Delocalisations
Question de :
M. Gremetz Maxime
- COM
Question posée en séance, et publiée le 5 décembre 1996
M. le president. La parole est a M. Maxime Gremetz.
M. Maxime Gremetz. Ma question s'adresse a M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications.
En Picardie: delocalisation de Schlumberger, Delsey, Bebe Confort, Curver, Essilor, etc.
Dans l'Indre-et-Loire: delocalisation de Tampax, de Sprague.
Dans le Maine-et-Loire: delocalisation d'Ampafrance.
Dans l'Aube: delocalisation de Cycleurope International, de la fabrication textile habillement, de Devanlay.
Dans le Rhone: delocalisation de Bally, d'une fabrication de Rhone-Poulenc.
En Meurthe-et-Moselle: delocalisation de JVC.
Dans l'Aude: delocalisation de la fabrication de chaussures.
Dans l'Indre: delocalisation de marche public par Balsan.
Dans le Calvados: delocalisation de Moulinex.
Dans le Loiret: delocalisation de production d'Hutchinson, de CESA.
Delocalisations et plans de licenciements, on n'entend que ces mots dans toutes les regions. Des dizaines de milliers d'emplois sont concernes dans toute la France. Ces groupes delocalisent uniquement pour faire du profit, pour aller exploiter les enfants ailleurs. Ils ont en commun une situation financiere exceptionnellement bonne. Ils ont recu des fonds publics par milliards, mais ceux-ci servent a delocaliser, a supprimer des emplois, pour le profit et la seule rentabilite financiere. Tant pis pour les salaries ! Tant pis pour l'emploi ! Tant pis pour la France !
La responsabilite du Gouvernement est pleinement engagee. Il peut et doit dire non. Il en a les moyens. Il en a l'autorite. Il lui faut la volonte.
Je vous demande, monsieur le ministre, de dire non a ces delocalisations, de les suspendre, de prendre des mesures pour faire annuler ces plans de suppression d'emplois. Les delocalises de toute la France ont enrichi une proposition de loi que notre groupe a deposee.
Monsieur le ministre, le Gouvernement va-t-il enfin mettre a l'ordre du jour de nos debats, et en urgence, une loi anti-delocalisations ? N'attendez-pas que, comme l'ont fait les routiers ou les salaries de Thomson soutenus par la majorite du peuple francais, on vous y oblige. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications.
M. Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Monsieur le depute, vous me demandez d'interdire les delocalisations. Je sais quels problemes accompagnent l'evolution de toutes ces entreprises et leur adaptation aux conditions du marche. Mais je crois que vous vous faites une idee fausse de l'economie francaise. Vous croyez qu'elle peut s'organiser a l'abri de la ligne Maginot ou du mur de Berlin.
M. Maxime Gremetz. Allons, allons !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Vous devez pourtant vous souvenir de la facon dont cela s'est termine !
Aujourd'hui, l'economie francaise doit d'abord preserver les courants d'investissements qui existent a l'interieur de notre pays. Je vous rappelle que la France occupe la troisieme place dans le monde pour l'accueil des investissements venant de l'etranger et la quatrieme pour les investissements realises a l'etranger, et que la part des investissements consacres aux delocalisations est marginale dans ce courant.
Ensuite, a vous entendre, il faudrait remettre en cause les echanges. Je vous rappelle tout de meme que, en valeur, notre production industrielle est exportee pratiquement a 100 %, et qu'un quart des salaries francais dependent de l'exportation.
En face du probleme que pose l'adaptation des entreprises a l'evolution du marche, il y a trois attitudes possibles.
La votre, qui consiste a dire que rien ne doit bouger.
M. Maxime Gremetz. Caricature !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. En l'adoptant, monsieur Gremetz, vous condamnez a mort les entreprises, qui doivent s'adapter au marche et aux conditions de la concurrence.
Deuxieme attitude, la delocalisation generalisee, en particulier le «zero emploi industriel». Je la condamne de la meme maniere.
La troisieme attitude, celle du Gouvernement, consiste a rechercher le meilleur equilibre entre la protection et le maintien de l'emploi industriel et la competitivite des entreprises. A cela, il faut deux conditions: que les regles de la concurrence soient loyales et appliquees par tous a l'exterieur de l'espace europeen - et l'Europe a interet a se montrer moins naive, a utiliser davantage les armes de la defense commerciale face a la concurrence deloyale. Ensuite, que ces memes regles soient respectees a l'interieur de l'espace europeen lui-meme, en particulier en mettant fin aux manipulations monetaires et au dumping social qui sont en train de s'y developper ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Auteur : M. Gremetz Maxime
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : industrie, poste et télécommunications
Ministère répondant : industrie, poste et télécommunications
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 1996