Politique monetaire
Question de :
M. Guillaume François
- RPR
Question posée en séance, et publiée le 19 février 1997
M. le president. La parole est a M. Francois Guillaume.
M. Francois Guillaume. Monsieur le ministre de l'economie et des finances, sous l'impulsion des pays industrialises, la France, l'Europe et les Etats-Unis notamment, le monde s'est engage dans une vaste entreprise de liberalisation des echanges. A cette fin, plusieurs cycles de negociations commerciales ont contribue a reduire les protections tarifaires et non tarifaires qui constituent autant d'obstacles au developpement du commerce international.
Paradoxalement, le dumping monetaire, qui cree des distorsions de concurrence autrement plus nefastes que les droits de douane, n'a guere ete combattu. C'est ainsi que la sous-evaluation du dollar, qui assure aux Etats-Unis une competitivite artificielle, y a favorise croissance, emploi et commerce exterieur et ce au detriment de leurs concurrents.
Or, apres une longue periode de sous-evaluation, le dollar a repris en quelques mois 20 % sur le deutschemark et le franc. C'est a ce moment precis que les ministres de l'economie et des finances des sept pays les plus riches du monde se sont reunis pour decider de stabiliser le dollar a cette parite, a la deception - je dois le dire - des milieux economiques francais et meme allemands, qui considerent que le bon niveau du dollar se situe entre 6 francs et 6,50 francs. L'argument qui a ete invoque est la crainte que, apres cette poussee de fievre, la devise americaine ne retombe a ses niveaux anterieurs.
Monsieur le ministre, comment peut-on justifier une telle decision ?
Par quelles interventions la communaute internationale entend-elle stabiliser le dollar ?
Quelles garanties, enfin, avez-vous obtenues pour que ce seuil soit au moins respecte ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'economie et des finances.
M. Jean Arthuis, ministre de l'economie et des finances. Monsieur Guillaume, vous avez raison de souligner que les distorsions de parites monetaires peuvent avoir des effets infiniment plus corrosifs que les contraintes douanieres ou reglementaires.
Au mois d'avril 1995, on ne cessait de deplorer le niveau excessivement faible du dollar par rapport aux autres monnaies, en particulier aux monnaies europeennes continentales. A l'issue de chacun des G7 qui se sont tenus depuis, je n'ai cesse d'affirmer que le dollar devait s'apprecier. Au niveau ou il etait au mois d'avril 1995 - un dollar valait 4,80 francs et, la plupart du temps, il etait inferieur a 5 francs -, notre propre croissance subissait une alteration de l'ordre d'un demi-point.
Nous venons de constater que, depuis plusieurs mois, le dollar s'etait enfin apprecie. Lorsque nous nous sommes reunis a Berlin, il y a dix jours, nous nous en sommes rejouis. Nous n'avons pas pris de decision. Nous avons exprime le souhait que cette parite soit consolidee.
Pour ma part, ce que je souhaite c'est, bien sur, un dollar fort, mais, plus encore, un dollar robuste, c'est-a-dire que cette parite tienne, qu'elle soit durable. Nous avons besoin de stabilite. Nous avons, en particulier, besoin de taux d'interet stables.
Il y a moins de six mois, a la tribune de l'Assemblee, M. le Premier ministre exprimait le souhait que les taux d'interet a dix ans passent en dessous de 6 %. Puis-je vous indiquer, mesdames, messieurs les deputes, que, aujourd'hui, les taux a dix ans sont a 5,37 % ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Ce qu'il nous faut, c'est donc a la fois une parite stable du dollar par rapport aux autres monnaies et le maintien de nos taux d'interet aux niveaux les plus bas possibles pour que l'argent cher soit derriere nous et que nos compatriotes - familles, entreprises, collectivites territoriales - puissent ainsi emprunter dans des conditions equitables, et donc contribuer, eux-aussi, a l'investissement, a la croissance et a l'emploi.
Nous devons aujourd'hui nous rejouir que le dollar se soit apprecie sans que nous ayons modifie la parite entre le deutschemark et le franc francais. Voila un motif de satisfaction !
Il faut que le dollar soit fort, qu'il soit robuste et durablement robuste sans porter atteinte au niveau historiquement faible de nos taux d'interet. C'est ainsi que nous creerons des emplois. (Applaudissements sur divers bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Guillaume François
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique economique
Ministère interrogé : économie et finances
Ministère répondant : économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 février 1997