Question de : M. Fabius Laurent
- SOC
Question posée en séance, et publiée le 19 mars 1997

M. le president. La parole est a M. Laurent Fabius.
(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. Laurent Fabius. Monsieur le Premier ministre, vous etes, par fonction, le chef de la majorite parlementaire. («C'est vrai !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.) Bien sur, vous n'etes pas comptable de tous les propos tenus, ici ou la, par les deputes.
M. Charles Ehrmann. Lesquels ?
M. Laurent Fabius. Toutefois, lorsqu'il s'agit de responsables importants de la majorite, vous ne pouvez pas rester indifferent.
Or, samedi dernier, le president d'une des deux formations principales de la majorite n'a pas hesite a comparer et mettre sur un meme plan le Front national et le Front populaire. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - M. Jean-Louis Beaumont applaudit.) Cela venait apres d'autres propos tenus quelques jours plus tot par un membre de votre gouvernement parlant a propos du Parti socialiste et du Front national de la peste et du cholera. («C'est vrai !» sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. Je vous en prie !
M. Laurent Fabius. Ces propos sont une insulte faite non seulement a l'Histoire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre),...
M. Charles Ehrmann. L'Histoire, vous ne la connaissez pas !
M. Laurent Fabius. ... et aux millions de Francais qui ne confondent pas ceux qui ont defendu les valeurs de la Republique et ceux qui ne cessent de les menacer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre), ...
M. le president. Un peu de calme, mes chers collegues !
M. Laurent Fabius. ... mais aussi a des hommes qui ont mis leur vie en peril pour que, ici, nous puissions parler libres. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. Francois Vannson et M. Patrick Ollier. Et la comparaison qui a ete faite avec Vichy !
M. Laurent Fabius. Je pense a Leon Blum, deporte, a Roger Salengro, suicide, a Victor Basch, supplicie, a Jean Zay, execute, a Gabriel Peri, fusille (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre)...
M. le president. Un peu de calme !
M. Laurent Fabius. ... qui furent des heros du Front populaire (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre), ...
M. le president. Un peu de calme !
M. Laurent Fabius. ... qui sont des lecons pour la gauche et la fierte de tous les Francais ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Jean-Michel Ferrand. Et la francisque ?
M. Laurent Fabius. Ma demande est donc simple, monsieur le Premier ministre: je vous demande de desavouer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le president. La parole est a M. le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
M. Alain Juppe, Premier ministre. Mesdames, messieurs les deputes, chacun ici connait mes convictions et mon attachement aux valeurs de la Republique. J'estime donc, comme beaucoup d'entre vous, comme vous tous, ne pas avoir de lecons de morale a recevoir (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre), surtout lorsqu'elles viennent de ceux-la memes qui, pendant tant d'annees, ont fait objectivement le jeu du Front national (Memes mouvements), jusqu'a lui ouvrir les bancs de cet hemicycle en instituant le scrutin proportionnel integral. (Applaudissements puis huees sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Vives protestations sur les bancs du groupe socialistes.)
M. Claude Bartolone. C'est incroyable !
M. le president. Un peu de calme !
M. Henri Emmanuelli. Minable !
M. Paul Quiles. Zero !
M. le president. Un peu de calme !
M. le Premier ministre. Personne, monsieur Fabius, n'a le monopole de la Resistance ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Dois-je vous dire que beaucoup d'entre nous ont ete aussi profondement blesses...
M. Henri Emmanuelli. Minable !
M. le Premier ministre. ...quand ils ont entendu certains de vos propres amis comparer la situation d'aujourd'hui a celle qui existait a l'epoque du gouvernement de Vichy ! (Applaudissements puis huees sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Quant au combat electoral qui va s'ouvrir, notre objectif est clair. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Henri Emmanuelli. Vous etes minable !
M. Louis Mexandeau. Desavouez Leotard !
M. le president. Un peu de calme !
M. le Premier ministre. Dans le respect de nos valeurs et dans le refus de toute alliance contre nature, nous allons nous battre pour epargner a la France votre retour au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.) Chacun, je pense, le comprendra en constatant combien il est difficile pour notre pays de solder le bilan de deux septennats socialistes.
M. Louis Mexandeau. Desavouez Leotard !
M. Jean-Marc Salinier. Hypocrite !
M. le Premier ministre. Chacun le comprendra aussi en lisant le programme economique publie aujourd'hui meme par votre parti (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et qui ramenerait la France dans la spirale du declin. (Protestations sur les memes bancs.)
Mesdames, messieurs les deputes de la majorite, c'est en restant fideles a nous-memes que nous nous donnerons les meilleures chances de victoire et que nous donnerons a la France les meilleures chances de progres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre. - De nombreux deputes des memes groupes se levent et applaudissent.- «Minable !», «Zero !» sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le president. Nous en venons au groupe du Rassemblement pour la Republique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste. - Plusieurs deputes du groupe socialiste quittent l'hemicycle. - Huees sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)
Plusieurs deputes du groupe du Rassemblement pour la Republique. Dehors !
M. le president. Un peu de calme !