personnel
Question de :
M. Yves Cochet
Val-d'Oise (7e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert
Question posée en séance, et publiée le 20 janvier 1999
M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Les lois sur la réduction du temps de travail sont pour nous les plus importantes de notre législature. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Oui, parce que nous pensons que ce sont les outils principaux de lutte contre le chômage. (Exclamations sur les mêmes bancs. - Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.) Et c'est sur la question de la réduction du chômage que nous serons jugés à la fin de cette législature.
Ce que l'on constate, c'est que la mise en place et l'application de la première de ces lois est lente. Or, dans certains secteurs, le Gouvernement peut en accélérer l'application.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Dans le secteur public !
M. Michel Bouvard. Merci EDF !
M. Yves Cochet. Je pense notamment au secteur non lucratif social et médico-social.
Dans ce secteur, six organisations d'employeurs essaient d'imposer un accord-cadre par l'intermédiaire d'une nouvelle branche professionnelle appelée UNIFED, fortement contestée par les organisations syndicales de salariés. Sous prétexte de négociations de branches, on prépare en fait, avec la réduction du temps de travail envisagée par les employeurs, un démantèlement complet des conventions collectives.
En voici plusieurs exemples: dérogation au code du travail en ce qui concerne notamment la fixation du repos quotidien; mise en place de systèmes de calcul du travail effectif et de restrictions financières qui augmenteront en fait le nombre d'heures de travail et diminueront les rémunérations financiaires; pour les salariés à temps partiel, régression sur les heures complémentaires; mise en place d'une flexibilité maximale; absence de dispositions en matière de création d'emplois, qui est pourtant le premier but de notre loi sur la réduction du temps de travail. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Madame la ministre, il semble que votre ministère refuse, dans un secteur qu'il encadre,...
M. Claude Goasguen. Echec et mat !
M. Yves Cochet. ... toute mise en place du financement nécessaire aux créations de postes induites par la réduction du temps de travail. De ce fait, la crainte du personnel est que votre ministère n'avalise l'accord régressif proposé par les employeurs de l'UNIFED.
Ma question est simple: quelle est réellement la position de votre ministère ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Tout d'abord, monsieur le député, le Gouvernement a pris ses responsabilités en intégrant le secteur sanitaire et social dans la loi sur la réduction de la durée du travail. Le précédent gouvernement l'avait écarté de l'application de la loi Robien par une circulaire qui a d'ailleurs été annulée par le Conseil d'Etat.
C'est effectivement un secteur très important, parce qu'il touche les plus fragiles, les personnes âgées, handicapées, la petite enfance, les exclus, et parce qu'il emploie 400 000 salariés dont 40 % à temps partiel.
En mettant en place la révision de la loi du 30 juin 1975, le Gouvernement souhaite contribuer à améliorer d'abord la qualité du service rendu, mais aussi les conditions de travail, souvent difficiles, des salariés, et entend parvenir à des gains en matière d'emploi. Mais le secteur privé est régi par des conventions collectives. La négociation doit donc se dérouler, de manière décentralisée, au niveau de ces conventions. Vous l'avez rappelé, dans un secteur bien particulier, nous avons confié à l'IGAS une mission d'accompagnement des syndicats et des fédérations patronales pour plusieurs de ces négociations.
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. Qui paiera ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Par ailleurs, je voudrais vous rassurer, monsieur le député: si ces accords ne sont pas équilibrés, s'ils ne respectent pas la réglementation et les droits des salariés, ils ne seront pas agréés.
De manière plus générale, je tiens à dire aux sceptiques qu'il faut du temps pour régler le problème de l'emploi: nous avons tous payé pour le savoir. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ces problèmes ne se règlent pas dans l'urgence.
M. Bernard Accoyer. C'est comme les retraites !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Certains, l'été dernier, prétendaient que tout cela allait mettre les entreprises par terre, notamment les plus petites. Qu'ils le sachent, aujourd'hui, 40 % des accords sont signés dans les entreprises de moins de vingt salariés.
M. Pierre Lellouche. C'est une escroquerie !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Les mêmes disaient que ces mesures entraîneraient une baisse de pouvoir d'achat des salariés. Il va, au contraire, augmenter de 3% cette année, ce qui est le meilleur résultat depuis vingt ans. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Les mêmes ont ajouté que cela ne créerait pas d'emplois. Les accords déjà signés prévoient une augmentation des effectifs de 8 % et, chaque jour, de nouveaux accords créent des milliers d'emplois. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. C'est du vent !
M. le président. S'il vous plaît !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Quand, comme le Premier ministre, on a fait du combat contre le chômage la priorité du Gouvernement, on trace sa voie sans fébrilité, avec la conviction que l'on va dans le bon sens, comme la moitié des entreprises qui négocient actuellement.
M. Pierre Lellouche. C'est faux !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je vous donne rendez-vous au printemps: nous verrons alors qui aura gagné la bataille de l'emploi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Yves Cochet
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Institutions sociales et médico-sociales
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 janvier 1999