Peines
Question de :
M. Marsaud Alain
- RPR
Question posée en séance, et publiée le 26 février 1997
M. le president. La parole est a M. Alain Marsaud.
M. Alain Marsaud. Ma question s'adresse prioritairement a M. le garde des sceaux, ministre de la justice. S'y associent MM. Hunault et Voisin.
Monsieur le garde des sceaux, l'horreur de l'assassinat abominable de quatre jeunes filles pose le recurrent et, j'allais dire, eternel probleme des liberations anticipees d'auteurs de crimes sexuels ou d'homicides.
Nous avons tous ici une pensee pour ces jeunes victimes et leurs familles dont le martyre est porte publiquement a la connaissance de tous nos concitoyens.
Les auteurs presumes de ces crimes - je dis bien presumes - auraient beneficie de mesures de liberation anticipee apres avoir purge une partie de leur peine pour des faits de viol et d'homicide.
Monsieur le garde des sceaux, ont-ils, comme certains le pretendent, beneficie de remises de peine particulieres ou leur remise en liberte est-elle l'application pure et simple de la loi en matiere criminelle ou correctionnelle sans qu'il soit tenu compte tenu de la specificite de ces crimes ou delits ?
Vous presenterez tres prochainement devant notre assemblee un projet de loi dans le but d'eviter certaines recidives dans ce domaine particulier. Estimez-vous que ces dispositions seront suffisamment efficaces, compte tenu de ce que peut receler la nature humaine de pire ? Y a-t-il veritablement des moyens d'empecher ce type de recidive en faisant obstacle, par exemple, a l'application ordinaire des remises de peine et des liberations conditionnelles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. le president. La parole est a M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jacques Toubon, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le depute, ces crimes sont d'une horreur absolue et ils provoquent chez nous, comme chez tous nos concitoyens, des sentiments de revolte meles de compassion.
Les personnes actuellement mises en examen et qui font l'objet d'une information judiciaire n'ont beneficie d'aucune mesure particuliere de liberation anticipee. Leur ont ete appliques les amenagements de peine prevus par nos lois au moment de leur premier crime et qui sont, il est de ma responsabilite de le souligner, indispensables pour garantir l'ordre et la securite dans nos prisons.
M. Jacques Baumel. Oh !
M. le garde des sceaux. J'ajoute que, depuis 1994, la specificite de ces crimes ou de ces delits d'origine sexuelle a ete prise en compte par la loi qui prevoit desormais que la cour d'assises pourra, pour les crimes les plus abominables, prononcer une peine incompressible de trente ans et qu'aucune mesure de liberation ou de sortie ne pourra etre decidee sans un examen medical prealable ni l'avis d'un college de magistrats specialement constitue.
M. Olivier Dassault. Tres bien !
M. Pierre Mazeaud. C'est-a-dire aucune !
M. le garde des sceaux. Monsieur le depute, vous me demandez ce que nous allons faire maintenant. Au mois d'avril prochain, le Gouvernement proposera a l'Assemblee nationale d'instituer un suivi postcarceral apres la fin de la peine obligatoire de ces criminels et de ces delinquants. Ce suivi comportera des mesures medicales qui, mises en oeuvre par des medecins, seront de nature soit psychiatrique soit chimique, organique. Cette nouvelle legislation qui, je l'espere, rencontrera le soutien du Parlement, est a mon avis ce que dans l'etat actuel de la science nous pouvons proposer de plus efficace.
Reste une question, que je ne veux pas eviter d'aborder devant vous.
M. Pierre Mazeaud. Il en reste plusieurs !
M. le garde des sceaux. Peut-on, pendant la detention, prevoir egalement une obligation de soins ? Vous n'ignorez pas qu'une telle obligation peut s'opposer a des principes juridiques. Pour autant, le Gouvernement est pret a examiner cette question et a faire des propositions en ce sens au Parlement dans le cadre de la discussion que nous aurons prochainement sur le suivi medico-social obligatoire apres la peine.
Je remercie en tous cas l'Assemblee d'avoir ecoute la question de M. Marsaud et ma reponse avec une dignite qui fait echo a la douleur des familles et de tous ceux qui pleurent ces jeunes filles. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Auteur : M. Marsaud Alain
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Delinquance et criminalite
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 février 1997