délinquance financière
Question de :
M. Yves Nicolin
Loire (5e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
M. Yves Nicolin appelle l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le projet du Gouvernement visant à étendre aux professions juridiques indépendantes l'obligation de déclaration de soupçon applicable aux organismes financiers. Après que l'amendement au projet de loi sur les nouvelles régulations économiques prévoyant une telle extension ait été abandonné, le ministre a indiqué son intention de représenter le texte de cet amendement lors de la prochaine loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (DDOEF). Sur la méthode employée par le Gouvernement, il estime qu'elle traduit un certain acharnement législatif, dans la mesure où un amendement avait déjà été rejeté par l'Assemblée nationale en première lecture le 25 avril 2000 puis, par le Sénat, le 12 octobre dernier. Sur le fond, cette extension porte une atteinte sérieuse à l'une des principales garanties offerte par la profession d'avocats : le secret professionnel. Il lui rappelle que les avocats français ont, de longue date, mis en place les instruments d'une lutte efficace contre le blanchiment. En premier lieu, la caisse de règlement pécuniaire des avocats (CARPA) qui exerce un contrôle strict et permanent des maniements de fonds est adossée à une banque elle-même tenue à la déclaration de soupçon. Elle fonctionne sous le contrôle de l'autorité ordinale (bâtonnier et conseil de l'ordre) et sous la surveillance d'une commission de contrôle des CARPA mise en place en 1996, assistée d'un commissaire aux comptes. En second lieu, les ordres veillent au strict respect par leurs membres des règles déontologiques et sanctionnent sévèrement ceux qui ne respectent pas ces obligations quelles que soient les causes. Les avocats ont donc élaboré un système d'indicateurs d'alerte leur permettant d'exercer leur vigilance et de prévenir les risques de blanchiment. Le Gouvernement ne saurait se réfugier derrière une quelconque obligation de transposition d'une directive européenne dont il n'ignore pas que le projet, soumis à la procédure de codécision, a été rejeté en mai 2000 par le Parlement européen. L'adoption d'une telle extension aurait donc pour effet de soumettre les seuls avocats français à cette obligation alors qu'à l'évidence, la lutte contre le blanchiment de l'argent ne peut se concevoir qu'au plan européen et international. Parce que l'avocat français conseille, assiste et représente en justice, il doit garantir à ces missions un secret professionnel absolu. Il en est autrement bien sûr lorsqu'il représente un client dans les actes de la vie civile. Aussi, il demande au Gouvernement de ne pas s'obstiner dans ce projet déjà rejeté par deux fois au Parlement français et une fois au Parlement européen.
Auteur : M. Yves Nicolin
Type de question : Question écrite
Rubrique : Droit pénal
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 26 février 2001
Réponse publiée le 9 juillet 2001