Question écrite n° 68019 :
coopération judiciaire

11e Législature

Question de : M. Guy Lengagne
Pas-de-Calais (5e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

M. Guy Lengagne attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur la question du mandat d'arrêt européen, qui vise à remplacer la procédure d'extradition par un mécanisme de transfert automatique d'un Etat à l'autre. Fondé sur une confiance réciproque dans les justices de chaque Etat membre de l'Union, le mandat d'arrêt européen assouplit à l'extrême les procédures d'extradition. Il met en place un nouvel espace judiciaire, au sein duquel les personnes recherchées pourraient dans des délais brefs être arrêtées et remises aux magistrats qui en feraient la demande, sans aucune considération de nature politique. Il est incontestable que les actes de terrorisme ne doivent pas rester impunis et l'on ne peut que se féliciter de la volonté de coopération des Etats européens dans ce domaine. La définition de l'« acte de terrorisme » proposée par la commission, tout acte de droit commun « commis intentionnellement par un individu ou un groupe contre un ou plusieurs pays (...) en vue de menacer, de porter atteinte ou de détruire leurs structures politiques, économiques ou sociales », paraît cependant très large ; elle risquerait, si elle était adoptée telle quelle, de porter une atteinte grave aux libertés individuelles. Cette définition supprime entre autres le principe de la double incrimination des infractions, qui impose à l'Etat auquel est demandée l'extradition que les faits pour lesquels la personne est poursuivie soit punis dans sa législation. La proposition de la commission prévoit aussi que chaque pays accepte de livrer ses ressortissants. Or, il est dans la tradition républicaine de la France de ne jamais extrader ses propres ressortissants quand bien même ceux-ci seraient accusés de crimes graves à l'étranger. Le mandat d'arrêt européen couvre en outre la quasi-totalité du spectre des codes pénaux car il s'applique aux prévenus passibles d'un an de prison. Cela constitue une menace grave aux libertés individuelles, d'autant que les législations des différents pays européens ne sont pas encore harmonisées. Ainsi que le faisait remarquer un haut fonctionnaire français, on peut se demander si la France devrait livrer à l'Italie une personne qui aurait commis le délit de blasphème, qui n'existe pas en France. Le mandat d'arrêt européen mériterait une réflexion plus approfondie qui veillerait à concilier le respect des libertés individuelles et la sécurités des populations. Il lui demande de bien vouloir lui faire connaître la position du Gouvernement.

Données clés

Auteur : M. Guy Lengagne

Type de question : Question écrite

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 29 octobre 2001
Réponse publiée le 28 janvier 2002

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