Question au Gouvernement n° 1205 :
durée du travail

11e Législature

Question de : M. Gaëtan Gorce
Nièvre (2e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 17 mars 1999

M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
M. Gaëtan Gorce. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
La loi sur les 35 heures trouve son rythme. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Yves Nicolin. Manipulateur !
M. Gaëtan Gorce. En se livrant à un calcul méticuleux, on dénombre 2 500 accords, 38 000 emplois créés ou préservés - pour l'essentiel des emplois créés - et au moins 800 000 salariés concernés. Et si l'on inclut les accords de Robien, les chiffres vont bien au-delà. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
On peut donc dire qu'une évolution est en marche: ...
M. Yves Nicolin. A reculons !
M. Gaëtan Gorce. ... un mouvement s'est engagé en faveur de la réduction du temps de travail et, mieux encore, en faveur de l'emploi. C'est cela qui devrait retenir votre attention, mesdames, messieurs de l'opposition, et non pas la recherche d'arguments polémiques.
M. Alain Barrau. Très bien !
M. Gaëtan Gorce. En outre, on constate que la négociation collective est également en train de démarrer très fort dans les branches. Même le MEDEF vient de le reconnaître, une «dynamique» - c'est le terme employé dans son document - est à l'oeuvre. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Il est surprenant qu'en dépit de cette évolution, certains préconisent un report de l'application de la seconde loi. De nombreux partenaires sociaux, y compris des chefs d'entreprises, estiment que ce serait en déphasage par rapport à la réalité du terrain.
Madame la ministre, pourriez-vous nous donner votre sentiment sur ce point ? («Très bien !» et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, le MEDEF a en effet choisi de s'exprimer, hier, sur la préparation de la deuxième loi relative aux 35 heures. C'est d'ailleurs bien naturel puisqu'il s'agit d'un acteur essentiel des relations sociales.
Tout comme vous, j'ai noté qu'il fait état du vaste mouvement de négociation engagé grâce aux 35 heures, et je m'en réjouis moi aussi.
J'ai été par contre un peu étonnée qu'il passe sous silence les accords d'entreprise - plus de 2 600 ont pourtant déjà été signés - pour ne parler que des accords de branche. Certes, ceux-ci sont importants, mais avant tout, pour préparer la seconde loi, il faut, comme vous avez commencé à le faire dans le rapport que vous avez rendu public, examiner de façon très concrète, très pragmatique, ce qu'apportent les accords d'entreprise. Comment profiter de la réduction de la durée de travail pour améliorer la compétitivité des entreprises et les conditions de vie des salariés et pour créer des emplois ?
Avec dix-huit mois de retard, le MEDEF reconnaît qu'il fallait maintenir le pouvoir d'achat, notamment celui des salariés les moins bien rémunérés, comme le veut le Gouvernement. Je m'en réjouis.
Mais pour ce qui est des propositions du MEDEF, je vous le redis, le Gouvernement souhaite maintenir le cap et le calendrier qui avaient été fixés. La deuxième loi, dont le texte sera connu avant l'été, après un processus de large concertation, s'appliquera donc au 1er janvier 2000 pour les entreprises de plus de vingt salariés et au 1er janvier 2002 pour les autres.
Nous l'avons dit à plusieurs reprises, nous nous appuierons sur les accords déjà réalisés, et particulièrement sur les accords d'entreprise, qui sont les plus concrets et montrent la réalité de la création d'emplois grâce aux 35 heures. Cette seconde loi sera équilibrée, mais elle sera efficace et permettra de réduire la durée du travail pour parvenir aux 35 heures.
Il serait inacceptable que nous fassions semblant d'afficher une durée, tout en maintenant la possibilité de travailler plus. Cela dit, nous ferons en sorte qu'elle débouche comme la première, sur des accords gagnants: gagnants pour les entreprises, qui y trouveront les modalités de souplesse dont elles ont besoin, sans imposer pour cela un stress supplémentaire aux salariés; gagnants pour les salariés, qui y verront une amélioration de leurs conditions de vie et de travail, une meilleure articulation entre leur vie familiale et leur vie professionnelle; gagnants pour l'emploi, à condition que nous réduisions vraiment la durée du travail - c'est pourquoi, entre autres choses, la proposition du MEDEF de tenir compte des jours fériés dans le calcul des 35 heures est inacceptable.
Le Gouvernement adoptera donc une démarche pragmatique, celle-là même que vous avez eue dans votre rapport. Nous nous appuierons sur les accords, en engageant une grande concertation.
Et je vous rejoins: certains ne souhaitent pas regarder la réalité en face, mais 39 000 emplois ont été créés ou sauvegardés grâce à la loi sur les 35 heures, et même plus de 52 000 depuis que l'annonce a été faite par le Gouvernement.
M. Patrick Ollier. C'est confus !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Continuons donc sur cette voie qui, comme le MEDEF le souhaite, privilégie la négociation et qui aboutit à des créations d'emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur certains bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Gaëtan Gorce

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 mars 1999

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