Allemagne
Question de :
M. Patrice Carvalho
Oise (6e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 21 janvier 1999
M. le président. La parole est à M. Patrice Carvalho, pour une courte question.
M. Patrice Carvalho. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie.
Le Gouvernement allemand a décidé d'interdire le retraitement de ses déchets nucléaires à partir du 1er janvier 2000. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Voynet !
M. Patrice Carvalho. Bonn se donne douze mois pour négocier avec les gouvernements des pays concernés les conséquences de cette décision.
Des contrats importants sont rompus avec l'usine de retraitement de la COGEMA à La Hague.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Scandaleux !
M. Patrice Carvalho. Le manque à gagner serait de 30 milliards de francs sur dix ans, sans compter le coût social auquel notre pays devra faire face pour indemniser les salariés au chômage.
Le gouvernement allemand annonce refuser toute indemnisation. Les motifs invoqués par le ministre de l'environnement Juergen Trittin ne sont pas recevables. Quoi qu'il en soit, le gouvernement allemand doit assumer les conséquences de ses actes pour le présent et l'avenir.
M. Pierre Lellouche. Très bien !
M. Patrice Carvalho. Le gouvernement français doit faire preuve de la plus grande fermeté et obtenir réparation pour les pertes subies par la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Quant aux stocks allemands de déchets nucléaires entreposés sur le site de la Manche depuis leur retraitement, leur rapatriement devrait attendre la construction d'un lieu de stockage sûr. Est-ce à l'Allemagne d'en décider ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendant et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, pour une réponse courte.
M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie. Monsieur le député, l'arrêt du retraitement des déchets nucléaires décidé par la coalition au gouvernement en Allemagne soulève de nombreuses inquiétudes (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), en particulier en terme d'emplois, chez les salariés de la COGEMA.
M. Bernard Accoyer. Voynet !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Comme vous, on le comprend aisément !
Cette inquiétude légitime a conduit à quelques débordements physiques et verbaux choquants hier, à l'occasion du déplacement à Cherbourg d'un représentant d'un parti politique. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Le nucléaire est une chose trop sérieuse pour prétendre ne relever que de la polémique médiatisée, chacun en conviendra. (Exclamations sur les mêmes bancs.)
Cette industrie, qui est aussi la plus surveillée du monde, a fait ses preuves au plan technique,...
M. Yves Fromion. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. ... mais une confiance durable dans cette forme d'énergie, confiance aujourd'hui accordée très majoritairement par l'opinion française,...
M. Yves Fromion. Bravo ! Nous sommes d'accord !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. ... ne peut être confortée que si s'établit une véritable transparence: transparence technologique - c'est l'objet du futur projet de loi décidé par le Premier ministre le 9 décembre dernier -, et transparence politique: c'est l'objet du débat organisé demain devant l'Assemblée nationale sur la politique énergétique. Ce thème de la transparence doit d'ailleurs transcender les clivages politiques, quels qu'ils soient. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
S'agissant de nos relations avec l'Allemagne, le Gouvernement, à plusieurs occasions, et encore très récemment, a rappelé que, s'il ne remettait pas en cause les choix souverains de l'Allemagne en matière de politique économique et énergétique, il n'en attendait pas moins que le droit international soit intégralement respecté.
M. Yves Fromion. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Je ne reviendrai pas sur la réponse que j'ai faite hier. Le gouvernement allemand a à faire face à des questions difficiles...
M. René André. C'est lui qui les a créées.
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. ... pour lesquelles il recherche actuellement des solutions appropriées.
M. Pierre Lellouche. Qu'il tienne sa parole !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Lui en donner le temps n'est pas signe de faiblesse de notre part, mais, au contraire, de détermination et d'efficacité.
M. Pierre Lellouche. Réparation !
M. le secrétaire d'Etat à l'industrie. Je ne doute pas que, dans le cadre de négociation défini il y a quelques semaines à Potsdam par les chefs d'Etat et de gouvernement, nous puissions aplanir les divergences et définir un compromis mutuellement acceptable.
Enfin, si je comprends le désarroi des salariés des industries nucléaires - le Gouvernement leur rend hommage (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) pour leurs compétences, leur savoir-faire et la réussite de cette filière, et ils ne méritent pas ce qu'ils vivent comme une sanction -, il est beaucoup trop tôt pour évoquer les conséquences sociales de la décision de notre partenaire allemand, alors même que la loi correspondante n'a pas été présentée au Parlement, n'a pas été discutée avec les électriciens et n'est pas encore formulée, ne serait-ce que dans ses principes.
Je reste confiant sur notre capacité à tous de trouver une solution acceptable. Le Gouvernement défend et continuera à défendre nos salariés, nos entreprises, les intérêts économiques et technologiques de la politique énergétique française. Soyez-en certains, le Gouvernement se bat pour cette magnifique filière énergétique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Patrice Carvalho
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : industrie
Ministère répondant : industrie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 1999