne l'est pas paiera 3 100 francs de moins. La question qui se pose renvoie au principe d'egalite du citoyen devant l'impot.
Monsieur le depute, j'ai bien note votre souci d'apporter des apaisements. Nous y travaillons, a la demande de M. le Premier ministre. J'indique des a present que, s'agissant des journalistes, les dispositions dont il s'agit n'interviendraient que dans la deuxieme annee afin que le systeme soit mis dans sa plenitude des la premiere («Ah !» sur les bancs du groupe socialiste) sans que l'on touche aux avantages de cette profession. Puisqu'il s'agit de dispositions concernant 1998 et au-dela, et non pas 1997, nous en discuterons, au debut du mois de novembre, lors de l'examen des dispositions de la deuxieme partie de la loi de finances. Il nous reste donc quelques semaines pour en parler et mener a bien une concertation. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Auteur : M. Fanget Michel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impot sur le revenu
Ministère interrogé : économie et finances
Ministère répondant : économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 octobre 1996