Transporteurs
Question de :
M. Daubresse Marc-Philippe
- UDF
Question posée en séance, et publiée le 28 novembre 1996
M. le president. La parole est a M. Marc-Philippe Daubresse.
M. Marc-Philippe Daubresse. Ma question s'adresse a M. le ministre de l'equipement, du logement, des transports et du tourisme; elle concerne l'evolution de la negociation, qui a encore dure une bonne partie de la nuit et de la matinee, dans le secteur du transport routier.
Monsieur le ministre, Anne-Marie Idrac et vous-meme avez souligne hier, a juste titre, l'action menee par le Gouvernement pour favoriser une solution equilibree de ce conflit. La nomination par vos soins d'un mediateur pour rapprocher les points de vue, ainsi que les avancees considerables qui ont ete realisees cette semaine, et tout particulierement cette nuit, en ce qui concerne les retraites, demontrent, s'il en etait besoin, le sens de la responsabilite du Gouvernement dans cette affaire.
La proposition du groupe UDF, lors du debat sur la loi de finances, de geler l'augmentation de la TIPP aurait peut-etre pu contribuer utilement a attenuer la portee de ce conflit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.) Mais chacun a compris, a cette occasion, qu'il s'agissait d'un conflit de nature exceptionnelle, caracterise par l'absence de marges de manoeuvre financieres des entreprises de transport routier, a la difference du conflit de 1992, ou etaient en cause la carence de la politique des transports du gouvernement socialiste de l'epoque et l'absence de dialogue social. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Depuis lors, les gouvernements Balladur et Juppe ont mis en place un contrat de progres, ce que d'autres gouvernements n'avaient pas su faire. Aujourd'hui, c'est l'application inegale dans les entreprises de cet accord social sur les temps de service et, parallelement, la degradation des prix sous la pression de la concurrence europeenne qui ont largement contribue a cette explosion brutale.
Pourriez-vous, monsieur le ministre, faire le point sur les progres qui ont ete enregistres au cours des dernieres heures et, en meme temps, parce que c'est important pour l'avenir, nous eclairer sur les consequences financieres de cette negociation ?
Ne croyez-vous pas que la veritable avancee sociale consisterait a faire appliquer par toutes les entreprises francaises et europeennes les memes regles du jeu pour assainir le marche ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
L'Europe du transport marchand ne doit pas oublier le social. Ne pensez-vous pas, dans ces conditions, qu'il faut harmoniser les legislations du droit du travail (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et multiplier les controles, comme la France s'y efforce depuis plusieurs mois a Bruxelles ?
Bref, que compte faire le Gouvernement pour eviter, demain, que la prise en compte dans les charges des entreprises des legitimes revendications sociales des travailleurs de la route ne se retourne pas a terme contre l'emploi de tout ce secteur, hautement strategique pour l'economie de la France ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'equipement, du logement, des transports et du tourisme.
M. Bernard Pons, ministre de l'equipement, du logement, des transports et du tourisme. Monsieur Daubresse, vous avez raison d'evoquer ce probleme difficile. Le transport routier est indispensable a l'economie de notre pays. Il regroupe 35 000 entreprises, dont beaucoup de petite taille, qui travaillent dans de rudes conditions et dans un secteur particulierement vulnerable, avec 330 000 salaries dont 200 000 chauffeurs.
C'est en effet sous le gouvernement de M. Balladur que M. Bernard Bosson, assiste par Mme Idrac, a mis en place le contrat de progres, avancee considerable. Je tiens a lui rendre hommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique sur quelques bancs.) Sur la base de ce contrat, de nombreux chefs d'entreprise se sont engages dans une voie responsable mais difficile.
Aujourd'hui, vous l'avez souligne, le probleme est different en raison d'un environnement international et europeen particulierement contraignant.
Quelles ont ete les avancees enregistrees au cours des dernieres heures ?
Depuis que la crise a eclate, Mme Idrac et moi-meme avons ete constamment en relation avec les federations patronales et les organisations syndicales. Au cours de ces dernieres heures, j'ai entendu des propos tendant a faire porter la responsabilite sur les uns ou sur les autres. Je crois qu'on a tort. Il y a des patrons dont la situation est difficile et des salaries dont la situation est tres difficile. (Applaudissements sur les quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
C'est ce qui rend la tache du Gouvernement plus difficile egalement. La voie est etroite et il a tout fait pour aider les uns et les autres a trouver un accord.
Cette nuit, grace a la qualite du mediateur que Mme Idrac et moi-meme avions designe, M. Robert Cros, qui a fait preuve de beaucoup de competence, de responsabilite et de calme, la negociation, malgre les conditions tres delicates dans lesquelles elle se deroulait, a enregistre des progres considerables pour la retraite a cinquante ans («Tres bien !» et applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) ... pardon, a cinquante-cinq ans, qui semble desormais faire l'objet d'un accord general.
Des progres ont egalement ete realises pour la diminution des temps de travail.
Reste le probleme des remunerations. Nous poursuivons nos efforts pour que, des la reprise des negociations, a seize heures, ce troisieme point soit au coeur des entretiens et que l'on puisse aboutir tres vite a un accord.
Vous souhaitez, monsieur Daubresse, que toutes les entreprises, francaises et europeennes, s'engagent dans le contrat de progres. Vous avez raison mais, malheureusement, malgre tous nos efforts, nous ne pouvons pas les y contraindre, car si certaines le peuvent, d'autres ne le peuvent pas, et il ne faut pas leur jeter la pierre. Je le repete, ces 35 000 entreprises representent 330 000 emplois. Si nous les tuons, nous allons tuer l'emploi.
Vous preconisez egalement l'harmonisation des charges sociales au niveau europeen. Cette negociation avait deja ete entreprise par M. Bosson. Mme Idrac s'est consacree a ce travail, ces derniers temps, a Bruxelles et a Luxembourg. Nous poursuivons nos efforts et nous progressons, mais c'est extremement difficile.
Dans un equilibre precaire, avec des entreprises en difficulte et des salaries qui connaissent des conditions de travail difficiles, la negociation avec les partenaires sociaux progresse egalement. Nous sommes, je le crois sincerement, sur le point d'aboutir a la fin de ce conflit dramatique pour l'economie de notre pays. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Auteur : M. Daubresse Marc-Philippe
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Transports routiers
Ministère interrogé : équipement, logement, transports et tourisme
Ministère répondant : équipement, logement, transports et tourisme
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 28 novembre 1996