Question au Gouvernement n° 1404 :
politique de la défense

11e Législature

Question de : M. François Fillon
Sarthe (4e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 3 juin 1999

M. le président. La parole est à M. François Fillon.
M. François Fillon. Monsieur le Premier ministre, la politique de défense de la France fait l'objet depuis la fin des années 70 d'un consensus exceptionnel parmi les grands pays européens. Ce consensus est une force pour notre pays qui est aujourd'hui en mesure de jouer le premier rôle dans l'édification d'une défense européenne que la situation dans les Balkans rend plus nécessaire que jamais.
Or, monsieur le Premier ministre, un membre de votre gouvernement et une partie active de votre majorité viennent de remettre en cause ce consensus.
Mme Voynet a en effet déclaré il y a quelques jours à Toulouse qu'elle revendiquait, je la cite, «un droit d'inventaire» sur la politique militaire de la France. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Michel Hunault. Les propos de Mme Voynet sont scandaleux !
M. François Fillon. Elle fait de la réduction des dépenses militaires un débat où se joue l'avenir de la majorité plurielle. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Charles Cova. Elle n'a qu'à quitter le Gouvernement !
M. François Fillon. Elle a enfin ironisé, avec la compétence qu'on lui connaît dans ces domaines, sur le coût et les avaries du porte-avions Charles-de-Gaulle ainsi que sur notre politique d'exportation d'armements. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Cette déclaration est évidemment à replacer dans le contexte de la campagne pour les élections européennes. Celle-ci nous a permis de découvrir le programme des Verts, composante importante de votre majorité, dans le domaine de la défense. Le pays doit savoir ce que pense le Premier ministre, qui, au titre de l'article 21 de notre Constitution, est responsable de la défense nationale, des déclarations de son ministre de l'environnement, comme des propositions suivantes d'une partie importante de sa majorité: l'instauration d'une défense populaire, civile et non violente (Exclamations et rires sur les mêmes bancs); l'abolition définitive de l'arme nucléaire; la reconversion des industries d'armement vers des productions civiles; le remplacement à terme des forces armées nationales par des Casques bleus européens. («Voynet démission !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Thierry Mariani. De telles propositions sont scandaleuses et irresponsables !
M. François Fillon. Outre qu'il est cocasse que ces propositions émanent d'un des partisans les plus déterminés d'une intervention militaire terrestre au Kosovo, elles portent atteinte à la crédibilité de notre politique de défense et sèment le trouble dans nos armées. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Yves Fromion. Mme Voynet rit jaune !
M. François Fillon. Alors, monsieur le Premier ministre, ma question est simple: qu'en pensez-vous ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Je remercie M. Fillon de me donner l'occasion de réaffirmer que la politique de défense de ce pays, placée sous l'autorité, naturellement, du Président de la République...
M. François Fillon. Et du Premier ministre !
M. le ministre de la défense. ... et du Premier ministre, responsable de la défense nationale, est une politique cohérente, qui s'exerce dans la continuité et qui s'appuie sur un large consensus, lequel n'empêche pas le débat. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. André Berthol. Ni les incohérences !
M. le ministre de la défense. M. Fillon et ses collègues de groupe sont, je crois, au moment de la vie politique où nous sommes, les mieux placés pour savoir que peuvent coexister des visions extrêmement différentes de la politique de défense et de sécurité non seulement au sein d'une majorité ou dans une coalition, mais à l'intérieur même d'une formation politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Louis Debré. Il peut aussi y avoir des gens irresponsables !
M. le ministre de la défense. Je rejoins M. Fillon pour saluer la détermination avec laquelle notre pays assume aujourd'hui, au sein de l'Europe, ses responsabilités en matière de sécurité, et je pense que nous voyons approcher le moment où nos efforts, très largement soutenus dans cet hémicycle,...
M. Jean-Louis Debré. Pas par Mme Voynet !
M. le ministre de la défense. ... y compris par la formation politique que vous avez citée, vont produire des effets dans le sens de la restauration de la paix et de la stabilité.
M. Jean-Louis Debré. Mme Voynet dit n'importe quoi et cela n'a aucune importance !
M. le ministre de la défense. Le débat doit se poursuivre, aboutir à des décisions, et il nous faut travailler dans la cohésion.
Je pense, monsieur Fillon, qu'en posant votre question vous éprouviez une certaine nostalgie et que vous vous demandiez si le Gouvernement auquel vous participiez avait atteint le même degré de sérénité, de capacité de débat et de cohésion que celui que nous avons aujourd'hui ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Michel Hunault. Ce n'est pas un gouvernement, c'est un assemblage !

Données clés

Auteur : M. François Fillon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Défense

Ministère interrogé : défense

Ministère répondant : défense

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juin 1999

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