Renault
Question de :
M. Hage Georges
- COM
Question posée en séance, et publiée le 5 mars 1997
M. le president. La parole est a M. Georges Hage.
M. Georges Hage. Marche unique, quand tu nous tiens !
La strategie catastrophe choisie par la direction de Renault illustre les mefaits a episodes d'une privatisation perpetree au nom du marche unique. Les quotas d'importation de voitures japonaises ne cessent d'augmenter et, dans le meme temps, le PDG de Renault annonce, impavide, la fermeture de l'usine de Vilvorde, en Belgique.
Qu'en sera-t-il lorsque les quotas, comme on le prevoit dans un prochain episode, disparaitront ? Combien de travailleurs en Europe, et notamment en France, ou l'industrie de l'automobile est premiere, seront-ils mis a la casse comme leur entreprise ? Combien de familles seront-elles dans le besoin ? Combien de boursiers seront-ils satisfaits ?
Monsieur le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications, allez-vous, au nom de l'Etat actionnaire a 46 %, avaliser cette politique suicidaire sans user de la faculte de blocage dont vous disposez ?
M. Alain Bocquet. Tres bonne question !
M. Georges Hage. Quand definirez-vous avec les syndicats une politique de defense de l'emploi et de tous les sites industriels de Renault ?
A Renault-Douai, face au succes de la Scenic, la direction propose des heures supplementaires, le travail du samedi, l'embauche de cent jeunes, pris en otage pour faire illusion (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre) et, dans ses cartons, la suppression de cinq cents emplois !
Pensee unique, quand tu nous tiens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications.
M. Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Monsieur Hage, trois reflexions. Premierement, contrairement a ce que vous dites, le marche unique a ete globalement tres positif pour les entreprises francaises et pour l'emploi en France. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Louis Pierna. Avec pres de quatre millions de chomeurs !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. La conception qui est la votre et qui consiste a croire que l'economie francaise peut vivre a l'abri d'une «ligne Maginot», protegee de la concurrence exterieure, est depassee. Sa concretisation s'inscrirait tres vite dans un processus d'acceleration de l'affaiblissement et de l'appauvrissement de la societe francaise.
Je puis vous confirmer clairement que l'economie francaise a pleinement tire profit du marche unique...
M. Maxime Gremetz. Non !
M. Louis Pierna. Et les 4 millions de chomeurs !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. ... et qu'elle a, aujourd'hui, trouve a travers l'espace europeen la dimension indispensable a l'accroissement et au developpement des entreprises.
M. Maxime Gremetz. A l'accroissement des profits, plutot !
M. Louis Pierna. Les profits atteignent 500 milliards !
M. Jean-Claude Lefort. Et les hommes ?
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Pour une PME ou une PMI, l'espace europeen est l'espace minimal qui assure sa croissance. Pour une entreprise internationale, le marche est au niveau du monde, ou elle n'est plus. Vouloir effacer cette realite qui s'impose a tous, c'est regarder derriere soi et c'est, du meme coup, se condamner a voir s'affaiblir la capacite industrielle des entreprises francaises. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)
M. Maxime Gremetz. Vous etes pour la loi de la jungle !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Deuxiemement, et vous n'y pouvez rien, monsieur Hage, les consommateurs ont change de comportement vis-a-vis de la voiture.
M. Jean-Claude Lefort. C'est sur !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Il est vrai que les constructeurs automobiles francais construisent de remarquables vehicules, qu'il s'agisse de l'innovation, du design, de la conception de vehicules generiques, destines a toucher le plus grand nombre de clients.
M. Didier Boulaud. Il nous prend pour des demeures !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Mais aujourd'hui, le critere de l'acheteur pour acheter, c'est d'abord le prix. Si, durant les annees dernieres, Renault a perdu des positions, c'est parce que ses vehicules etaient trop chers...
M. Maxime Gremetz. C'est faux !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. ... par rapport au prix que l'acheteur etait capable de payer. (Exclamations sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)
Si vous voulez que nous valorisions la capacite et le savoir-faire remarquables des constructeurs francais,...
M. Christian Bataille. Vous defendez une economie thatcherienne !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. ... il faut leur permettre de baisser leurs prix pour rester competitifs et concurrencer ceux qui fabriquent moins cher...
M. Jean-Claude Lefort. Et pour cela, on degraisse !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Troisiemement, la solution ne reside pas seulement dans la regulation des effectifs ou dans la reorganisation de l'outil de production: elle reside aussi dans la necessite de prendre en compte l'ensemble des aspects de la competitivite...
M. Maxime Gremetz. Non !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. ... pour que puisse etre definie une strategie industrielle propre a chacune des entreprises.
J'ai donc propose aux constructeurs que l'on se mette autour d'une table pour aborder tous les aspects de la competitivite et de la strategie industrielle des entreprises,...
M. Maxime Gremetz et M. Henri Emmanuelli. Tiens donc !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. ... de maniere d'etre a meme d'aborder l'echeance du XXIe siecle, c'est-a-dire la concurrence totale, et de maintenir la position qui est la leur. Elles doivent, par leurs capacites, par leur innovation, pouvoir faire face a toutes les concurrences et maitriser l'evolution des prix pour rester presentes sur leur marche. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
Auteur : M. Hage Georges
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Automobiles et cycles
Ministère interrogé : industrie, poste et télécommunications
Ministère répondant : industrie, poste et télécommunications
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 mars 1997