Question au Gouvernement n° 113 :
sans-papiers

11e Législature

Question de : M. Christian Cabal
Loire (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 29 octobre 1997

M. le président. La parole est à M. Christian Cabal.
M. Christian Cabal. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, d'autant plus qu'il n'a pas répondu à la question précédente. («Très bien !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Monsieur le ministre, la question de la régularisation des clandestins est grave. Semaine après semaine, vous n'apportez aucun éclaircissement à la politique gouvernementale.
M. Jean-Paul Charié. On reste dans le brouillard.
M. Christian Cabal. Vous comprendrez donc que, dans ces conditions, le groupe RPR vous interroge une nouvelle fois et que nous espérons (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) - espoir que j'espère déçu...
M. Didier Boulaud. Lapsus sans doute ?
M. Christian Cabal. Je crains la déception, c'est-à-dire qu'une nouvelle fois vous ne répondiez pas.
Semaine après semaine, dans les préfectures, les dossiers se multiplient, 50 000, 100 000, 150 000, nous l'ignorons. Où s'arrêtera-t-on ? Et, surtout, que fera-t-on de ceux dont les dossiers auront été rejetés ? Voilà quinze jours, vous avez fait preuve d'un humour à la britannique qu'on ne vous connaissait pas. Vous avez répondu: «On écrira» !
Alors, plus sérieusement, quelle mesure l'autorité républicaine mettra-t-elle en oeuvre vis-à-vis de ceux qui ne sont pas régularisables ?
Il y a huit jours, vous avez indiqué que le regroupement familial se poursuivrait. Il est paradoxal qu'à l'heure où le Gouvernement socialiste attaque la politique familiale, soit encouragée la politique familiale des étrangers ! - (Rires sur les bancs du groupe socialiste. - «Eh oui !» et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Et ce regroupement familial, où s'arrêtera-t-il ? Les enfants ? Les parents ? Les petits-enfants ? Les grands-parents ? Les tontons ? Les tatas ? Les cousins ? Les cousines ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.) Les épouses, les épouses multiples ? (Huées sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.) Dans certains pays, les concubines ? Dites-nous franchement où s'arrêtera le regroupement familial (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste) en nous épargnant la leçon de morale républicaine hebdomadaire.
M. Didier Boulaud. Nous ne nous référons pas à la même République !
M. Christian Cabal. Toutes et tous, sur ces travées, nous partageons les mêmes aspirations républicaines ! Epargnez-nous également les considérants dialectiques dont vous êtes friands ! Les Françaises et les Français vous écoutent. Apportez-leur enfin les réponses aux questions que nous vous posons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. C'est honteux !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je crains fort que, parti sur ce registre, vous ne finissiez par faire concurrence au Front national ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Certes, vous y mettez du vôtre, mais très franchement convient-il réellement d'agiter des fantasmes alors qu'un certain nombre de sujets devraient permettre un consensus républicain sur des valeurs partagées ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. Bernard Accoyer. Nous avons été élus sans eux !
M. Louis de Broissia. Et ce n'est pas la question !
M. le ministre de l'intérieur. Je vous ferai observer que la France, il y a bien longtemps, a signé la Convention européenne des droits de l'homme qui, dans son article 8, reconnaît le droit de vivre en famille. Nous en tirons les conséquences.
Comme je l'ai rappelé la semaine dernière, M. Debré avait d'ailleurs commencé, dans une circulaire du mois d'avril, me semble-t-il. Le regroupement familial existe depuis des décennies ! Vous l'avez pratiqué à juste titre, d'ailleurs, car le but est de stabiliser les immigrés installés de longue date sur notre sol, de les intégrer s'ils le souhaitent, le but, ce n'est pas de les précariser. Je trouve que ces procès d'intention, ces attaques absurdes ne peuvent que servir l'extrême droite (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française) et desservir en même temps la cause des immigrés et l'image de la France, à laquelle vous devriez être attachés autant que moi. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)

Quand et où s'arrêtera-t-on ? Dans quatre jours, on s'arrêtera car le délai expire le 31 octobre. Je ne peux pas vous donner de chiffres exacts, mais je vous les communiquerai car c'est dans la transparence la plus totale que cette opération a été réalisée. Au 1er octobre, il y avait 118 500 dossiers. Je pense qu'il y en aura un peu plus de 140 000, mais, compte tenu des doublons ou des fausses adresses vraisemblement moins, dans une proportion que je ne peux vous donner. La régularisation est effectuée selon des critères qui ont été définis notamment par la commission consultative des droits de l'homme. Environ 10 000 cartes de séjour temporaires ont été attribuées et presque autant de refus ont été opposés.
L'invitation à quitter le territoire donnera un délai supplémentaire, c'est-à-dire que les intéressés disposeront d'un délai de trois mois au terme duquel des dispositifs auront été mis sur pied pour leur permettre de se réinsérer autant que possible dans leur pays d'origine.
Mais, que ce soit clair, dès lors qu'ils n'ont pas fait l'objet d'un réexamen favorable, ils ont vocation à retourner dans leur pays d'origine. Je l'ai toujours dit et je le répète aujourd'hui devant la représentation nationale: il y a une distinction fondamentale entre les étrangers en situation régulière, qui ont les mêmes droits sociaux que les Français, et ceux qui, n'étant pas en situation régulière et ne pouvant pas être régularisés, ont vocation à rejoindre leur pays.
Très franchement vouloir faire de cette question un sujet de polémique est un mauvais service rendu au pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

Données clés

Auteur : M. Christian Cabal

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 29 octobre 1997

partager