OMC
Question de :
M. Durand Georges
- UDF
Question posée en séance, et publiée le 18 décembre 1996
M. le president. La parole est a M. Georges DURAND
M. Georges Durand. Ma question s'adresse a M. le ministre delegue aux finances et au commerce exterieur.
Un grand magazine feminin, a l'occasion des fetes de Noel, a publie un excellent article au titre evocateur: «Quand vos vetements sont fabriques made in esclavage». Il y denonce l'exploitation des travailleurs - plus particulierement des femmes et des enfants - dans de nombreux pays, notamment les pays en voie de developpement.
Savez-vous que, sur une paire de baskets de marque «Nike» vendues 720 francs, 12 francs seulement reviennent aux travailleurs, contre plus de 350 aux intermediaires ? Et je pourrais multiplier les exemples, compris dans les ateliers clandestins de Paris.
Malgre cela, au terme de la reunion de Singapour a laquelle vous avez participe, les pays en voie de developpement ont encore refuse l'application de la clause sociale qui impose le respect de normes sociales fondamentales et celui des droits minimaux des travailleurs.
Que compte faire le Gouvernement pour que l'Organisation mondiale du commerce accepte enfin l'instauration de cette clause sociale ?
Dans l'immediat, comment contenir les importations de produits qui proviennent d'une exploitation humaine intolerable et qui font, en outre, une concurrence deloyale a nos entreprises ?
Pourquoi ne pas sensibiliser le consommateur sur l'origine des produits manufactures et plus particulierement sur leurs conditions de fabrication ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le ministre delegue aux finances et au commerce exterieur.
M. Yves Galland, ministre delegue aux finances et au commerce exterieur. Monsieur le depute, vous venez d'exprimer et de synthetiser les raisons pour lesquelles la clause sociale devait etre a l'ordre du jour de la reunion de l'Organisation mondiale du commerce a Singapour.
Un grand nombre de pays ne le souhaitaient pas. Ce fut le debat le plus important de la derniere semaine et toutes les delegations furent amenees a s'exprimer a ce propos.
Un grand nombre de pays ne voulaient pas non plus que figure dans la declaration finale de Singapour une reference a cette clause sociale. Or un paragraphe entier concerne la clause sociale et fut vote par tous les pays. Il commence par: «Nous relevons notre engagement d'observer les normes du travail fondamental internationalement reconnues» et se conclut sur: «A cet egard, nous notons que les secretariats de l'Organisation mondiale du commerce et de l'OIT continueront de collaborer, comme ils le font actuellement». Cela signifie qu'il est desormais cree un lien structurel entre l'OIT et l'OMC.
D'ailleurs, les syndicats ne s'y sont d'ailleurs pas trompes. Ce matin, Bill Jordan, secretaire general de la Confederation internationale des syndicats libres - a laquelle participent de grands syndicats francais - expliquait dans une interview que commerce et droits sociaux ne peuvent desormais plus etre dissocies.
Parlant au nom de la France, j'ai souleve le probleme en evoquant l'esclavage des enfants: on ne peut pas, dans le meme temps, discuter de ce probleme a l'OMC et refuser de signer la convention sur les enfants a l'OIT. A ce stade, trente-deux pays seulement sur cent-vingt-huit l'ont signee. Desormais, nous nous ferons extremement pressants pour que le debat ait lieu au sein de l'OMC et que les conventions sur les enfants et sur le travail soient signees par tous a l'OIT.
Mesdames, messieurs les deputes, la France a toujours ete un symbole et une reference en matiere de droits de l'homme. Elle est et elle restera a la pointe du combat pour le respect des droits de l'homme et de l'enfant au travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
Auteur : M. Durand Georges
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Organisations internationales
Ministère interrogé : finances et commerce extérieur
Ministère répondant : finances et commerce extérieur
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 décembre 1996