DOM : Antilles-Guyane
Question de :
M. Alfred Marie-Jeanne
Martinique (4e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert
Question posée en séance, et publiée le 2 juin 1999
M. le président. La parole est à M. Alfred Marie-Jeanne.
M. Alfred Marie-Jeanne. La question s'adresse à M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, comme l'écrivait Frantz Fanon, je vous invite à quitter «cette Europe qui n'en finit pas de parler de l'homme, tout en le massacrant partout où elle le rencontre, à tous les coins de ses propres rues, à tous les coins du monde».
Quittons donc la Corse et le Kosovo pour Santo-Domingo et Paramaribo.
En République dominicaine, les 16 et 17 avril 1999, s'est tenu le deuxième sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Association des Etats de la Caraïbe. Du 26 au 29 avril, le président de la région Guyane a effectué une visite au Surinam. Ces deux rencontres ont fait éclater au grand jour des contradictions d'un autre âge.
En République dominicaine, les membres de l'AEC ont déploré et refusé que la mer des Caraïbes soit utilisée en permanence pour le transport des déchets nucléaires et toxiques. Mais la France, en tant que pays associé, estimant qu'il n'y avait point de danger encouru, a publiquement renoncé à approuver la déclaration de politique générale, ainsi que celles portant sur les risques naturels majeurs et le tourisme durable, lesquelles ne faisaient pourtant pas problème. A la dernière minute, on ôta le droit de signer au président de la région Guyane, pourtant chef de délégation.
Au Surinam, M. l'ambassadeur de France a tout fait pour contrecarrer et minimiser la représentation guyanaise, pourtant invitée très officiellement par le Gouvernement d'un pays limitrophe.
Ces incidents révélateurs sont pour le moins regrettables. Il est nécessaire de redistribuer les rôles en ce qui concerne les relations extérieures régionales, afin de permettre à la Guadeloupe, à la Guyane et à la Martinique de participer et d'intervenir de plein droit. Monsieur le ministre, le moment n'est-il pas venu d'y penser et surtout d'y souscrire ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Pierre Lellouche. Cette question est scandaleuse ! Cela reviendrait à accorder l'indépendance !
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur le député, en réalité, vous avez posé plusieurs questions distinctes; j'essaierai d'y répondre séparément.
Le transport des déchets nucléaires dans la mer des Caraïbes fait l'objet depuis toujours de débats au sein de l'Association des Etats de la Caraïbe. La France ne manque aucune occasion de rappeler que le transport des substances dangereuses se fait dans le strict respect des normes internationales et du droit international et que ce transport ne représente pas de menace pour la mer des Caraïbes. C'est pourquoi elle a demandé qu'une réserve soit apportée au paragraphe de la déclaration politique qui est relatif à cette question. Devant le refus de la présidence du sommet, le chef de délégation, le président de la région Guyane, a été conduit à ne pas signer le document.
M. Pierre Lellouche. C'est normal !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Par contre, monsieur le député, contrairement à l'information dont vous disposez, le protocole d'accord créant la zone de tourisme durable Caraïbes a bien été signé par le président de conseil régional. Quant au protocole d'accord sur les catastrophes naturelles - qui intéresse évidemment beaucoup les Etats de la région, mais aussi la France - s'il n'a pas été signé, c'est parce que son examen par les ministères compétents n'était pas terminé. Toutefois, je peux vous assurer qu'il sera signé très rapidement.
S'agissant du voyage du président de la région Guyane au Surinam, qui répondait en effet à une invitation officielle des autorités de Paramaribo, je dois dire que, conformément à l'usage, c'est l'ambassadeur qui a préparé le voyage et qui a présenté le président aux autorités surinamiennes; il n'y a là rien d'extraordinaire. Contrairement à ce que vous venez d'affirmer, monsieur le député, le Gouvernement n'a jamais eu la volonté d'empêcher ou de contrarier ce voyage.
Je vous le rappelle, le Gouvernement entend encourager la coopération régionale dans la Caraïbe comme ailleurs et il souhaite que les collectivités locales, en particulier les DOM-TOM, s'y impliquent fortement. Le Premier ministre l'a dit à cette tribune dès 1997. Je l'ai rappelé à Saint-Domingue l'an dernier lors d'une réunion conjointe des préfets et des ambassadeurs. Mon collègue Jean-Jack Queyranne l'a encore répété à l'occasion du débat sur les politiques concernant l'outre-mer.
Enfin, le Premier ministre a confié à M. Claude Lise, sénateur de la Martinique, et à M. Michel Tamaya, député de la Réunion, la rédaction d'un rapport sur ce sujet. Les conclusions en seront tirées très rapidement et vous serez évidemment informé des mesures que nous serons amenés à prendre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Alfred Marie-Jeanne
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : coopération
Ministère répondant : coopération
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 juin 1999