chasse
Question de :
M. Charles de Courson
Marne (5e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 10 juin 1999
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. Je tiens tout d'abord à faire observer à M. le ministre de l'agriculture qu'il n'a pas répondu à la question de M. Sauvadet. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Les chasseurs français sont inquiets. Pourront-ils encore chasser cette année, et si oui dans quelles conditions ? Cette légitime inquiétude des chasseurs résulte des conséquences juridiques de trois séries de décisions de justice. Tout d'abord, l'annulation par les tribunaux administratifs de nombreux arrêtés préfectoraux relatifs aux dates d'ouverture et de fermeture de la chasse va se traduire par une réduction du temps de chasse.
Ensuite, l'annulation par le Conseil d'Etat des dispositions relatives à la chasse crépusculaire au gibier d'eau, figurant dans la circulaire de 1996 du directeur de l'Office national de la chasse, va entraîner la suppression de la chasse à la passée du soir comme à la passée du matin.
Enfin, l'annulation partielle de la loi Verdeille par la Cour européenne des droits de l'homme va entraîner la réduction des territoires de chasse des associations communales de chasses agréées et le retrait des terres et des bois, propriétés des chasseurs comme des non-chasseurs.
De nombreux parlementaires ont attiré votre attention, madame la ministre, sur ces graves questions et sur l'urgence de trouver des solutions adaptées. Or vous avez montré votre incapacité de dialoguer avec les représentants élus des chasseurs (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et même avec les membres de votre propre majorité...
Mme Christine Boutin. Absolument !
M. Charles de Courson. ..., et votre tendance à privilégier les organismes hostiles à la chasse.
Mme Christine Boutin. Mme Voynet n'est favorable qu'au cannabis !
M. Charles de Courson. Aussi, des collègues sénateurs, notamment M. du Luart et M. Larché, ont pris l'initiative de déposer le 1er juin une proposition de loi portant diverses mesures d'urgence relatives à la chasse, et qui vise à résoudre tous ces problèmes. C'est un texte d'apaisement, qui trouve un équilibre, s'agissant tant de la loi Verdeille que de la chasse crépusculaire. En outre, il a l'appui de Union des fédérations de chasseurs et de l'Association nationale des chasseurs de gibier d'eau. Il sera discuté le 22 juin au Sénat, et sans aucun doute adopté.
Mme Odette Grzegrzulka. Nous, nous avons d'autres urgences !
M. Charles de Courson. Ma question sera donc simple. Alors que nous sommes à quelques semaines de l'ouverture anticipée de la chasse au gibier d'eau, le Gouvernement est-il prêt à inscrire ce texte à l'ordre du jour des débats de l'Assemblée nationale avant le 30 juin, ou lors d'une éventuelle session extraordinaire ? Ou préfère-t-il que la situation continue à se dégrader et débouche sur des affrontements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Pierre Brard. La chasse aux aristocrates !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'evironnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, votre intervention a un mérite considérable. Elle rappelle en effet que ce sont les décisions des tribunaux et du Conseil d'Etat, et non pas l'obstination délétère d'un ministre hostile à la chasse, qui ont conduit à rouvrir des dossiers ayant posé depuis très longtemps des problèmes au sein du monde de la chassse.
S'agissant de l'annulation des arrêtés préfectoraux pris sur la base de la loi de 1998, vous savez très bien que nous avons pris conscience du problème il y a plusieurs mois déjà. En étroite concertation tant avec le monde de la chasse qu'avec le monde de la protection de l'environnement, nous avons chargé un groupe de scientifiques, accepté par l'ensemble des parties et présidé par le professeur Lefeuvre, de faire des propositions de compromis. M. Lefeuvre et ses pairs, qui sont actuellement en pleine période d'examens, m'ont fait savoir qu'ils ne pourraient nous rendre compte de leur travail que dans une quinzaine de jours.
M. Charles de Courson. Ce sera trop tard !
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Soyons sérieux, monsieur de Courson : ce problème empoisonne les relations entre le monde de la chasse et celui de la protection de l'environnement depuis vingt ans. Alors ne nous reprochez pas six mois de concertation pour élaborer un compromis ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)
Concernant la chasse de nuit, vous savez très bien que, contrairement à ce qui a été dit ici ou là, il ne s'agit pas d'un acquis de la Révolution française. La chasse de nuit a toujours été interdite dans notre pays.
Mme Christine Boutin. Nous parlons de chasse crépusculaire !
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Depuis une loi de 1844, depuis l'inscription dans le code rural, quelques minutes de chasse au coucher du soleil et au lever du jour étaient tolérées. C'est la tentative de l'Office national de la chasse de régulariser des périodes plus grandes qui a conduit à une annulation par le Conseil d'Etat. De ce point de vue, la proposition de loi sénatoriale qui vise à entériner cette autorisation de chasse de nuit ne me paraît pas du tout s'inscrire dans la continuité des efforts de maîtrise des périodes de chasse engagés par les chasseurs eux-mêmes.
Concernant, enfin, la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme à propos de quelques articles de la loi Verdeille, nous travaillons actuellement à la mise au point de dispositions qui permettraient de lever les difficultés.
A cet égard, la proposition de la loi sénatoriale est intéressante (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance) parce qu'elle permet la reconnaissance du droit de gîte pour les propriétaires non chasseurs et qui s'engageraient effectivement à ne pas chasser sur d'autres parcelles. En revanche, elle ne répond pas à l'une des trois critiques formulées par la Cour européenne des droits de l'homme concernant l'inégalité de situation entre les petits propriétaires qui ont des petites parcelles et les gros propriétaires.
Mme Christine Boutin et M. Arnaud Lepercq. Et alors ?
M. Maurice Leroy. Amendez-la !
Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Donc, il me semble que ce problème sérieux demande à être étudié davantage. Mais je comprends que l'opposition cherche à défendre essentiellement les droits des gros propriétaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ce n'est pas notre cas. Nous voulons, quant à nous, une bonne loi cynégétique, équitable au regard du droit de propriété. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Huées et claquements de pupitres sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. Mes chers collègues, pensez un instant au spectacle que vous donnez ! (« Qu'elle donne elle ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Charles de Courson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Chasse et pêche
Ministère interrogé : aménagement du territoire et environnement
Ministère répondant : aménagement du territoire et environnement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 1999