Relations Nord-Sud
Question de :
M. Guillaume François
- RPR
M. Francois Guillaume attire l'attention de M. le ministre de la cooperation sur l'importance primordiale de l'agriculture dans l'emploi et les recettes d'exportation des pays du tiers monde, notamment ceux du « champ » de la cooperation, qui comptent parmi les plus pauvres de la planete. Le retour a la prosperite de ces Etats est lie a la mise en oeuvre d'une strategie globale qui conjugue l'economique et l'humanitaire. L'agriculture doit en etre la premiere expression par une meilleure et encourageante valorisation de l'acte de production. En outre, le developpement se realisera d'abord a l'interieur de blocs regionaux qui pourront ensuite commercer entre eux dans le cadre de marches mondiaux organises. Or, entre 1980 et 1992, les prix agricoles mondiaux a l'exportation ont chute de 26 p. 100 en termes reels. Les produits les plus affectes par cette evolution sont le cafe et le cacao dont les cours ont perdu 70 p. 100 en douze ans, de meme que le sucre (- 60 p. 100), le coton et le caoutchouc (- 50 p. 100). Les consequences sont evidemment catastrophiques pour les pays du sud dont les recettes d'exportations en devises, indispensables a leur developpement global, ont ainsi ete amputees de 39 p. 100 au cours des douze dernieres annees (depuis 1988, c'est a 50 milliards de dollars qu'il faut evaluer ces pertes). Sur les marches mondiaux, les rapports de force entre producteurs et consommateurs ont toujours ete desequilibres et c'est en vain que des accords internationaux de produits, conclus sur une base paritaire, ont tente de reglementer les marches et de stabiliser les prix. Aujourd'hui, une evolution tres sensible se dessine dans l'attitude des pays producteurs du tiers monde, decides a prendre enfin leur destin en main en organisant seuls la production et les exportations mondiales dans le but d'ajuster l'offre a la demande et de permettre une remontee des prix a un niveau remunerateur : cela est vrai pour le cafe, avec la creation en septembre dernier de l'Association mondiale des pays producteurs de cafe qui a elabore et mis en place depuis le 1er octobre un plan de retention de la production ; resultat, les cours qui avaient touche le fond en aout (a 45 cents US la livre) se trouvaient, a la mi-novembre, autour de 70 cents ; cela est vrai egalement, dans une certaine mesure, pour le cacao, puisque les operateurs du marche, tout en restant dans le cadre traditionnel des accords de produits, font peser sur les seuls producteurs la responsabilite d'organiser la production ; cela risque de se passer egalement pour le caoutchouc, dont les prix sont a leur plus bas niveau depuis trente ans, si les pays consommateurs persistent dans leur refus de negocier un nouvel accord international. On ne peut que se feliciter de la nouvelle determination des pays producteurs a faire jeu egal avec les pays consommateurs. Toutefois, leur demarche, pour devenir perenne, efficace et credible, necessite non seulement la caution politique mais aussi le soutien technique et financier des pays du nord. A cet egard, on ne peut que regretter l'attitude des Etats-Unis qui, hostiles a toute forme d'organisation des marches, ont decide recemment de quitter l'organisation internationale du cafe. En consequence, il lui demande quelle politique le Gouvernement entend mettre en oeuvre en ce qui concerne l'organisation des marches internationaux de matieres premieres. Il souhaite notamment connaitre la position de la France sur l'accord entre les pays producteurs de cafe et, le cas echeant, les moyens qui seront mis en oeuvre pour soutenir la nouvelle association. Par ailleurs, la question de la devaluation eventuelle du franc CFA est aujourd'hui ouvertement posee dans les milieux francophones, en particulier depuis la decision prise durant l'ete 1993 de ne plus assurer la libre convertibilite des billets. Certes, M. le ministre a deja eu l'occasion de preciser qu'il n'etait pas question « pour l'instant » de devaluer le franc CFA. Toutefois, il lui demande s'il n'estime pas necessaire de lever les doutes sur les risques de devaluation a court terme.
Auteur : M. Guillaume François
Type de question : Question orale
Rubrique : Politique exterieure
Ministère interrogé : coopération
Ministère répondant : coopération
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 décembre 1993