Question au Gouvernement n° 2395 :
Lutte et prevention

10e Législature

Question de : M. Teissier Guy
- UDF

Question posée en séance, et publiée le 16 avril 1997

M. le president. La parole est a M. Guy Teissier.
M. Guy Teissier. Ma question s'adresse a M. le garde des sceaux et a trait a l'enfance delinquante.
Cyclomoteurs voles, autoradios derobes, violences gratuites en tous genres, agressions verbales voire physiques, les infractions commises par de jeunes mineurs empoisonnent le quotidien de nos concitoyens. Elles temoignent de l'augmentation de la delinquance juvenile. J'en veux pour preuve les chiffres de la commission des crimes et delits qui montrent une augmentation de pres de 14 % de ce genre de delits entre 1995 et 1996 alors qu'a contrario le nombre de crimes et delits baisse de pres de 9,2 % grace au travail remarquable des forces de police.
Pour tenter de maitriser ce phenomene, differentes mesures ont ete prises par notre assemblee mais permettez-moi, monsieur le ministre, de vous livrer a cet instant le fond de ma pensee. Lorsque l'on attrape un enfant de treize ans et demi qui est en train de voler un vehicule a trois heures du matin, je me dis que l'auteur de l'infraction doit etre puni, certes, mais egalement que des actions doivent etre engagees a l'encontre des parents, qui sont tout aussi responsables, sinon coupables de ne pas assurer leur role d'educateurs.
Pour ma part, j'ai depose une proposition de loi tendant a exclure, provisoirement ou definitivement, la part de l'enfant delinquant du calcul des prestations familiales. Mais avant de legiferer a nouveau, il conviendrait d'appliquer tout simplement l'article 227-17 du code penal, qui prevoit une peine de deux ans d'emprisonnement et une amende de 200 000 francs pour le pere ou la mere qui se soustrait, sans motif legitime, a ses obligations legales au point de compromettre la securite, la moralite ou l'education de son enfant. En effet, les procureurs engagent trop rarement des procedures sur la base de cet article.
Monsieur le garde des sceaux, je vous demande de bien vouloir indiquer a la representation nationale si vous entendez recommander aux Parquets de poursuivre plus frequemment les parents d'enfants delinquants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre et du groupe du Rassemblement pour la Republique.)
M. le president. La parole est a M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Jacques Toubon, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le depute, depuis 1995, vous le savez tres bien, la prevention et la repression de la delinquance des mineurs sont l'une des priorites de ce gouvernement, et en particulier du ministre de la justice. Mais il est vrai que la justice ne peut pas tout et que les problemes familiaux, d'education qui se posent en amont sont fondamentaux.
S'agissant de l'article 227-17 du code penal que vous avez mentionne, il faut bien preciser qu'il est fait pour proteger certains enfants contre l'abandon materiel et moral dont pourraient se rendre coupables leurs parents, et non pas pour proteger la societe contre les mineurs delinquants. Cela signifie que, pour qu'un procureur puisse engager valablement une poursuite sur cette base, il faut qu'il etablisse un lien de causalite evident entre l'abandon, l'absence de soins, l'absence d'education dont se sont rendus coupables les parents et le delit qui a ete commis par le mineur. Cela dit, monsieur le depute, il n'est pas impossible que cet article puisse etre utilise pour mettre en cause la responsabilite penale des parents de mineurs delinquants.
Il faut bien voir quelles sont nos perspectives dans ce domaine. Il s'agit, avec la loi du 1er juillet 1996, d'aller vers un traitement plus rapide de la delinquance des mineurs et de developper les unites a encadrement educatif renforce, qui sont une reussite. Enfin, nous pouvons atteindre, en utilisant toutes les methodes judiciaires ou non judiciaires a la disposition du Parquet, l'objectif qui est le mien de 0 % de classement pour les infractions commises par des mineurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la Republique et du groupe de l'Union pour la democratie francaise et du Centre.)

Données clés

Auteur : M. Teissier Guy

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Delinquance et criminalite

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 avril 1997

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