Question au Gouvernement n° 2291 :
Renault

10e Législature

Question de : M. Carassus Pierre
- RL

Question posée en séance, et publiée le 6 mars 1997

M. le president. La parole est a M. Pierre Carassus.
M. Pierre Carassus. Monsieur le Premier ministre, vous allez recevoir la direction de Renault. Nous pouvons donc esperer entendre vos explications sur ce dossier brulant.
Ainsi, l'Europe sociale deploie sans retenue ses charmes. Les bavardages, meme les plus lyriques, ne resistent pas longtemps aux realites: l'Europe de la monnaie unique n'est que l'Europe de la finance. Tous les analystes financiers l'ont souligne: l'annonce de la fermeture de Vilvorde a dope le marche financier, provoquant une hausse du titre de 9,4 % le jour meme - soit 28 % depuis le 1er janvier 1997. Cette flambee des profits est opportunement absente des commentaires de vos ministres.
Oublie aussi le 1 milliard 300 millions de francs verse en dividendes aux actionnaires Renault en juin 1996 pour l'exercice 1995.
Et, comble de cynisme, pour les elites, les victimes deviennent les accuses: les salaries de chez Renault ne seraient pas assez competitifs ! Les memes concedent cependant que les methodes de la direction de Renault sont trop brutales.
M. Jean-Michel Fourgous. C'est un patron de gauche !
M. Pierre Carassus. Nous dirons qu'a celles-ci, s'ajoute le zele du neophite. Mais nous sommes bien, helas ! dans la logique de libre concurrence voulue par Maastricht.
Monsieur le Premier ministre, ma question sera directe: allez-vous, une fois de plus, ceder aux exigences des marches financiers alors que 61 % des Francais estiment que ce sont eux qui exercent le plus d'influence sur le pouvoir politique ?
Ne serait-il pas temps de prendre au serieux les engagements du candidat Jacques Chirac: «Je souhaite que l'on mette la finance au service de l'economie reelle et de l'emploi. Je veillerai a ce que l'on remette l'homme au centre des choix economiques et sociaux.»
M. Arthur Dehaine. Bonne citation !
M. le president. La parole est a M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications.
M. Franck Borotra, ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Monsieur le depute, la fermeture d'un site de production tel que celui de Vilvorde est une affaire grave. C'est a l'evidence une decision difficile a prendre. Elle a des consequences d'abord pour les salaries, bien evidemment, mais aussi pour la region ou est installee l'usine, et pour l'entreprise, car c'est une amputation et cela ne se pratique pas sans douleur. Alors, de grace, pas de confusion ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Si le cours des actions de Renault a monte au moment ou une decision de restructuration a ete prise, c'est tout simplement parce que la Bourse, dont les entreprises ont besoin - car, sans elle, c'est une partie des moyens financiers necessaires a leur developpement qui viendrait a disparaitre - a anticipe les resultats de la restructuration (Exclamations sur les bancs du groupe communiste) et pris en compte la volonte de la direction que cette entreprise soit en equilibre dans un ou deux ans.
M. Christian Bataille. La politique ne se fait pas a la corbeille !
M. Jean-Claude Lefort. La bourse ou la vie !
M. Jean Tardito. La bourse ou l'emploi !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Cela signifie simplement que la Bourse est peut-etre un bon thermometre au plan economique, mais un thermometre qui ne prend pas en compte les consequences sociales. ! (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.)
Il faut prendre la Bourse pour ce qu'elle est.
M. Jean-Claude Lefort. La politique ne se fait pas a la corbeille !
M. le ministre de l'industrie, de la poste et des telecommunications. Notre responsabilite a nous, c'est le devenir de l'entreprise, la protection des salaries et, a l'evidence, les consequences sociales des decisions qui sont prises. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Jean Tardito. Vous ne faites qu'enteriner les decisions !

Données clés

Auteur : M. Carassus Pierre

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Automobiles et cycles

Ministère interrogé : industrie, poste et télécommunications

Ministère répondant : industrie, poste et télécommunications

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 mars 1997

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