Question écrite n° 28033 :
protection

11e Législature

Question de : M. Pierre Lellouche
Paris (4e circonscription) - Rassemblement pour la République

M. Pierre Lellouche attire l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur la législation applicable au patrimoine maritime et sur d'éventuelles modifications quant à son évolution. En effet, la législation relative au patrimoine subaquatique situé dans des eaux territoriales sous juridiction étrangère s'appuie sur la loi d'usage dite « du pavillon », reconnue par l'Etat français et la plupart des pays ayant un droit côtier, qui stipule que les bâtiments sous pavillons nationaux appartiennent pour toujours à l'Etat-armateur et s'exerce quel que soit le lieu où l'épave a été retrouvée. Cette loi, relative aux biens culturels maritimes, porte réglementation des droits de propriété sur épave et garantit, de fait, à l'ayant droit la maîtrise d'oeuvre des fouilles archéologiques, la protection, l'exploitation et la mise en valeur du bien culturel mis à jour. Pourtant, il existe aujourd'hui une menace relative aux droits des Etats-armateurs sur les bâtiments armés sous pavillons nationaux. Il s'agit, en l'occurrence, du projet de Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique en cours d'étude à l'UNESCO. Ce projet avait été initié par le Conseil de l'Europe qui, en 1979, avait créé un comité ad hoc d'experts qui proposa en 1985 un projet de convention sur la protection du patrimoine subaquatique. Ce projet, dit CdE, ne fut pas adopté. Depuis, l'Association de droit international (ILA) a élaboré une nouvelle mouture de convention sur la protection de ce patrimoine, s'inspirant du projet CdE mais avec des différences importantes quant au fond. Ce projet ILA a été adopté par la 66e conférence de l'ILA en 1994. Il a fait l'objet d'une étude de faisabilité par la direction générale de l'UNESCO et fonde la base d'un nouveau document pour la protection de ce patrimoine qui a été examiné lors d'une réunion d'experts à Paris en mai 1996, et qui a reçu les observations de nombreux Etats membres. Enfin, le secrétariat général de l'UNESCO a élaboré à partir de ce texte un projet de convention (CLT 98-Cof. 202/5 Paris avril 1998) qui a été examiné par une réunion d'experts début juillet 1998, où le ministère des affaires étrangères était représenté par la Sous-direction du droit de la mer, des pêches et de l'Antarctique (SDDMPA). Or, l'article 2, alinéa 2, de ce projet de convention est ainsi rédigé : « La présente convention ne s'applique pas aux vestiges ni au contenu de navires de guerre, navires auxiliaires, autres bâtiments ou aéronefs appartenant à un Etat ou opérant sous le contrôle d'un Etat qui, à l'époque où ils ont sombré, étaient utilisés uniquement à des fins non commerciales ». Cette rédaction semble particulièrement pénalisante pour le patrimoine subaquatique des Etats européens, notamment la France. En effet, entre le xvie siècle et le xixe siècle, ces pays ont été parmi les principales puissances navales expansionnistes. Une grande partie des épaves de bâtiments de guerre recensées dans le monde, ou qui restent à découvrir, ressortent de ces pays. Par ailleurs, ces épaves offrent par l'évolution de leurs techniques de construction, de leur armement, de leurs moyens de navigation, un intérêt patrimonial considérable. Les exclure de la Convention sur la protection du patrimoine subaquatique consiste à vider celle-ci de son sens en excluant de la convention l'essentiel des bâtiments dignes de l'intérêt d'une fouille, à remettre en cause la loi d'usage dite « du pavillon », et à ne plus garantir une bonne mise en oeuvre des chantiers de fouilles par des spécialistes pour la plupart européens, l'essentiel des sites se trouvant actuellement dans des eaux littorales territoriales de pays émergeants n'ayant pas encore la technique et le savoir-faire pour une bonne exploitation de ce type de chantiers. Enfin, ne pas appliquer la Convention sur la protection du patrimoine subaquatique de ce type de bâtiments risque d'entraîner des pertes irréparables, et de compliquer un peu plus la fixation d'accords bilatéraux de coopération pour éviter les problèmes liés à l'application de la loi d'usage dite « du pavillon », qui seuls devraient permettre de régler une partie des objections soulevées par certains Etats membres. Il lui demande quelles suites il entend prendre, au nom de l'Etat français, dans les négociations sur le projet de Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique en cours d'étude à l'UNESCO par le biais de la Sous-direction du droit de la mer, des pêches et de l'Antarctique (SDDMPA), et quelles dispositions peuvent être envisagées pour garantir à l'Etat-armateur les droits de propriété sur épave, notamment s'il s'agit de la France, sur les bâtiments armés sous pavillons nationaux.

Données clés

Auteur : M. Pierre Lellouche

Type de question : Question écrite

Rubrique : Patrimoine culturel

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 5 avril 1999
Réponse publiée le 31 mai 1999

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