Politique de la defense
Question de :
M. Quilès Paul
- SOC
Question posée en séance, et publiée le 19 décembre 1996
M. le president. La parole est a M. Paul Quiles.
M. Paul Quiles. Monsieur le Premier ministre, voici un an la France, sous votre impulsion et celle du President de la Republique, a decide de reintegrer les structures militaires de l'OTAN, afin, nous a-t-on dit, d'etablir un vrai partenariat avec les Etats-Unis et de construire un pilier europeen de la defense.
Un an plus tard, force est de constater que les resultats sont tres loin d'etre a la hauteur des esperances. Ainsi, avec les Etats-Unis, les relations n'ont jamais ete aussi execrables. Je passe rapidement sur l'episode un peu ridicule du toast a Warren Christopher, qui n'a pas grandi, on peut le dire, notre ministre des affaires etrangeres. (Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
A l'ONU, vous avez capitule lors de la designation du successeur de Boutros Boutros-Ghali...
M. Jean-Yves Le Deaut. C'est vrai !
M. Paul Quiles. ... reussissant l'exploit de passer d'une majorite de quatorze contre un a une position isolee de un contre quatorze !
A l'OTAN, vous allez aussi probablement capituler sur l'affaire du commandement Sud, apres en avoir fait imprudemment une question de principe. Quant au pilier europeen de defense, notre reintegration dans l'OTAN en a malheureusement dissipe toute perspective.
Certes, le President de la Republique a annonce recemment, avec le chancelier Kohl, un nouveau concept, une nouvelle doctrine de defense franco-allemande, mais nous n'en connaissons actuellement rien, a tel point qu'on se demande si elle n'est pas classee secret defense !
Le probleme, monsieur le Premier ministre, est que la France est moins respectee dans le monde (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre) et que le volontarisme verbal du Gouvernement francais fait sourire dans les capitales etrangeres, pendant que les Etats-Unis regnent en maitres sur le monde.(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. le president. Monsieur Quiles, posez votre question.
M. Paul Quiles. Entre nous, monsieur le Premier ministre, ne trouvez-vous pas que ce discredit, pour ne pas dire ce fiasco diplomatique, est calamiteux pour notre pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. le president. La parole est a M. le ministre des affaires etrangeres.
M. Herve de Charette, ministre des affaires etrangeres. Monsieur le depute, votre question - si l'on peut appeler cela une question - comporte deux elements: l'un serieux, auquel je vais repondre d'abord, et un autre sur lequel je ne vais pas manquer de vous dire quelques mots.
La question serieuse est celle de savoir si nous faisons bien de tenter de moderniser et de renover l'Alliance atlantique. La reponse est oui, evidemment. Cette decision ne date d'ailleurs pas de 1995, mais de 1994, mais il est vrai que le present gouvernement, sur instruction du President de la Republique et du Premier ministre, a pris la decision de proposer aux autres pays de s'engager a fond dans la renovation des structures militaires de l'Alliance, annoncant meme que, si cette negociation aboutissait a des resultats satisfaisants, la France pourrait prendre toute sa place dans des structures renovees.
M. Henri Emmanuelli. Voyons !
M. le ministre des affaires etrangeres. Tel est l'objectif; il est tres precis et tres clair. Evidemment, les discussions ne sont pas simples, mais nous avons fait enormement de progres depuis un an. Il reste quelques questions a resoudre; ce sera le travail des mois a venir. Dans tout cela, nous servons l'interet de la nation.
Cela etant, j'ai ete fort choque par certains de vos propos. Vous avez cru de bon ton de soutenir ici, a propos d'un incident en effet grotesque, entierement manipule par certains milieux americains qui en sont a l'origine, la these que ces derniers defendent. Cela est particulierement etrange. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Nous devrions au contraire etre tous solidaires pour defendre la respectabilite de la France, non pas la mienne, mais celle de la nation.
J'ai egalement ete choque de vous voir ricaner au micro, dans votre fonction de parlementaire de la Republique, sur la diplomatie francaise.
M. Andre Fanton. La voix de l'Amerique !
M. le ministre des affaires etrangeres. En effet, il s'agit d'un domaine dans lequel nous devrions etre ensemble plutot que les uns contre les autres. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Franchement, tout cela est assez miserable. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Quilès Paul
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Defense nationale
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 19 décembre 1996