Question au Gouvernement n° 128 :
textile et habillement

11e Législature

Question de : M. Robert Galley
Aube (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 30 octobre 1997

M. le président. La parole est à M. Robert Galley.
M. Robert Galley. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, au début de l'année 1996, les pertes d'emploi dans l'industrie textile, sous la pression des produits en provenance du tiers monde et en raison des pertes de compétitivité liées aux dévaluations de la lire et de la livre, s'élevaient à 3 000 par mois. Or, ce secteur, vous le savez comme moi, est le deuxième, par l'importance du nombre de salariés, dans l'industrie française.
Conscient de ce problème, le gouvernement de M. Alain Juppé...
M. Henri Emmanuelli. Catastrophe !
M. Robert Galley. ... a mis en place le plan textile dont les résultats ont été immédiatement spectaculaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) L'espoir est revenu; le nombre des emplois a été stabilisé et, de surcroît, le nombre de jeunes embauchés a été très supérieur à ce qui était contractuellement prévu.
Nous connaissons tous les observations faites par la Commission de Bruxelles...
M. Jacques Fleury. Ah quand même !
M. Robert Galley. ... au sujet du caractère sectoriel de ce plan. Mais nous savons tous aussi le caractère positif des discussions qui ont eu lieu entre le commissaire M. Karel Van Miert et M. le ministre Jacques Barrot. En effet, celles-ci visaient à placer ce plan textile dans le cadre beaucoup plus large de réductions de charges pour les industries de main-d'oeuvre françaises.
Madame la ministre, les dirigeants et les personnels de l'industrie textile, cuir, habillement sont terriblement inquiets aujourd'hui de voir arriver la date fatidique du 31 décembre qui marquera la fin du plan textile si votre gouvernement ne trouve pas une solution pour cette réduction de charges. Nous avons entendu tout à l'heure votre boutade. Certes, nous nous intéressons à ce que vous faites, mais plus encore à ce que vous allez faire. En particulier, où en êtes-vous de vos discussions avec la Commission et quelles mesures envisagez-vous adopter pour répondre à cette angoisse qui nous étreint tous sur tous ces bancs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Je dois dire tout d'abord, monsieur le député, que j'apprécie le ton de votre question qui change un peu de celui qui a prévalu hier soir sur le même sujet, sur les bancs de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. Jean-Claude Perez. Elle a raison !
M. le président. Mes chers collègues, si vous posez une question, je suppose que c'est parce que la réponse vous intéresse, alors écoutez-la tranquillement !
Veuillez poursuivre, madame la ministre.
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Je voudrais rappeler qu'il y a effectivement sur tous les bancs, vous l'avez dit, monsieur le député, des élus qui s'intéressent à l'avenir des entreprises de l'industrie du textile, de l'habillement et de la chaussure. Je pense tout spécialement à M. le secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Pierret, élu d'une région où le textile est très important, et à moi-même, élue du Nord. Donc, croyez bien que, dès notre arrivée, nous avons été sensibles au fait que la Commission européenne ait rappelé au gouvernement français, au mois de mai dernier, que les dispositions qui avaient été prises étaient contraires au traité.
Je voudrais dire les choses simplement et telles qu'elles se passent. J'ai ici en ma possession les différentes lettres que la Commission européenne a envoyées au gouvernement français avant même que la loi ne soit votée. Elles disaient très clairement au gouvernement français que ce dispositif était illégal et que, s'il le faisait voter, il risquait fort d'être poursuivi et que les entreprises seraient obligées de rembourser les sommes qu'elles auraient indûment perçues.
On peut toujours critiquer l'Union européenne mais, pour bien connaître ce secteur comme vous, je sais que ce qui a fait le plus de mal à l'industrie du textile, de l'habillement et de la chaussure ces derniers mois, ces dernières années, ce sont, comme vous l'avez dit, les dévaluations compétitives de la lire et de la livre. Nous avons besoin de l'Europe et de l'euro pour éviter justement de telles dévaluations compétitives. Pour cela, il faut commencer par appliquer les textes, notamment le traité que nous avons signé, et qui vont nous amener vers cet euro qui empêchera que les pays européens se fassent concurrence en matière de textile.
Mais j'en reviens au sujet. Qu'avons-nous trouvé ? Nous avons trouvé quatre lettres de la Commission enjoignant le gouvernement français de suspendre ce plan alors même que vous continuiez à dire que non seulement il serait poursuivi jusqu'à la fin de l'année mais qu'il serait étendu l'année prochaine.
Il est vrai que M. le ministre des affaires sociales avait rencontré M. Van Miert pour essayer de discuter et pour lui demander s'il serait possible d'étendre à d'autres secteurs la réduction de cotisations sociales.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Voilà !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. J'ai ici la réponse de M. Van Miert du 26 mai 1997 adressée à M. Barrot dans laquelle il lui dit que cela n'est pas possible. Je la lis: «Il est toutefois nécessaire que cette extension dont vous me parlez bénéficie à l'ensemble de l'économie française afin que le dispositif projeté puisse être considéré comme une mesure générale ne relevant pas des règles communautaires en matière d'aide d'Etat.»
M. Richard Cazenave. Mais c'est une autre politique que vous avez choisie !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Et M. Van Miert ajoutait: «Une extension de la mesure des charges à quelques autres secteurs industriels seulement - c'est ce que proposait M. Barrot - en plus des quatre visés par le dispositif précédent ne suffirait pas à remettre en cause la qualification d'aide qui a conduit la Commission à se prononcer de manière négative le 9 avril dernier.»
Lorsque nous sommes arrivés au Gouvernement, les entreprises françaises étaient sur le point de recevoir des notifications pour remboursement. C'est l'intervention de Christian Pierret et de moi-même qui nous a permis d'obtenir un délai supplémentaire jusqu'à la fin de l'année.
M. Thierry Mariani. Ce n'est pas vrai !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Ecoutez, M. Van Miert a fait une déclaration qui a été reprise par un journal français, la semaine dernière ! Les entreprises belges ont déjà reçu leur notification et sont en train de rembourser.
M. Thierry Mariani. Pas les entreprises de moins de cinquante salariés !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous avons donc obtenu quelques mois supplémentaires. Nous allons les utiliser non pas à nous montrer arrogants vis-à-vis de la Commission en disant que nous appliquerons le plan dans l'illégalité, mais à trouver, avec les secteurs du textile, de l'habillement et de la chaussure, des solutions qui passent par des aides à la réduction de la durée du travail, à la réorganisation du travail, à l'innovation et à la créativité, à la formation. Toutes ces aides diminueront les charges des entreprises puisque ce sont des exonérations de charges sociales. Ce que nous avons proposé à ces entreprises est à la hauteur de ce que constituait le plan Borotra. Nous les avons rencontrées, nous les reverrons la semaine prochaine. Croyez bien que ce dossier est traité avec toute la rigueur qu'il mérite, mais dans le respect des traités internationaux que la France a signés. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Jean-Pierre Brard. Très bien !

Données clés

Auteur : M. Robert Galley

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 30 octobre 1997

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