Question au Gouvernement n° 1190 :
politique fiscale

11e Législature

Question de : M. Gilles Carrez
Val-de-Marne (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 10 mars 1999

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez.
M. Gilles Carrez. Ma question s'adresse au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Nos concitoyens se livrent actuellement à une occupation bien pénible qui est la déclaration de revenus. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Cette année, cette déclaration est accompagnée non pas d'une belle lettre de votre part, monsieur le ministre, mais plutôt de tableaux chiffrés. Et - ô surprise ! - l'un d'entre eux laisse entendre que les impôts baisseraient en 1999 par rapport à la richesse nationale. Monsieur le ministre, n'y a-t-il pas là une publicité mensongère ? («Si !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En effet, les impôts ne vont pas baisser en 1999. Ils vont au contraire augmenter.
M. Thierry Mariani. Bien sûr !
M. Gilles Carrez. Et je vais vous en donner trois exemples.
Premier exemple, les familles avec enfant vont payer beaucoup plus d'impôt sur le revenu en 1999, tout simplement à cause de l'abaissement brutal du quotient familial.
M. Pierre Lellouche. C'est scandaleux !
M. Gilles Carrez. Deuxième exemple, les propriétaires, qui ont déjà acquitté le droit au bail en 1998, vont le payer une deuxième fois en 1999. C'est la nouvelle technique fiscale socialiste: on fait payer deux fois le même impôt.
C'est d'ailleurs ce que M. le secrétaire d'Etat au budget vient de nous dire en répondant à une question.
Troisième exemple, la contribution sociale généralisée sera, en 1999, de plus du double de ce qu'elle était en 1997, avant que vous ne gagniez les élections.
Monsieur le ministre, pensez-vous que vous réussirez encore longtemps à faire prendre aux Français des vessies pour des lanternes ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Alain Néri. Pour ça, vous êtes experts !
M. Gilles Carrez. Pensez-vous que les Français sont assez crédules ou assez naïfs pour croire à une baisse d'impôts alors qu'ils vont augmenter ?
M. Jean-Louis Dumont. Charlatan !
M. Gilles Carrez. Bref, monsieur le ministre, quand allez-vous enfin passer aux actes ? Quand les impôts vont-ils diminuer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, vous avez sans doute pris connaissance de la dernière enquête de l'INSEE, parue ce matin, qui montre que la confiance des ménages de notre pays est à un niveau historiquement encore jamais atteint. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Et s'il en est ainsi, c'est sans doute parce que les ménages font plus confiance à ce que dit le Gouvernement qu'à ce que vous essayez de leur dire aujourd'hui. (Applaudissements sur les mêmes bancs.) Je vais reprendre chacun des points que vous avez évoqués.
D'abord, le quotient familial. Comme vous le savez, ainsi que de nombreux parlementaires, mais comme vous avez oublié de le mentionner à tous les Français qui nous écoutent, la modification du quotient familial est le pendant du rétablissement des allocations familiales qui avaient été supprimées l'année précédente. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Richard Cazenave. Quel culot !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il est donc clair que cela n'a pas ému les ménages car, si cela les avait troublés, ils n'auraient pas, aujourd'hui, comme le mois dernier, comme le mois précédent, manifesté une confiance dans l'avenir et dans le Gouvernement que les gouvernements que vous avez soutenus n'ont jamais connue.
Ensuite, vous avez abordé le droit au bail. Sans doute avez-vous dû sortir un instant pour une affaire personnelle quand Christian Sautter a répondu à cette question,...
M. Franck Borotra. Il n'a pas répondu !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... car il a clairement précisé qu'un propriétaire-bailleur qui ne changeait pas de locataire n'acquittait évidemment qu'une seule fois le droit au bail. Il n'y a pas de débat là-dessus.
Enfin, vous avez évoqué la CSG. Là, je le dis clairement, nous avons en effet cette année appliqué la CSG aux revenus du capital parce que nous considérons que c'est juste. Je crois me rappeler que vous m'avez un jour interrogé sur un M. Martin que vous connaissiez bien et qui vous rendait visite et que je vous ai déjà répondu sur cette question. C'est un choix politique, cette majorité l'assume: nous voulons que les revenus du travail soient moins imposés et que ceux du capital le soient plus.
M. Yves Nicolin. Et les retraités ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. C'est le contraire de votre choix; je comprends que vous le récusiez.
Au total, monsieur le député, la loi de finances, que vous n'avez pas votée, mais que cette majorité a adoptée, a fait baisser les impôts de 16 milliards de francs (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) par des mesures portant sur la taxe professionnelle, la TVA, la fiscalité des transmissions immobilières, par la suppression des taxes sur les cartes d'identité et les permis de conduire, et tous les Français qui ont à payer ces impôts le savent. Nous ferons le bilan à la fin de l'année. Personne ne sait exactement quel sera le résultat en termes de croissance - nous y reviendrons - et de fiscalité, mais ce qui est sûr, c'est que la loi de finances a organisé plus de baisses d'impôts que vous n'en avez jamais connu,...
M. Jacques Myard. Et le déficit ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... puisque je vous rappelle que votre exploit en la matière, c'était 80 milliards de francs de TVA supplémentaires par une hausse de deux points ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Ce qui est sûr, monsieur le député, et les Français le savent, c'est qu'il est difficile de faire baisser les impôts, mais l'on y parvient plus facilement en diminuant la TVA ou la fiscalité sur les transmissions immobilières qu'en augmentant la TVA comme vous l'avez fait. Faites comme nos concitoyens: faites confiance au Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Gilles Carrez

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 mars 1999

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